mardi 24 juin 2014

Courants de pensée et modes de vie émergents (37) «Engagement phi». Le retour de la philo momie



 

Pour contester 
l'individualisme 
marchand, 
le développement 
personnel 
a fait chou blanc.
Place, donc, 
à une alternative.
Celle de la philo.
Une «philo.2».
Une «philoso...vie».
Une philosophie de
l'épanouissement 
personnel.


L'individualisme marchand.
Un état d'esprit et un mode de vie dont la crise du moment contribue chaque jour davantage à élargir le cercle des détracteurs.
De quoi étayer la thèse de ceux qui, comme le regretté anthropologue culturel Thierry Verhelst, croient déceler dans nos sociétés les prémices d’un retournement intérieur, d’une «révolution» sans «Grand Soir», d’un quadruple changement: culturel, spirituel, économique et social (1).
De quoi, aussi, renforcer le poids de ceux qui ont pour projet de faire la jonction entre la vague un peu surfaite du «développement personnel» et l’authenticité d’une philosophie digne de ce nom.
Parmi eux, le plus qu’accessible Michel Lacroix (2).  
Qui défend l’idée que la vague en question aurait tout à gagner d’un élargissement  en une «philosophie de la réalisation de soi».  
Histoire de puiser «dans l’héritage des philosophes et des écrivains qui, depuis deux  siècles, ont réfléchi au problème de l’existence.» (3)

Développement: plus vrai que... culture!

«Au tournant des années 1960, la réalisation de soi a pris (...) une nouvelle orientation, une orientation qui s'est traduite tout d'abord par l'adoption d'une nouvelle appellation, raconte le philosophe français.
On s'est mis à parler de "développement personnel".» (4)
Rapidement, d'innombrables techniques allaient voir le jour. 
Des techniques contre-nature?
Oui et non.
Car autant elles ne se fixeraient pas d'autres objectifs que d'
«actualiser le potentiel que l'on porte en soi» et de «mobiliser des ressources propres», autant elles n'auraient de cesse de flirter avec l'excès (donc d'y tomber plus souvent qu'à leur tour) en érigeant en dogme la responsabilité personnelle illimitée.
Des techniques contre-culture?
Oui, incontestablement... 
«Les pédagogues, sociologues, psychologues, philosophes, écrivains qui se pressaient dans ce think tank des sciences humaines (...) brandissaient le drapeau de la contre- culture.» (5)

Les trois bouc-émissaires de la contre-culture

La contre-culture, explique encore l'auteur de «Se réaliser. Petite philosophie de l’épanouissement personnel», était d'abord une déclaration de guerre contre la culture classique, dite «bourgeoise» et appréhendée comme capitaliste, élitiste, aliénante et écrasante. (6)
«En matière littéraire, artistique, philosophique, insistait-elle, tout le monde a le droit de s'exprimer, tout le monde peut créer.
"Nous sommes tous des créateurs": tel était le slogan.
Avec ce corollaire égalitariste: "
tout se vaut".» (7)
La contre-culture visait aussi une seconde cible: la raison.
Accusée d'être déshumanisante, réductionniste et séparatiste.
«Contre l'objectivité scientifique, la contre-culture défendait les droits de la subjectivité, du ressenti.» (8)
Enfin, la troisième «tête de Turc» renvoyait aux religions de la transcendance.
«A ce dualisme, la contre-culture opposait une approche moniste.
Elle décrivait le cosmos comme un tout, une unité, un "holos".
Cette vision holistique du monde excluait toute séparation entre le divin et l'humain.» (9)

Victimes collatérales

Reste que les premières victimes collatérales du développement personnel furent nos écrivains, philosophes et autres artistes qui, jusque-là, avaient mené la réflexion sur la réalisation de soi.      
«La cible que visaient les partisans de la contre-culture n'était pas tant (...) la culture en général que la culture occidentale.» (10)
L'heure de gloire de l'Orient avait sonné.
Au point de faire passer nos propres trésors par pertes et profits.
Une erreur flagrante, sans doute.
Qui, à tout le moins,  rappelle que ce qui excessif est insignifiant...
D'autant que «Si riches soient-elles, les sagesses orientales (...) restaient tributaires des civilisations au sein desquelles elles étaient nées, c'est-à-dire de civilisations où, d'une manière générale, l'individu n'était pas considéré comme la valeur suprême.» (11) 
Et l’auteur de renvoyer tout particulièrement à deux noms...   
. Celui d’Abraham Maslow, qui considère que la société doit offrir à tous ses  membres «la possibilité de se réaliser» (12)  
. Et surtout celui d’Emmanuel Mounier, qui appelle de se vœux une «civilisation personnaliste (...) dont les structures et l’esprit sont orientés vers l’accomplissement comme personne de chacun des individus qui la composent(13)(14)  

(A suivre)

Christophe Engels


(1) Cfr. Verhelst Thierry, Des racines pour l’avenir. Cultures et spiritualités dans un monde en feu, L’Harmattan, Paris, 2008.
(2) Lacroix Michel, Se réaliser. Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Robert Laffont, coll. Réponses, Paris, 2008.
(3) Engels Christophe, Le grand retour du personnalisme?, in Perso. Regards personnalistes, n°16, octobre 2008, p.3. 
(4) Lacroix Michel, ibidem, p.152.
(5) Lacroix Michel, ibidem, p.153.
(6) Cfr. Lacroix Michel, ibidem, pp.152-154.
(7) Lacroix Michel, ibidem, p.155.
(8) Lacroix Michel, ibidem, p.155.
(9) Lacroix Michel, ibidem, 2008, p.156.
(10) Lacroix Michel, ibidem, 2008, p.161
(11) Lacroix Michel, ibidem, 2008, p.163.
(12) Maslow Abraham, The Farther Reaches of Human Nature, Penguin book, New York, 1994.
(13) Mounier Emmanuel, Manifeste au service du personnalisme, in Œuvres, tome I, Le Seuil, Paris, 1961.
(14) Pour suivre (sous réserve de changement de dernière minute):  
. la suite d'une série de messages consacrés à une réflexion approfondie sur les courants de pensée et modes de vie émergents,
. des analyses sur la social-démocratie, l'écologie politique (après le libéralisme ainsi que l'humanisme démocratique qui, pour rappel, ont d'ores et déjà été abordés) et l'immigration.


1 commentaire:

  1. Belgique

    Financité organise prochainement: "L'épargne en jeu".
    Un Week-end résidentiel les 5 et 6 juillet 2014
    Au Moulin de Hosdent à Braives (Rue du Moulin 50 à 4261 LATINNE)

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    Les Rencontres Financité sont à la fois un point de conclusion de 3 mois de débat, rencontres, animations partout à Bruxelles et en Wallonie autour de l'épargne et un point de départ pour porter des recommandations politiques.

    Pourquoi épargne?
    Avoir de l’argent de côté semble indispensable pour se prémunir contre d’éventuelles déconvenues, prévoir des achats futurs et offrir des perspectives d'avenir.
    Chaque trimestre, les chiffres de épargne battent de nouveaux records. 250 milliards d'euros étaient déposés sur des comptes.
    En même temps, plus d’un quart des Belges affirme ne pas pouvoir faire face à une dépense imprévue!
    Une partie importante de la population risque donc d'être amenée à s'endetter, voire à se surendetter face à une difficulté.Il est temps de se demander quelle place a l'épargne dans notre société? Faut-il épargner? Faut-il l'encourager? Qui doit épargner? Comment? Doit-elle être collective ou individuelle?...

    https://fr-mg42.mail.yahoo.com/neo/launch?.rand=e2tuges6g41gi#1869658585

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