lundi 31 octobre 2011

Actu. Journalistes : la tête dans le guidon ?










Et si les Indignés
avaient raison?
(1)
Et si les journalistes,
à force de rester la tête
dans le guidon,

s'apparentaient
quelque part

à de marionnettes
de l'inconscient?

Et s'ils étaient
peu à même

de prendre
leurs distances

avec les cases prédécoupées d'une certaine réalité?
Et s'ils éprouvaient les pires difficultés
à dépasser les idées vagues?
Extrait, impitoyable et sans concession, du dernier ouvrage
du philosophe et sociologue français Philippe Corcuff (2).
Plumitifs sensibles, s'abstenir...

«La tête dans le guidon, les journalistes tendent (...) à naturaliser (à prendre et à faire prendre pour naturelle) et, partant, à fataliser (à prendre et à faire prendre pour fatale) la définition dominante de la politique portée par la professionnalisation politique moderne; une définition étroite déplaçant les citoyens à sa lisière.
Par ailleurs, les profondeurs temporelles de la politique, vers le passé et vers l'avenir, sont aplaties par le "présentisme" diagnostiqué par l'historien François Hartog: un présent enfermé dans les agitations de l'immédiateté toujours recommencées.

Ce que le spécialiste du Moyen-Age Jérôme Baschet, dans le sillage d'Hartog, appelle "un présent perpétuel, niant l'avant et l'après".»

Marionnettes de l'inconscient...

«Les théories du complot sont donc également inopérantes dans leur instance sur les supposées manipulations conscientes et cachées des médias.
La vue d'un champ journalistique relativement autonome proposée par Pierre Bourdieu, faisant largement des journalistes des marionnettes de logiques qui leur échappent (comme la recherche de scoops) et de stéréotypes professionnels (comme la priorité donnée au "nouveau" ainsi qu'aux formats courts) apparaît plus réaliste.

Certes, les contraintes économiques et/ou politiques, pèsent plus ou moins en fonctions des médias concernés, mais "par l'intermédiaire de l'effet de champ" rappelle Bourdieu, de ses mécanismes spécifiques.

Et l'état avancé de précarisation de ce secteur professionnel, avec une masse de "pigistes" contraints à une activité aléatoire, constitue un facteur particulier de conformisme.
Mais la formation des journalistes favorisent également l'apprentissage de stéréotypes professionnels (comme les contraintes de "l'urgence" et la quête du "nouveau"), et leur transformation en cadres "naturels" de l'activité journalistique routinière.
»

Cases prédécoupées et idées vagues

«Au sein d'un tel climat d'illusionnisme corporatiste, nombre de journalistes tendent alors, quand ils font appel à des intellectuels, à privilégier des experts qui ne sortent pas des cases prédécoupées par les conceptions technocratiques et/ou politiciennes de la vie sociale ("l'économique ", le "social", le "politique", le culturel", etc.) ou à des penseurs aux idées vagues mettant en forme de manière superficiellement savante ce que lesdits journalistes pensent déjà.»

Besoin de décalage

«Pourtant, loin de cette pensée endogamique, où les journalistes sont en quête d'intellectuel qui leurs ressemblent, les médias n'auraient-ils pas besoin, dans une société plus authentiquement démocratique et pluraliste, de questionnements et de connaissances critiques davantage décalés?» (3)

Philippe Corcuff

(1) Voir le précédent message, Actu. Indignés: ces médias qui nous hypnotisent..., et l'étude complète dont il est extrait: Engels Christophe, Une journée d'Ivan l'Indigné. L'épisode bruxellois: Projet ou utopie?, étude du Siréas, Bruxelles, 2011.
(2) Philippe Corcuff enseigne à la faculté de Sciences politiques de l'université de Lyon. Cofondateur des universités populaires de Lyon et de Nîmes, il est aussi membre du Conseil scientifique d'ATTAC.
(3) Ce message est extrait de Corcuff Philippe, B.a.-ba philosophique de la politique (pour ceux qui ne sont ni énarques, ni politiciens, ni patrons, ni journalistes), Textuel, coll. Petite encyclopédie critique, Paris, 2011, pp.28-31. Les titre, chapeau, intertitres et mises en évidence sous forme de caractères gras sont de la rédaction.

mardi 25 octobre 2011

Actu. Indignés: ces médias qui nous hypnotisent...


«D
ans le chef
de la presse classique,
il n'est jamais
vraiment question
de sortir
du moule capitaliste.
»
Telle est l'accusation
portée par les Indignés
à l'encontre
des grands médias.
Extrait d'une étude (1)
réalisée
par l'initiateur
de ce blog
pour l'a.s.b.l. Siréas.

Si les journaux écrits, télévisés et parlés ont souvent consacré un «espace/temps» non négligeable aux indignés, ceux-ci ne les tiennent pas pour autant en haute estime.
De quoi faire penser à la revue Temps critiques que «L’atti­tude vis-à-vis de la presse est celle d’une quête de son effet miroir (miroir qu’on espère gros­sis­sant)» et que «cette mise en abyme com­mu­ni­ca­tion­nelle signe dès le départ le manque de pers­pec­ti­ves ou sim­ple­ment l’élan insuf­fi­sant du mou­ve­ment.» (2)
Ainsi s'exprime celle (3) qui se donne pour mission de procéder à «un état des lieux de l'activité critique en France et dans le monde» (4).
Avant de se fendre d'un exemple révélateur...
«En Espagne, (...) les médias passèrent en boucle des scènes d’accro­chage censées démon­trer la vio­lence des indi­gna­dos.
Depuis, les porte-parole du mou­ve­ment cher­chent à donner des preu­ves du caractère paci­fi­que des ras­sem­ble­ments et deman­dent à leurs par­ti­ci­pants d’expri­mer visi­ble­ment cette posi­tion (par des affi­chet­tes au format A5 par exem­ple).» (5)

Info ou intox?

Le «quatrième pouvoir» serait-il pour les indignés un simple outil ayant vocation exclusive à servir de caisse de résonance à leurs idées?
«Non, nous assure Damien (6).
Pas plus que nous ne cherchons à nous plaindre du nombre de reportages qui nous ont été directement ou indirectement consacrés, nous n'entendons refuser la critique.
Le problème que nous avons avec bon nombre de journalistes se situe à un autre niveau.
Il renvoie moins au cas spécifique de leur couverture du projet indigné qu’au rôle général qu’ils jouent dans la société.
Car dans le chef de la presse classique, il n'est jamais vraiment question de sortir du moule capitaliste.
Aujourd’hui, il s’agit plus pour elle de faire du profit que de ramener de l’information.
Une information, qui plus est, sélectionnée en fonction de ce qui est susceptible d’intéresser ce consommateur qu'est devenu le lecteur, le téléspectateur ou l'auditeur.
Elle fait office d’hypnotiseur afin de garder les gens “dans leur film”.
Nous sommes en effet sous la coupe d'une oligarchie des médias.
Attention!
Il ne faut pas tous les mettre dans le même sac.
Notre frustration ne porte pas du tout sur les supports alternatifs tels qu'il en existe sur Internet: sites, blogs…
Elle renvoie uniquement aux “main stream medias”.
Ceux qui cherchent moins à interpeller qu'à rapporter de l’argent. Ceux qui jouent le carte du réductionnisme.
Ceux qui se complaisent dans la simplification à outrance.
Autant de perversions qui confinent au dysfonctionnement...
» (7)(8)

Christophe Engels

(1) Engels Christophe, Une journée d'Yvan... l'indigné. L'épisode bruxellois: projet ou utopie?, étude dirigée, supervisée et mise en page par le Siréas (Service International de Recherche, d'Education et d'Action Sociale, à Bruxelles), octobre 2011.
(2) Les indignés: écart ou sur-place ? Désobéissance, résistance et insubordination, in Temps critiques.
(3) La revue Temps critiques donc.
(4) http://tempscritiques.free.fr/spip.php?article283.
(5) Les indignés: écart ou sur-place ? Désobéissance, résistance et insubordination, in Temps critiques, ibidem.
(6) Damien est un Français expatrié en Angleterre puis au Pays-Bas, qui met son multilinguisme au service de la cause indignée.
(7) Cité in Engels Christophe, Une journée d'Yvan... l'indigné. L'épisode bruxellois: projet ou utopie?, ibidem, pp.12-13.
(8)
Ce message est extrait de Engels Christophe, Une journée d'Yvan... l'indigné. L'épisode bruxellois: projet ou utopie?, ibidem, pp.12-13
(9) Pour suivre (sous réserve de modifications de dernières minutes et, étant donnée la longueur du document présenté ici en lien, pas avant les alentours du 1er novembre): des messages consacrés
. aux Indignés,
. à l’Approche Centrée sur la Personne (d'après Carl Rogers, avec l’aide précieuse de Jean-Marc Priels),
. à l'empathie (avec l’aide précieuse de Jean-Marc Priels),
. à plusieurs aspects de la Communication Non Violente et à l'Université de Paix (d'après Marshall Rosenberg, avec l’aide précieuse de Jean-Marc Priels),
. à la reliance et à la sociologie existentielle (par Marcel Bolle de Bal),
. au personnalisme (par Vincent Triest,...)...
.

lundi 24 octobre 2011

Actu. Indignés: le temps de l'approfondissement.

L'engagement des Indignés
relève-t-il du projet
ou de l'utopie?

Telle est la question
que pose une étude

réalisée par l'initiateur
de ce blog
pour le comptede l'a.s.b.l. bruxelloise Siréas.
Un document (1) à paraître tout prochainement (2)
et dont voici un bref extrait en avant-première.

Les Indignés ne se contentent pas de s'offusquer.
Il s'engagent aussi: en se déplaçant, en prenant la parole, en campant, en participant à des marches...
Il n'empêche que, trop souvent, leur combat s'inspire d'une logique réactive.
Et se décline sur le mode négatif.
Les intéressés cantonnent donc leur action dans un registre défen­sif: celui du refus.
Ils sont contre...
Mais contre quoi?
Contre le système politique?
Contre la tyrannie de l'économique?
Contre l'ensemble de l'ordre établi?...
«Nos sociétés regorgent de gens qui sont “contre”, tandis que se raréfient ceux qui sont “pour” quelque chose de concret et d’identifiable, analyse le philosophe espagnol Daniel Innerarity.
Ce qui mobilise aujourd’hui, ce sont des énergies négatives d’indignation et de victimisation.
Tout le problème consiste à savoir comment y faire face.
C’est ce que Pierre Rosanvallon a appelé l’“ère de la politique négative”, où ceux qui s’opposent ne le font plus à la façon des rebelles ou des dissidents d’hier, dans la mesure où leur attitude ne dessine aucun horizon souhaitable, aucun programme d’action.
Dans ce contexte, le problème est de réussir à distinguer la colère régressive de l’indignation juste, et de mettre cette dernière au service de mouvements efficaces et transformateurs.» (3)

Un peu de patience, s.v.p.!

«Balivernes!, s'insurge Damien (4).
Il faut nous laisser le temps d'oeuvrer à l'approfondissement de notre projet.
Avant d'agir, nous devons d'abord mener cette tâche à bien.
Car il n'est pas question de reprendre en l'état une idéologie indignée qui, aujourd’hui, reste trop focalisée sur l'analyse marxiste et sur l’anarchisme.
Nous avons besoin de régénérer ce qui existe.
Comment s'en étonner?
Le monde a changé.
Le principe de solidarité nationale, par exemple, est remis en cause.
La sécurité sociale est vendue au plus offrant.
Et tous les services publics sont menacés de privatisation.
Ce qui constitue une remise en cause fondamentale du contrat social en vigueur dans toute l’Europe depuis cinquante ans.» (5)(6)(7)

Christophe Engels

(1)
Engels Christophe, Une journée d'Ivan... l'indigné. L'épisode bruxellois: projet ou utopie?, étude du Siréas (Service International de Recherche, d'Education et d'Action Sociale, à Bruxelles: www.sireas.be), octobre 2011.
(2) Plus d'informations suivront sur ce blog.
(3) Innerarity Daniel, S'indigner pour que rien ne change, in El Pais du 25/05/2011.(4) Damien est un Français expatrié en Angleterre puis au Pays-Bas, qui met son multilinguisme au service de la cause indignée.
(5) Cité in Engels Christophe, Une journée d'Ivan... l'indigné. L'épisode bruxellois: projet ou utopie?, ibidem, pp.16-17.
(6) Pour toute information pratique sur les Indignés, voir www.indignez-vous.be/fr/.
(7) Ce message est extrait de Engels Christophe, Une journée d'Ivan... l'indigné. L'épisode bruxellois: projet ou utopie?, ibidem, pp.16-17.

jeudi 20 octobre 2011

Actu. Indignés: on demande Manifeste...

Quinze octobre 2011.
Des millions d'Indignés
se réunissent
dans le monde.
Et le besoin
d'un Manifeste
digne
de ce nom
de se faire sentir.

D'urgence.
D'extrême urgence.
Sous peine de laisser filer
une extraordinaire opportunité...


Deux longues tresses, de grandes boucles d'oreille, un large polo rouge à col roulé, un sac à dos de la même couleur, une longue jupe brune dissimulant partiellement un pantalon...
Et un sifflet vert à la bouche.
Dans le parc du Cinquantenaire, à Bruxelles, la jeune femme bat la mesure.
Devant elle, une multitudes de crécelles, d'instruments métalliques, de tambours et tambourins en tous genres...
Qui, tous, suivent le tempo.
Avant de laisser brièvement place au silence.
Puis de repartir en rythme.
Des bulles de savon apparaissent, éphémères.
Ainsi que des ballons, aériens, qu'on se renvoie dans la foule.
Quel beau spectacle!
Quelle harmonie!
Et quelle... source de réflexion!
Car autant la foule communie dans une sincère et authentique indignation, autant cette émotion ne débouche sur aucune construction rationnelle un tant soit peu aboutie.
Aucun projet commun, donc.
Juste une multitude de formules chocs...

Formules chocs

"99% de crise, 1% de voleurs", affichent bon nombre de manifestants.
Qui, sur le chemin les ayant menés jusqu'ici, ont scandé
. que "Le capitalisme est dans les choux... de Bruxelles!",
. que "Ce n'est pas à nous / de payer la dette, / c'est au système / politico-financier",
. ou encore que "La vraie démocratie, elle est i-ci!".
Non sans prendre le temps de laisser quelques messages sans ambiguïté sur les vitres de l'un ou l'autre bâtiment Dexia...
. "Etes-vous seulement humains?",
. "Casino!",
. "Burn me!"...
Et de se remettre en route, accompagnés d'un camion lesté de quelques mots d'ordre explicites...
. "La parole aux peuples",
. "CRS, indignez-vous! Journalistes, avec nous!",
. "Nobody's patience is perfect",
. "L'utopie n'est pas l'irréalisable, c'est l'irréalisé",
. "Les marchés nous gouvernent et nous n'avons pas voté pour eux"...
Avec, en guise de bonus, une question qui tue: "Anesthésie générale?"...

Ouiii!

En arrivant ici, on s'est encore empressé d'avertir les automobilistes d'une banderole bien sentie: "La dette publique a un sexe. Austérité = précarité."
Et, pour certains, de se revendiquer de Che Guevara: "Hasta la verita sempre."
Mais l'heure de l'assemblée générale est arrivée.
Et les revendications, systématiquement en trois langues, ont commencé à se succéder...
. Pour l'abolition des bourses. Ouiii!
. Pour la fermeture des centres fermés. Ouiii!
. Contre la dictature agro-alimentaire (1). Ouiii!
. Pour une manifestation contre Sarkozy qui sera ce mardi au Parlement européen. Ouiii!
. Contre les téléphones mobiles qui génèrent des morts au Congo. Ouiii!
. Contre le viol quotidien de quarante-huit femmes dans ce même pays. Ouiii!
. Pour... un maximum de solidarité à l'égard des indignés. Ouiii!
Le tout ponctué des remerciements d'un intervenant qui s'exprime en tant que Bruxellois.
Et d'une belle tirade du Mahatma Gandhi: "D'abord, ils vous ignorent. Ensuite, ils rient de vous. Puis, ils vous combattent. Enfin, vous gagnez."

Transformer l'essai...

Au moment de prendre congé, une impression vous gagne: celle de s'éloigner d'une... auberge espagnole!
"C'est tout le problème, explique Raphaël, un indigné venu de Paris.
Comme on cherche à rassembler, on ne veut pas exclure.
Et comme on n'exclut pas, on a un peu de mal à se définir.
Dans un avenir proche, il faudra s'atteler à ce travail..."
On demande donc Manifeste.
Et de toute urgence.
Sous peine de laisser filer une opportunité.
Une extraordinaire opportunité... (2)

Christophe Engels

(1) A noter que, contrairement aux autres sujets mentionnés, ce point a fait l'objet d'un développement argumenté.
(2) Une étude sur les Indignés, réalisée par l'auteur de ces lignes pour l'a.s.b.l. Sireas (Service International de Recherche, d'Education et d'Action Sociale, à Bruxelles), sera bientôt disponible, notamment sur Internet. Plus d'informations suivront sur ce blog.

lundi 17 octobre 2011

Psychologie positive. Sens unique.

«Le sens
de la vie
est la plus pressante
des questions.
»
Ainsi s'exprimait
Albert Camus.
Repris par
ce fer de lance

de la psychologie positive 
qu'est le Français
Jacques Lecomte
(1).
Pour qui
chacun(e) d'entre nous
est appelé(e) à construire pas à pas le sens de sa vie.
Un sens unique.
Que nul ne peut imposer à quiconque...


Jacques Lecomte

Deux disciplines se sont particulièrement penchées sur le thème du sens de la vie: la philosophie et la psychologie, cette dernière apportant des pistes de réponse à des interrogations formulées depuis des millénaires par des philosophes.
En particulier, diverses enquêtes aboutissent à la conclusion qu’il y a essentiellement trois grandes façons de donner du sens à sa vie:
. les relations affectives;
. les pensées, croyances et valeurs;
. l’action.

Trouver du sens par nos relations affectives

Un couple de chercheurs en psychologie, Karen L. de Vogler et Peter Ebersole, de l’université d’Etat de Californie, ont mené avec leurs collaborateurs une série de recherches sur les facettes de l’existence qui donnent du sens à celle-ci.
Quel que soit l’âge, ce sont systématiquement les relations interpersonnelles qui arrivent largement en tête.
Les personnes qui jouissent de relations sociales positives
. trouvent leur vie plus satisfaisante,
. sont moins sujettes à la dépression et à d’autres troubles psychologiques,
. présentent un taux de suicide moins élevé que celles qui n’en ont pas,
. supportent mieux les coups du sort tels que le deuil, le chômage et la maladie.

Trouver du sens dans nos convictions et valeurs

Les philosophes de l’Antiquité étaient des maîtres de sagesse pratique bien plus que des théoriciens conceptuels, et leur enseignement visait à aider leurs congénères à s’élever à un niveau de vertu supérieur.
Cette tradition s’est ensuite perdue et la philosophie s’est progressivement réduite à un ensemble de réflexions théoriques.
Aux XIXe et XXe siècles, les courants personnaliste et existentialiste ont réagi face à cette limitation.
Pour leurs partisans, l’enjeu de la philosophie consiste plus à répondre à la question «Comment vivre?» qu’à élaborer des réflexions théoriques.
Pour de nombreuses personnes, c’est la dimension spirituelle qui répond à leur quête de sens.
Ainsi Léon Tolstoï nous a livré un témoignage impressionnant d’une conversion individuelle comme réponse à une quête de sens à l’existence.
A l’âge de cinquante ans, parvenu au faîte de la gloire, il traverse une douloureuse période de désespoir qui le mène au bord du suicide.
Après une quête infructueuse dans les sciences et la philosophie, il se tourne «vers ces immenses masses d’hommes simples, ni savants ni riches» dont la foi simple le bouleverse profondément et l’amène à cette certitude: «Je compris que la foi n’était pas seulement le dévoilement des choses invisibles, ni une révélation (...), ni la relation de l’homme à Dieu (...), mais que la foi était une connaissance du sens de la vie humaine, grâce à laquelle l’homme vivait plutôt que de se tuer.
La foi était la force de la vie.
Tant que l’homme vit, il doit croire à quelque chose.
S’il ne croyait pas qu’il faut vivre pour quelque chose, il ne vivrait pas.
»
L’art est également une façon particulièrement enrichissante de donner du sens à son existence.
Ainsi, pour le sculpteur Auguste Rodin, les œuvres d’art «nous arrachent à l’esclavage de la vie pratique et nous ouvrent le monde enchanté de la contemplation et du rêve. (…)
L’art indique aux hommes leur raison d’être.
Il leur révèle le sens de la vie, il les éclaire sur leur destinée et par conséquent les oriente dans l’existence.
»

Trouver du sens par nos actes

L’engagement dans l’action est la troisième manière de donner du sens à sa vie.
Ainsi, l’activité professionnelle constitue une source importante de sens pour de nombreux individus.
La sociologue Estelle Morin a demandé à des gestionnaires québécois de lui décrire un travail qui a du sens.
Pour la majorité d’entre eux, il s’agit d’une activité productive qui mène à quelque chose, une activité intéressante qui leur fait plaisir, qui les fait se sentir utiles et qui profite aux autres tout en leur permettant de développer leur potentiel.
Inversement, un travail qui n’a pas de sens est fait de manière inefficiente, ne mène nulle part, ne correspond pas à leurs besoins ni à leurs intérêts, ou se réalise dans un milieu qui prône des valeurs qu’ils ne partagent pas.
Même les activités apparemment peu satisfaisantes peuvent être source de sens.
Jesper Isaksen a mené une enquête auprès de trente ouvriers faisant un travail répétitif dans une entreprise de restauration: préparer les plats froids, emballer les couverts, laver les plats.
Deux chiffres sont éloquents: 82 % de ces employés continueraient à travailler même s’ils recevaient le même salaire pour rester à la maison et 75 % trouvent du sens à leur travail, par divers moyens.

La logothérapie, une thérapie fondée sur le sens de la vie

La recherche de sens se situe au cœur d’une forme de psychothérapie appelée la logothérapie, encore trop peu connue en France.
Les réflexions de Viktor Frankl, son créateur, sont le fruit de son expérience de prisonnier durant la Seconde guerre mondiale.
Après avoir survécu à quatre camps de concentration, il est libéré par les Américains en 1945.
Revenu chez lui, il apprend que ses parents, son frère et sa femme ont tous disparu en déportation.
Il écrit alors en neuf jours un ouvrage qui est la clé de voûte de son œuvre et le coup d’envoi de sa méthode psychothérapeutique.
«Il fallait, écrit-il, que nous changions du tout au tout notre attitude à l’égard de la vie.
Il fallait que nous apprenions par nous-mêmes et, de plus, il fallait que nous montrions à ceux qui étaient en proie au désespoir que l’important n’était pas ce que nous attendions de la vie, mais ce que la vie attendait de nous.
Au lieu de se demander si la vie avait un sens, il fallait s’imaginer que c’était la vie qui nous questionnait, journellement et à toute heure.
» (2)(3)

Jacques Lecomte

(1) Psychologue français né en 1955, Jacques Lecomte est un l'un des principaux experts francophones de la psychologie positive. Docteur en psychologie, il est chargé de cours à l’Université Paris Ouest Nanterre La Défense (sciences de l’éducation) et à la Faculté des sciences sociales de l’Institut catholique de Paris. Après avoir été responsable pendant six ans, de 1992 à 1998, de la rubrique «Psychologie» du magazine Sciences humaines, il a soutenu une thèse de psychologie sur la résilience après maltraitance, intitulée Briser le cycle de la violence. Quand d’anciens enfants maltraités deviennent des parents non-maltraitants. Il est le président fondateur de l’Association française et francophone de psychologie positive (APP) qui, depuis octobre 2009, rassemble des enseignants-chercheurs, des praticiens et des acteurs divers, qui se reconnaissent dans cette approche de l'être humain. www.blogger.com/img/blank.gif.
(2) Le message ci-dessus, qui constitue une version raccourcie du livre Donner un sens à sa vie de Jacques Lecomte (Odile Jacob, Paris, 2007) a aimablement été mis à notre disposition par l'auteur, que nous remercions. Les titre et chapeau sont de la rédaction. Le texte original est disponible sur le site de l'intéressé: www.psychologie-positive.net
.
(3) Pour suivre (sous réserve de modifications de dernières minutes): des messages consacrés
. aux indignés,
. à plusieurs aspects de la Communication Non Violente et à l'Université de Paix (d'après Marshall Rosenberg, avec l’aide précieuse de Jean-Marc Priels),
. à l’Approche Centrée sur la Personne (d'après Carl Rogers, avec l’aide précieuse de Jean-Marc Priels),
. à la reliance et à la sociologie existentielle (par Marcel Bolle de Bal),
. au personnalisme (par Vincent Triest,...)...

vendredi 14 octobre 2011

Psycho positive. Enchantement bien ordonné...












Enchantement

bien ordonné
commence-t-il
par soi-même?
Pour le psychologue Mihaly Csikszentmihalyi en tout cas,
le flux de l'expérience optimale (1)
découle du plaisir de l'ordre dans la conscience..

L'expérience optimale (flow en anglais) est un état d'enchantement psychique qui survient dès lors qu'il y a
. correspondance adéquate d'une tâche entre les exigences d'une tâche et les capacités d'un individu,
. définition d'un but clair,
. présence d'une rétroaction immédiate.
La conjonction de ces trois facteurs débouche en effet sur une exaltation qui incite la personne à donner le meilleur... du meilleur d'elle-même.
La concentration touche alors à son paroxysme.
L'... intéressé (!) est à ce point absorbé qu'il ne se perçoit plus comme séparé de son activité; il a l'impression de l'habiter d'une façon spontanée et quasi-automatique.
Dans un tel contexte, même le temps se vit d'une manière inhabituelle: la durée objective cède le pas à un autre rythme, dicté par l'occupation elle-même.
A ce stade, l'attention est complètement absorbée par l'activité, de telle sorte qu'il ne reste plus la moindre énergie psychique pour traiter d'autres informations.
L'action emporte comme par magie toutes distractions et interférences.
A court terme, l'esprit est donc tellement accaparé que l'attention ne peut se porter ni sur le passé, ni sur le futur, ni sur tout autre stimulus non pertinent, en ce compris notre propre soi.
Mais -paradoxe- si l'individu perd provisoirement la conscience de lui-même, c'est pour la retrouver ultérieurement plus forte et plus complexe.
En effet, la personne se rendra compte dans un deuxième temps qu'elle s'est enrichie en termes de savoir et de savoir-faire.

Christophe Engels (d'après Mihaly Csikszentmihalyi)

L'expérience optimale, en bref...

Voici résumées les caractéristiques majeures de la phénoménologie de l'expérience optimale, telle qu'expliquée par le psychologue Mihaly Csikszentmihalyi.
. Défi et habileté
L'expérience optimale, qui se caractérise par un état d'enchantement psychique, découle du plaisir de l'ordre dans la conscience.
Ce plaisir survient dès lors qu'il y a correspondance adéquate entre les exigences d'une tâche et les capacités d'un individu.
. Contrôle de l'action
L'intensité de l'émotion positive est associée au sentiment d'être parfaitement capable de maîtriser pleinement une activité.
. Cible claire et rétroaction
L'accès à la plénitude de l'expérience optimale passe nécessairement par un but clair et par une rétroaction immédiate.
. Motivation
L'exaltation en question incite l'individu à donner le meilleur... du meilleur de soi-même!
. Concentration
La concentration touche alors à son paroxysme.
L'individu est à ce point absorbé qu'il ne se perçoit plus comme séparé de son activité: il a l'impression de l'habiter d'une façon spontanée ou quasi automatique.
. Ici et maintenant
A ce stade, l'attention est complètement absorbée par l'activité, de sorte qu'il ne reste plus la moindre énergie psychique pour traiter d'autres informations.
L'action emporte comme par magie toutes distractions et interférences.
. Conscience de soi
A court terme, l'engagement dans l'activité considérée accapare donc à ce point l'esprit que l'attention ne peut se porter ni sur le passé, ni sur le futur, ni sur tout autre stimulus non pertinent, en ce compris notre propre soi.
Mais -paradoxe- si l'individu perd provisoirement la conscience de lui-même, c'est pour la retrouver ultérieurement plus forte et plus complexe.
En effet, la personne se rendra compte dans un deuxième temps que l'intensité de l'expérience lui a permis de s'enrichir de nouvelles aptitude set de nouvelles réalisations.
. Perception altérée du temps
Le temps se vit d'une manière inhabituelle: la durée objective cède le pas à un autre rythme, dicté par l'activité elle-même.


(1) Csikszentmihalyi Mihaly, Vivre, la psychologie du bonheur, Robert Laffont, Paris, 2004.

lundi 10 octobre 2011

Psycho positive. Pour vivre heureux, vivons actifs !



Le sport produit beaucoup plus de satisfactions
que le loisir passif.
Mais c'est au prix

d'un investissement initial plus important.
Tel est l'avis d'un psychologue passionnant:

Mihaly Csikszentmihalyi.

S'il est un sujet sur lequel on a abondamment disserté, c'est bien celui du bonheur.
Pourtant, le thème est loin d'être épuisé.
La preuve par un Hongrois au nom impossible: Mihaly Csikszentmihalyi.
Professeur au Claremont College de Californie, ce psychologue a écrit un livre qui n'est pas passé inaperçu; «Flow: the psychology of optimal existence», devenu en français «Vivre. La psychologie du bonheur». (1)
L'apport fondamental de cet ouvrage renvoie au concept d'«expérience optimale».
Découlant du plaisir de l'ordre dans la conscience, cet état d'enchantement psychique apparaîtrait dès lors que les exigences d'une activité et les capacités d'un individu se rencontrent adéquatement.
Il se situerait à mi-distance entre l'anxiété et l'ennui, deux états qui, eux, surviennent quand une tâche s'avère, respectivement, trop ou trop peu complexe eu égard aux aptitudes de l'intéressé (2).
Une précision, cependant: ce qui compte, ce n'est pas tant le défi «objectif» que la perception que nous en avons.
Nos possibilités réelles apportent moins que celles que nous pensons avoir.
L'expérience optimale ne se conçoit donc que chez celui qui, en présence d'un challenge ressenti comme ardu, estime disposer des capacités appropriées et décide d'y investir toute son énergie.
«Ces grands moments surviennent quand le corps ou l'esprit sont utilisés jusqu'à leurs limites dans un effort volontaire en vue de réaliser quelque chose de difficile et d'important.» (1)

Plaisir du sport

Csikszentmihalyi propose d'opérer une distinction entre loisirs actifs et loisirs passifs, qui, selon, lui, auraient des effets psychiques différents.
Et de s'appuyer sur l'exemple des adolescents américains qui connaîtraient l'expérience optimale 13% du temps lorsqu'ils regardent la télévision, 34% quand ils pratiquent leur passe-temps favori et 44% dès lors qu'ils sont impliqués dans des sports ou des jeux divers.
«Ainsi, les loisirs actifs (sports et jeux) produisent beaucoup plus d'état d'enchantement élevé qu'un loisir passif (comme regarder la télévision).» (1)
Ce constat semble à la fois compatible et complémentaire avec les théories traditionnelles qui gratifient le sport de maints effets positifs, aussi bien sur l'organisme que sur le mental, et qui font de cette activité un facteur d'harmonie dans la gestion de son propre corps.
«En améliorant les performances musculaires et la coordination des gestes, le sport aide à la constitution d'une meilleure image de soi-même.
Il permet de prendre conscience de ses capacités et de ses limites.
» (3)
Le concept de Csikszentmihalyi permet de mieux comprendre ce processus.
Si l'expérience optimale fait si bon ménage avec le sport, c'est non seulement parce qu'elle rend l'instant présent plus agréable, mais aussi parce qu'elle favorise l'assurance, l'acquisition d'aptitudes et la réalisation de projets signifiants.
«Ceux qui atteignent fréquemment cet état développent un soi plus fort, plein de confiance et efficace parce que leur énergie psychique a été investie avec succès dans la réalisation des objectifs qu'ils avaient l'intention de poursuivre.» (1)
Conséquence: des performances à la hausse, un regain de créativité, un développement des capacités, l'estime de soi et une réduction du stress, le tout débouchant sur une croissance personnelle.

Le sport, oui mais...

Pourquoi, alors, ces mêmes adolescents passent-ils quatre fois plus de temps à regarder la télévision qu'à s'adonner aux loisirs actifs?
Parce qu'ils trouveraient trop contraignants les préparatifs nécessités par ces derniers.
L'obligation de changer de vêtements ou de s'entendre avec les copains requerraient une investissement initial d'énergie jugé trop lourd avant que, finalement, l'occupation ne délivre la récompense d'un délicieux mieux-être.
«Malheureusement, ceux qui sont fatigués, anxieux ou non disciplinés s'adonnent à des activités moins exigeantes ou ne font rien du tout, se privant ainsi d'un plaisir plus grand, de la possibilité d'améliorer leurs aptitudes et de renforcer leur soi.» (1)
Faut-il conclure de ce qui précède que le sport serait exercé uniquement pour l'intense satisfaction qu'il procure?
Non.
En pratique, le phénomène de l'expérience optimale se révélerait beaucoup plus complexe.
Nos objectifs seraient en effet à la fois «intrinsèques» et «extrinsèques» (1).
En d'autres termes, la plupart de nos occupations ne seraient focalisées ni uniquement sur la tâche en elle-même ni seulement sur les résultats que nous en attendons.
Chacun des deux facteurs interviendraient systématiquement.
Reste que les poids respectifs de l'un et de l'autre fluctueraient.
Au gré des activités tout d'abord.
En fonction des individus également.
Car à en croire Csikszentmihalyi, tout le monde ne serait pas égal devant l'expérience optimale.
Certains naîtraient avec une moindre capacité à concentrer leur énergie psychique ou feraient les frais d'une enfance marquée par les influences néfastes du contexte familial.
D'autres butteraient sur l'obstacle d'une conscience de soi déficitaire...
«La personne constamment préoccupée par ce que les autres pensent d'elle (...) ne peut vivre l'enchantement.» (1)
Quant aux derniers, ils seraient handicapés par leur propension à rester excessivement centrés sur eux-mêmes...
«L'égocentrisme de ces gens leur fait évaluer l'information à l'aune de leurs désirs et de leurs besoins.
Chez ces individus, les choses et les personnes n'ont aucune valeur en elles-mêmes.
» (1)
De quoi expliquer, sans doute, que nous ne soyons pas tous attirés par le sport, et encore moins, le cas échéant, par la ou les même(s) discipline(s) sportive(s).

Christophe Engels (d'après Mihaly Csikszentmihalyi)

(1) Csikszentmihalyi Mihaly, Vivre, la psychologie du bonheur, Robert Laffont, Paris, 2004.
(2) Nous y reviendrons dans le prochain message de ce blog.
(3) www.pratique.fr/sante/forme/em24d08.html

vendredi 7 octobre 2011

Psychologie positive. Le flux de la conscience...

Et si le bonheur consistait à se laisser porter par un flux...
Telle est la proposition d'un Américain d'origine hongroise,
Mihaly Csikszentmihalyi.
Relayé ici par Jacques Lecomte (1)...


Jacques Lecomte


Une approche particulièrement originale du bonheur est celle adoptée par Mihaly Csikszentmihalyi, professeur émérite de psychologie à l’Université de Claremont en Californie (2).
Il a mené un vaste programme de recherches sur le flux (flow) ou expérience optimale, termes qui désignent l’état dans lequel se trouve un individu fortement engagé dans une activité pour elle-même.
Pourquoi avoir choisi ce mot?
Tout simplement parce que plusieurs des nombreux sujets qu’il a interviewés lui ont répondu qu’ils se sentaient alors comme portés par un flux.
Par exemple, un compositeur, interrogé sur la façon dont il se sentait lorsqu’il écrivait avec aisance de la musique, a répondu:
«On est dans un état extatique à un tel point qu’on sent comme si on n’existe presque plus.
J’ai éprouvé cela à diverses reprises.
Mes mains semblent détachées de moi-même, et je n’ai pas à intervenir dans ce qui est en train de se passer.
Je suis simplement assis à observer, dans un état d’émerveillement.
Et la musique jaillit d’elle-même, comme un flux.»

Le singulier du pluriel

Les recherches réalisées sur le flux auprès de milliers de personnes à travers le monde ont montré que l’expérience optimale est décrite de la même façon à l’occasion d’activités très différentes, par les femmes et les hommes, les jeunes et les moins jeunes, les gens de différentes conditions sociales et de différentes cultures.
Les sensations éprouvées par un nageur qui traverse la Manche sont à peu près identiques à l’expérience intérieure d’un joueur d’échecs en plein tournoi ou d’un alpiniste qui gravit la montagne ou encore d’un musicien qui compose une œuvre.

Expérience optimale: késako?

Voici quelques caractéristiques de l’expérience optimale notées par Csikszentmihalyi...
. L’expérience optimale se produit généralement quand la personne s’engage dans une activité qui constitue un certain défi en raison de la difficulté à la réaliser.
Cela stimule l’individu et l’incite à se dépasser.
. L’individu est très concentré sur ce qu’il fait car l’expérience est enrichissante en elle-même.
Il n’est pas distrait par d’autres choses.
. La préoccupation de soi disparaît, mais, paradoxalement, le sens du soi se trouve renforcé à la suite de l’expérience optimale.
Par exemple, quand un alpiniste fait une ascension difficile, il est totalement absorbé par cette action, mais est ensuite très satisfait de ce qu’il a réussi.
. La perception de la durée est altérée.
L’individu ne voit pas le temps passer. (3)(4)(5)

Jacques Lecomte

(1) Psychologue français né en 1955, Jacques Lecomte (photo de gauche) est un l'un des principaux experts francophones de la psychologie positive. Docteur en psychologie, il est chargé de cours à l’Université Paris Ouest Nanterre La Défense (sciences de l’éducation) et à la Faculté des sciences sociales de l’Institut catholique de Paris. Après avoir été responsable pendant six ans, de 1992 à 1998, de la rubrique «Psychologie» du magazine Sciences humaines, il a soutenu une thèse de psychologie sur la résilience après maltraitance, intitulée Briser le cycle de la violence. Quand d’anciens enfants maltraités deviennent des parents non-maltraitants. Il est le président fondateur de l’Association française et francophone de psychologie positive (APP) qui, depuis octobre 2009, rassemble des enseignants-chercheurs, des praticiens et des acteurs divers, qui se reconnaissent dans cette approche de l'être humain.
(2) Csikszentmihalyi Mihaly, Vivre, la psychologie du bonheur, Robert Laffont, Paris, 2004. Csikszentmihalyi Mihaly, Mieux vivre en maîtrisant votre énergie psychique, Robert Laffont, Paris, 2005.
(3) On trouvera une description plus détaillée de ce thème dans le chapitre 9 du livre de Jacques Lecomte, Donner un sens à sa vie, Odile Jacob, Paris, 2007.
(4) Le message ci-dessus a aimablement été mis à notre disposition par l'auteur, que nous remercions. Les titre, chapeau et intertitres sont de la rédaction. Le texte original est disponible sur le site de l'intéressé: http://www.psychologie-positive.net/.
(5) Pour suivre (sous réserve de modifications de dernières minutes): des messages consacrés
. à l'expérience optimale de Mihaly Csikszentmihalyi,
. à une approche du sens de la vie par la psychologie positive (par Jacques Lecomte),
. à plusieurs aspects de la Communication Non Violente et à l'Université de Paix (d'après Marshall Rosenberg, avec l’aide précieuse de Jean-Marc Priels,
. à l’Approche Centrée sur la Personne (d'après Carl Rogers, avec l’aide précieuse de Jean-Marc Priels),
. à la reliance et à la sociologie existentielle (par Marcel Bolle de Bal),
. au personnalisme (par Vincent Triest,...)...

mercredi 5 octobre 2011

Actu. Santé et bonheur: Janssen relève le défi.

Au lieu de ne voir
en l’être humain

que des manques
et des défauts,

il faut rappeler
que nous sommes
les détenteurs

d’un potentiel
extrêmement positif.
Tel est le message
du Belge Thierry Janssen.
Pour qui le meilleur moyen
d’être heureux
et de rester en bonne santé
passe par un double défi:
celui
de prendre conscience
de ce potentiel
et de le manifester
à travers nos actions.


Après nous avoir invités à élargir notre conception de la médecine («La Solution intérieure») et de la maladie («La maladie a-t-elle un sens?»), Thierry Janssen (1) poursuit sa réflexion sur le bonheur et la bonne santé.
Soucieux, comme toujours, de l’inscrire dans un contexte scientifique, il s’appuie sur les récents travaux de la biologie, des neurosciences et de la psychologie pour étayer une argumentation selon laquelle la véritable félicité dépend de notre capacité
. à éprouver du plaisir,
. à nous engager dans des expériences enrichissantes et à donner un sens à notre existence.
«Chacun devrait tenter de trouver la proportion idéale entre ces différents ingrédients, explique Janssen.
Les recherches sur le bonheur montrent que notre vie n’est réellement heureuse que si nous pouvons actualiser le meilleur de nous-même, en lien avec les autres.
Les émotions agréables qui naissent de cet épanouissement vertueux participent à notre bien-être physique, psychique et social.
Elles sont un gage de bonne santé individuelle et collective.»

Livre de vie

Le «défi positif» (2) se veut «un livre de vie profondément humaniste».
Thierry Janssen y jongle avec les thèmes de l’optimisme et de l’altruisme, de l’intégrité et de la créativité, du discernement et de l’humilité, de l’humour et de la gratitude.
Dans un langage accessible à tous, il parle d'une existence à la fois éthique et esthétique.
Ce que les philosophes de l’Antiquité appelaient une «bonne vie»...

(1) Chirurgien devenu psychothérapeute, Thierry Janssen est l’auteur de six livres traduits dans plusieurs langues. Le «Défi positif» est le dernier opus d’une trilogie commencée avec «La Solution intérieure» et «La maladie a-t-elle un sens?». www.thierryjanssen.com.
(2) Janssen Thierry, Le défi positif, Les liens qui libèrent, Paris, 2011.

lundi 3 octobre 2011

Psychologie positive. L'équation du bonheur.


Le bonheur
s'apparente-t-il
au plaisir?
Ou bien renvoie-t-il
aux vertus
de l'accomplissement?
Les deux, mon général!
Telle est en tout cas
la réponse apportée
par la psychologie positive.
Comme nous l'explique
Jacques Lecomte...
(1)



Jacques Lecomte

Les philosophes grecs se fixaient pour tâche d’élaborer une sagesse permettant d’accéder au bonheur.
Mais un désaccord profond existait alors entre les partisans de deux conceptions très différentes du bonheur: les approches «hédoniste» et «eudémoniste»...

Aaah! Le plaisir...

Les philosophes «hédoniste» posent le plaisir comme bien suprême.
Pour eux, le but de la vie consiste à éprouver la quantité maximale de plaisir, et le bonheur est la somme des moments hédonistes d’une personne.

Les vertus de l'accomplissement

De grands noms de la philosophie grecque, en particulier Aristote, Platon et Socrate, se sont vigoureusement opposés aux hédonistes, en prônant un idéal «eudémoniste» de l’existence.
Le principal représentant de ce courant est Aristote, pour qui «le bonheur est l’activité de l’âme dirigée par la vertu» (2).
Le bonheur implique donc «une vertu parfaite et une existence accomplie».
Aristote ne rejette pas pour autant le plaisir, mais considère, contrairement aux hédonistes, que celui-ci n’est pas le bien en soi, mais plutôt une conséquence du bien.
Divers philosophes contemporains se réclament de cette vision du bonheur, qui est assez proche du concept actuel de sens de la vie.
C’est notamment le cas de Paul Ricœur qui qualifie de visée éthique «la visée de la "vie bonne" avec et pour autrui dans des institutions justes» (3).

Au nom de la justice...

Par ailleurs, que nous dit la Bible sur le bonheur? (4)
Le mot n’existe pas en hébreu biblique et est rare dans le grec biblique.
La Bible préfère parler de «vie» ou de «joie».
Dans le Nouveau Testament, l’adjectif grec makarios est présent à plusieurs reprises en particulier dans les Béatitudes des Evangiles:
«Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice: ils seront rassasiés (…)
Heureux ceux qui font œuvre de paix: ils seront appelés fils de Dieu…».
La Bible ne donne donc pas de conseil pour découvrir le bonheur, mais décrit plutôt une situation déjà existante, résultat d’une conduite conforme à la justice.

Sens de la vie + bien-être: l'équation psy

Les recherches psychologiques actuelles, sur la base d’enquêtes réalisées auprès de larges populations, éclairent fortement les débats de la philosophie antique en montrant que le bien-être et le sens de la vie constituent deux facettes à la fois proches et différentes de l’expérience humaine.
En effet,
. certains aspects de la vie relèvent essentiellement du sens de la vie et peu du bien-être: ce sont les valeurs et croyances, les projets de vie, l’engagement dans l’action;
. d’autres, à l’inverse, relèvent essentiellement du bien-être et peu du sens de la vie: ce sont les émotions positives, les loisirs;
. d’autres encore relèvent à la fois du sens de la vie et du bien-être: ce sont les relations interpersonnelles.
Plutôt que d’assimiler bien-être et bonheur comme le font les philosophes hédonistes, en évacuant toute référence au sens de la vie, il semble donc plus pertinent de considérer que le bonheur résulte de la présence conjointe du bien-être (facette émotionnelle à court terme) et du sens (facette cognitive à long terme) (5)(6)(7).

Jacques Lecomte

(1) Psychologue français né en 1955, Jacques Lecomte est un l'un des principaux experts francophones de la psychologie positive. Docteur en psychologie, il est chargé de cours à l’Université Paris Ouest Nanterre La Défense (sciences de l’éducation) et à la Faculté des sciences sociales de l’Institut catholique de Paris. Après avoir été responsable pendant six ans, de 1992 à 1998, de la rubrique «Psychologie» du magazine Sciences humaines, il a soutenu une thèse de psychologie sur la résilience après maltraitance, intitulée Briser le cycle de la violence. Quand d’anciens enfants maltraités deviennent des parents non-maltraitants. Il est le président fondateur de l’Association française et francophone de psychologie positive (APP) qui, depuis octobre 2009, rassemble des enseignants-chercheurs, des praticiens et des acteurs divers, qui se reconnaissent dans cette approche de l'être humain.
(2) Aristote, Ethique de Nicomaque, Garnier-Flammarion, Paris, 1965, p. 31.
(3) Ricœur P., Soi-même comme un autre, Seuil, Paris, 1990, p. 202.
(4) Briend J., Le bonheur dans la Bible, in H.-J. Gagey (dir.) Le bonheur, deuxième cycle de théologie biblique et systématique, Beauchesne, Paris, 1996, p. 53-90.
(5) On trouvera une description plus détaillée de ce thème dans le chapitre 9 du livre de Jacques Lecomte, Donner un sens à sa vie, Odile Jacob, Paris, 2007.(6) Le message ci-dessus a aimablement été mis à notre disposition par l'auteur, que nous remercions. Les titre, chapeau et intertitres sont de la rédaction. Le texte original est disponible sur le site de l'intéressé: www.psychologie-positive.net/.
(7) Pour suivre (sous réserve de modifications de dernières minutes): des messages consacrés
. à la suite de cette approche du bonheur par la psychologie positive (par Jacques Lecomte),
. à une approche du sens de la vie par la psychologie positive (par Jacques Lecomte),
. à plusieurs aspects de la Communication Non Violente et à l'Université de Paix (d'après Marshall Rosenberg, avec l’aide précieuse de Jean-Marc Priels,
. à l’Approche Centrée sur la Personne (d'après Carl Rogers, avec l’aide précieuse de Jean-Marc Priels),
. à la reliance et à la sociologie existentielle (par Marcel Bolle de Bal),
. au personnalisme (par Vincent Triest,...)...