
Lutter contre les vents mauvais
de l'argent roi
et de ces modalités du tout à l'ego
que sont l'outrance égoïste,
l'alibi égocentrique
ou le faux-semblant égotiste.
à déjouer les pièges de l'illusion.
Et, le cas échéant,
à assumer ceux de la désillusion...
Quels
sont les défis à relever par notre société contemporaine?
Et
comment y faire face?
Des questions
qui viennent d’être posées à un panel de citoyens.
Et qui
sous-tendent une enquête (1) (belge) sur laquelle il semble particulièrement
bienvenu de s'appuyer à l’heure d’aborder la nouvelle année.
Une
façon d’ajouter de la substance aux vœux que je vous présente pour 2014.
Chaleureusement.
Outrances du matérialisme:
boulevard à deux
bandes
La
crise n’en est pas une.
Nous
sommes bel et bien en présence d’un dysfonctionnement à la fois écologique et économico-social.
A qui
la faute?
. Aux
milieux financiers certes dans la mesure où «des acteurs dominants maintiennent d’autres groupes dans la
vulnérabilité.»
. Aux
responsables politiques sans doute puisque «les richesses ne sont pas distribuées équitablement.»
. Mais
aussi à nous-mêmes.
Car «chacun veut garder ses
privilèges, sans penser aux autres, alors que beaucoup se battent pour
survivre.»
D’un
côté, donc, une récession économique qui confine à l’impasse structurelle.
De l’autre,
un étiolement de nos valeurs humaines, familiales et même religieuses.
Qui
ouvre un boulevard au renforcement de la prédominance de celles portées par notre société
de consommation.
Un
boulevard à deux bandes…
. A l’échelon
individuel d’une part, «les gens
sont obnubilés par ce qu’ils possèdent et ne s’attardent plus sur ce qu’ils
sont ou ce en quoi ils ont foi.
Du fait du capitalisme, les biens matériels sont
érigés au rang de valeur.»
. Au
niveau collectif d’autre part, on croit pouvoir constater «l’effondrement de la solidarité, l’évolution inquiétante de la
culture actuelle vers une culture de la cupidité.
Aujourd’hui, la société n’est que concurrence. (...)
Pourtant, ce n’est pas la cupidité, mais bien la
prospérité qui est une condition au bonheur.
Et une société égalitaire pour tous y contribue.»
Excès de l’individualisme:
effet pervers
Une
société égalitaire?
Un objectif
dont le principe de la sécurité sociale tend sans doute à rapprocher.
Aussi
précieux soit-il, ce système n’en dévoile pas moins un effet pervers.
Au
quotidien, il sert en effet d’alibi à l’indifférence égocentrique et aux
agissements égoïstes.
Si bien que «de plus en plus de
personnes ont l’impression qu’au final, chacun se retrouve seul face à ses
problèmes.»
Car
l’individualisme philosophique s’est vertigineusement altéré.
Le
but, désormais, est moins d’agir par que pour soi-même.
A tel
point que la responsabilité personnelle tombe souvent dans le travers d’un double dérapage.
. Celui du chacun pour soi tout d’abord.
. Celui
de la tyrannie de l’excellence ensuite.
Celle-là même qui s'avère si fréquemment avoir bon dos pour justifier l'injustifiable.
Derrière les «restructurations», l'opportunisme, parfois, voire le règlement de compte.
Derrière les mesures d'austérité, une nécessité économique, peut-être, mais aussi, trop souvent, un certain état d'esprit.
Ressenti comme paternaliste.
Et accusateur...
«Si vous êtes pauvres, c’est considéré comme
si c’était votre propre faute.»
Excès?
Abus?
Outrance?
Indubitablement.
Sans
pour autant qu’on se sente en mesure de desserrer le frein.
«Je vois le manque de souplesse de l’Ouest et
un certain cynisme (…): nous sommes rigides et difficiles à manier.»
Faut-il
aller jusqu’à envisager de réinterpréter les acquis sociaux?
Oui.
A
condition qu’il ne soit pas question de les déconstruire.
A condition,
donc, de faire appel à toutes les ressources d’une indispensable créativité.
A
condition, aussi, de ne jamais perdre de vue le «besoin de repenser la société.»
Un
challenge difficile s’il en est.
Car au
contraire des jeunes sociétés qui ont une propension à aller de l’avant, des
sociétés aussi anciennes que la nôtre ont une fâcheuse tendance à se tenir sur
la défensive.
Combattre les outrances du matérialisme:
esprit,
es-tu là ?
A
l’heure où les aspirations et désirs individuels paraissent de plus en plus
avoir pris le pas sur l’intérêt public, le besoin se fait tout particulièrement
sentir de porter attention à la spiritualité, fût-elle laïque, et à la
recherche de sens.
«Le défi de la société au sens large est de
ne pas oublier l’humain.
Un être humain est à la fois un corps physique et
spirituel.»
Il s’agit
donc de combattre l’omnipotence du matérialisme et de l’individualisme.
Mais
aussi de mettre à mal les prétentions à l’exclusivité du rationalisme.
Sans compter le «court-termisme»…
«Nous nous concentrons sur les plaisirs à
court terme et oublions le long terme.»
Non,
donc, à l’obsession de l’immédiateté!
Non à
la dictature de l’urgence!
Non
aussi -on y revient- au paternalisme!
Notamment
dans le secteur de l’ «assistance».
«Ce dont les gens en recherche ont besoin,
c’est d’un contexte dans lequel ils peuvent douter, chercher ensemble et
trouver un soutien.»
Les
médias, en la matière, devraient jouer un rôle.
Ce qu’ils
ne font pas.
Ou pas suffisamment.
Eux
qui peuvent par exemple «véhiculer
des images fausses et produire en aval du racisme et de la discrimination.»
Eux
qui tendent à faire leurs choux gras des «opinions extrêmes.»
Eux qui, pense-t-on,
renoncent à la mission qu’ils devraient s’assigner dans une société
multiculturelle, à savoir «présenter
une opposition au populisme et à l’idéologie d’extrême-droite.»
Combattre les excès de l’individualisme:
des
valeurs à promouvoir
L’individualisme
a un prix.
Celui du déficit de connaissance.
Celui
de l’absence de dialogue.
Celui de
l’intolérance.
Celui, même, du malentendu.
Il s’agit
donc de proposer des solutions pour combler ces manquements.
- Première
d’entre elles: un retour à la connaissance et au dialogue, comme
facilitateurs de compréhension mutuelle.
«La connaissance de l’autre par des sources
d’information médiatiques d’une part, et le dialogue avec l’autre en personne
d’autre part, apparaissent comme différentes façons de (…) favoriser la compréhension mutuelle.»
- Deuxième
solution suggérée: un respect qui dépasse la simple tolérance.
Celui-là se distinguant de celle-ci par le fait qu’il englobe la compréhension de
l’autre.
Et
plus si affinités…
«Certains
donnent une connotation encore plus active à la notion de respect en promouvant
non seulement l’acceptation mais aussi la valorisation de la différence et la prise de mesures pour favoriser son expression.»
- Troisième
solution: la citoyenneté, envisagée, selon les cas, comme
. «contribution positive et consciente de
chacun à la société (…) non plus
comme un choix, mais comme un devoir»,
. «établissement d’une relation
réciproque entre la société et l’individu»,
. «contribution des individus et
des communautés au bien-être général, capable de rejaillir à son tour sur le
bien-être personnel»,
. «effort devant être soutenu à long terme pour
en cueillir les fruits»,
. «gestion équitable de la liberté de chacun»,
. «devoir de contribuer à la société avec les
talents et les idées que l’on possède.»
- Quatrième
solution, enfin: la responsabilisation personnelle et collective.
Chacun pour tous, tous pour chacun
Faut-il,
au lieu de séparer, faciliter l’entente?
Oui, ici encore.
Mais d'une certaine façon...
«La plupart des répondants apprécient la
promotion de "l’unité dans la différence" et, par là, (…) une tolérance davantage active.»
Reste
que la volonté de dialogue et de collaboration n’est pas nécessairement motivée
en premier lieu par une simple aspiration à se connaître pour mieux se
comprendre et mieux vivre ensemble.
Elle peut
émaner plutôt «d’une préoccupation
partagée (…) de pouvoir intervenir
plus efficacement dans ces évolutions jugées inquiétantes.»
Une
motivation qui n’est pas à l’abri d’un danger.
Celui de
la récupération purement individualiste.
Dont il convient de se prémunir.
Par exemple en promouvant «l’esprit critique dans l’éducation, afin d’être à même d’interpréter
les discours démagogiques.»
Deux mille quatorze fois plutôt qu'une... (2)
Christophe Engels
(1) Face2faith,
Convictions et croyances face aux défis sociétaux. Une campagne d’écoute en Belgique,
2013, http://www.face2faith.eu/PDF/F2F_campagne_ecoute_FR.pdf.
Tous les extraits repris dans ce message sont tirés des pages 118 à 140 (Chapitre
3. La perception des défis sociétaux) et 141 à 168 (Chapitre 4. Comment relever
les défis sociétaux: suggestions et idéaux des répondants).
(2) Pour suivre (sous réserve de changement de dernière minute): la suite d'une
série de messages consacrés à une réflexion approfondie sur les courants de pensée et modes de voie émergents.
«Il y a là la peinture des oiseaux, l'envergure,
qui luttent contre le vent.
Il y a là les bordures, les distances, ton allure,
quand tu marches juste devant.
Il y a là les fissures, fermées les serrures,
comme envolés les cerfs-volants.
Il y a là la littérature, le manque d'élan,
l'inertie, le mouvement.
Parfois on regarde les choses telles qu'elles sont
en se demandant "pourquoi?"...
Parfois on les regarde telles qu'elles pourraient être
en se disant "pourquoi pas?"...
Il y a là là là, si l'on prenait le temps,
si l'on prenait le temps.
Il y a là la littérature, le manque d'élan,
l'inertie, le mouvement.
Parfois on regarde les choses telles qu'elles sont
en se demandant "pourquoi?"...
Parfois on les regarde telles qu'elles pourraient être
en se disant "pourquoi pas?"...
Il y a là les mystères, le silence ou la mer
qui luttent contre le temps.
Il y a là les bordures, les distances, ton allure,
quand tu marches juste devant.
Il y a là les murmures, un soupir, l'aventure,
comme envolés les cerfs-volants.
Il y a là la littérature, le manque d'élan,
l'inertie, le mouvement.
Parfois on regarde les choses telles qu'elles sont
en se demandant "pourquoi?"...
Parfois on les regarde, telles qu'elles pourraient être,
en se disant "pourquoi pas?"...
Parfois on regarde les choses telles qu'elles sont
en se demandant "pourquoi?"...
Parfois on les regarde telles qu'elles pourraient être
en se disant "pourquoi pas?»... (1)
(1) Paradis Vanessa (interprète) et Roussel Gaëtan (auteur), Il y a, Barclay, 2009.