mardi 13 juillet 2010

Economie sociale. Business as unusual.

Ni capitaliste ni publique,
l’économie sociale ? (1)
Mais encore…
En Belgique francophone,

ce concept englobe
associations et sociétés.
Explications de l’économiste

Sybille Mertens (2)

En Belgique francophone (3), le concept d'économie sociale recouvre une vaste diversité d'organisations. On peut néanmoins les regrouper en deux grandes catégories: celle des associations (associations de fait, associations sans but lucratif, fondations ou mutualités) et celle des sociétés (qu’elles soient coopératives ou à finalité sociale)...

Associations de… bienfaiteurs !

L'association est souvent définie comme un contrat par lequel plusieurs personnes décident de s'unir en vue de poursuivre un but commun «non lucratif».
De facto, on en retrouve quatre types...
. L'association de fait.
Les associations n'ont pas besoin d'acquérir la personnalité juridique pour exister. On les dénomme alors associations de fait.
. L'association sans but lucratif.
La forme juridique de l'association sans but lucratif semble taillée sur mesure pour respecter les critères éthiques de la définition de l'économie sociale. En effet, la loi prévoit de réserver un droit de vote égalitaire à tous les membres de l’a.s.b.l.
. La fondation.
Autre figure juridique du type associatif : la fondation.
«Les fondations sont des organisations sans but lucratif qui disposent d'une source de revenus autonome et fiable, provenant (généralement mais pas exclusivement) d'une donation ou d'un capital, explique-t-on du côté de l’European Foundation Centre. Elles poursuivent des objectifs éducatifs, culturels, religieux, sociaux ou autres en octroyant des aides à des associations, des institutions caritatives, des établissements d'enseignement, des individus ou encore en mettant elles-mêmes des programmes sur pied.» (4)
Une fondation est une institution créée par une ou plusieurs personnes, physique(s) ou morale(s), afin d'affecter tout ou une partie d'un patrimoine à la réalisation d'un but désintéressé déterminé.
Cette forme juridique a été adoptée pour permettre aux particuliers de bénéficier de la générosité d'un tiers.
La loi précise que «la fondation ne peut procurer un gain matériel, ni aux fondateurs, ni aux administrateurs, ni à toute autre personne, sauf s’il s’agit de la réalisation du but désintéressé.» (5)
. La mutualité.
Les mutualités sont définies comme «des associations de personnes physiques qui, dans un esprit de prévoyance, d'assistance mutuelle et de solidarité, ont pour but de promouvoir le bien-être physique, psychique et social.» (6)
La mutualité a une finalité de services aux membres: elle consiste notamment à «gérer une couverture sociale contre les risques liés à l'état de santé, financée de manière solidaire et à constituer un mouvement social pour promouvoir la santé des membres par des actions internes et par des revendications de politique de santé.» (7)
La loi lui interdit d'exercer son activité dans un but lucratif.

Sociétés de… deuxième personne !

Comment définir la société à laquelle nous faisons référence ici?
Il s'agit d'une entité économique qui «a pour but de procurer aux associés un bénéfice patrimonial direct ou indirect à moins que, dans les cas prévus par la loi, l'acte de société n'en dispose autrement.» (8)
Elle peut se décliner de deux façons: coopérative ou à finalité sociale.
. La société coopérative.
L'article 350 du code des sociétés définit la société coopérative comme étant celle qui se compose d'associés dont le nombre et les apports sont variables.
Cette forme de société présente deux caractéristiques essentielles...
Premièrement, la coopérative est une société ouverte. Le nombre de ses associés et leurs apports peuvent varier.
Deuxièmement, les parts des sociétés coopératives ne peuvent être cédées ou transmises qu'aux personnes nommément désignées dans les statuts ou faisant partie de l'une des catégories que ceux-ci déterminent et qui remplissent les conditions légales ou statutaires pour devenir associés.
. La société à finalité sociale.
Elle a été créée par le législateur belge afin de combler une lacune. En effet, la loi du 27 juin 1921 définit l'association sans but lucratif (a.s.b.l.) en posant comme condition qu'elle ne se livre pas à des opérations industrielles ou commerciales.
Jusqu'à présent, la conception dominante en matières de doctrine et de jurisprudence était d'autoriser une activité commerciale aux a.s.b.l. seulement dans la mesure où elle était nécessaire à une activité non-commerciale.
Or, comme le fait remarquer Coipel, depuis quelques années, on a vu se développer des entreprises qui ont une activité de type marchand, qui veulent être gérées avec les méthodes et l'efficacité des entreprises classiques mais qui entendent que les profits éventuellement dégagés ne soient pas destinés - du moins pas principalement - à enrichir leurs promoteurs (9).
Elles ne pouvaient prétendre ni au statut d'a.s.b.l. (en raison de leurs activités commerciales), ni au statut de société (en raison de leur absence de but principal de lucre).
Les exigences légales de la qualité «à finalité sociale»? Elle peuvent être ramenées aux huit points suivants...
- pas de but de lucre mais un avantage direct ou indirect limité pour les associés;
- l'affirmation d'un but social, externe ou interne;
- une politique d'affectation des profits conforme au but social;
- un processus de gestion démocratique (un dixième des voix maximum);
- un taux d'intérêt de 6% maximum sur les parts du capital social;
- l'obligation de mentionner dans un rapport annuel la manière dont la société a veillé à poursuivre son but;
- la possibilité accordée aux membres du personnel d'acquérir la qualité d'associés;
- l'affectation du surplus au but social en cas de liquidation. (10)(11)(12)

(A suivre)

Christophe Engels
(D’après Mertens Sybille, Définir l'économie sociale, Les cahiers de la Chaire Cera, volume 2, Université de Liège, 2007.
Cfr. aussi notre rubrique Un bon conseil...: Centre d'Economie Sociale (ULg).)

(1) Voir le précédent message de ce blog : «Economie sociale. Rencontre du troisième type. »
(2) Sybille Mertens est directrice de recherches au Centre d'Economie Sociale et coordinatrice de la Chaire Cera, à l'Université de Liège.
(3) Les lecteurs non-belges de ce blog voudront bien excuser la tonalité (exceptionnellement) «noire-jaune-rouge» de ce message, qui plus est assez technique.
(4) Cité par Develtere, P., Van Ootegem, L., Raeymaekers, P. [2004], Les fondations en Belgique – Profil du secteur, Fondation Roi Baudouin, Bruxelles, p. 2; cité dans Mertens Sybille, Définir l'économie sociale, Les cahiers de la Chaire Cera, volume.2, ULg, 2007, p.32.
(5) Art.27, loi du 27 juin 1921; cité dans Mertens Sybille, ibidem, page 32.
(6) Art.2.§ 1° de la loi belge du 6 août 1990 relative aux mutualités et aux unions nationales de mutualités; cité dans Mertens Sybille, ibidem, p.32.
(7) Feltesse, P., Les mutualités en Belgique, entre un système public pur d'assurance maladie et un système privé d'économie sociale, Annales de l'économie publique, sociale et coopérative, volume 63, n°4, p. 669 ; cité dans Mertens Sybille, ibidem, p.32.
(8) Art. 1832 du code civil belge des sociétés; cité dans Mertens Sybille, ibidem, p.33.
(9) Coipel, M., Le casse-tête de la définition légale de l'ASBL, in Non Marchand, n°1998/1, p. 49; cité dans Mertens Sybille, ibidem, p.36.
(10) Source: sur base de l'article 661 du code des sociétés; cité dans Mertens Sybille, ibidem, p.36.
(11) ) Pour suivre:
. Economie sociale. Du social au sociétal.
. ...
(12) En cas de difficulté technique, vos commentaires peuvent également être envoyés (avec ou sans signature nominale et/ou adresse électronique) à engels_chr@yahoo.fr. Ils seront publiés sur ce blog dès que possible.

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