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vendredi 11 mars 2011

Monnaie sociale. Passe-moi le… SEL !








LETS comme
Local Exchange
and Trading Systems.
SEL comme
Systèmes
d’Echange Local.
Deux spécialistes
du sujet,
Jérôme Blanc
(1) (photo ci-dessus) et Cyrille Ferraton (2),
nous expliquent
ce qui se cache
derrière ces mystérieux acronymes.
Qui désignent
une forme particulière d’économie solidaire.
Et entendent
réorganiser les échanges au niveau local.
Cher voisin, passe-moi le SEL!


Jérôme Blanc et Cyrille Ferraton

Les premières associations contemporaines par le biais desquelles des personnes échangent services et biens au moyen d’une comptabilité interne tenue en une monnaie propre ont émergé formellement en 1983, après plusieurs années de gestation et de tâtonnements, sous la forme des LETS (Local Exchange and Trading Systems) au Canada.
Leur émergence précède de quelques années les premiers travaux sur l’économie solidaire. (3)
Progressivement, des organisations de ce type ont été mises en place dans plusieurs pays, presque uniquement occidentaux.
Au début de l’année 2.000, 22 pays étaient concernés.
On comptait entre 2.000 et 2.500 associations rassemblant probablement autour de 250.000 membres.
Les déclinaisons françaises des LETS, les SEL (Systèmes d’Echange Local), sont apparus en 1994. (4)
Ces organisations appartiennent à la catégorie plus large du localisme monétaire, forme caractérisée par l’organisation d’une localisation des échanges au sein d’un espace spécifique au moyen d’une organisation monétaire adaptée (5).

Un seul lit pour plusieurs rêves

En France, un des objectifs revendiqués par les principaux animateurs est l’organisation d’une réciprocité entre les membres des SEL et, au-delà, l’instauration d’un espace au sein duquel «l’économique» serait au service de valeurs alternatives comme l’égalité entre les savoir-faire intellectuels et manuels, la réciprocité par le don ou la démocratie locale.
En ce sens, certains parlent de «monnaies sociales» pour qualifier de façon générique les LETS et les systèmes voisins. (6)
Ce terme apparaît comme le moins insatisfaisant des termes proposés et en vigueur ça et là compte tenu de la diversité des opinions et des perceptions, par les fondateurs eux-mêmes, de ces systèmes. (7)(8)

(A suivre)

Cyrille Ferraton et Jérôme Blanc

(1) Jérôme Blanc est docteur en sciences économiques (1998) et maître de conférences en sciences économiques à l’Université Lumière Lyon 2 (depuis 1999).
Ses travaux portent sur la monnaie, qu’il aborde principalement du point de vue des pratiques et de l’histoire des idées.
S’intéressant à la pluralité des monnaies, il a publié Les monnaies parallèles. Unité et diversité du fait monétaire (L’Harmattan, Paris, 2000). Il travaille en particulier sur un aspect de la pluralité monétaire, à savoir les monnaies sociales, locales ou complémentaires. À ce sujet, il a coécrit Une économie sans argent: les systèmes d’échange local (SEL) (dirigé par J.-M. Servet, Seuil, Paris, 1999) et dirigé Monnaies sociales: Exclusion et liens financiers, rapport 2005-2006 (Economica, Paris, 2006). En matière d’histoire des idées, il dirige avec Ludovic Desmedt l’ouvrage collectif Idées et pratiques monétaires en Europe, 1517-1776 (à paraître).
À partir du cas des monnaies sociales, ses travaux portent aussi sur l’économie sociale et solidaire. Il est membre du Réseau inter-universitaire de l’économie sociale et solidaire (RIUESS,
http://www.riuess.org/) et fait partie du comité éditorial de l’International Journal of Community Currency Research (IJCCR, http://www.uea.ac.uk/env/ijccr/)
(2) Cyrille Ferraton est docteur en sciences économiques et maître de conférences à l'Université Paul Valéry de Montpellier III.
Ses principaux thèmes de recherche portent sur l'économie sociale et solidaire (en particulier la finance solidaire) et l'économie institutionnaliste.
Il a travaillé en 2004-2005 sur un programme de recherche européen portant sur la création d'emploi dans les services à la personne.
Il a publié
. L'enquête inachevée : introduction à l'économie politique d'
Albert Hirschman (avec Ludovic Frobert, Paris, PUF, 2003),
. Associations et coopératives. Une autre histoire économique (Erès, Paris, 2007),
. L'Institutionnalisme de
Gunnar Myrdal en question (ENS, Paris, 2009),
. La Propriété. Chacun pour soi? (Larousse, coll.
Philosopher, Paris, 2009).
(3) On distingue généralement les approches de l’économie sociale et de l’économie solidaire. La première, selon Charles Gide (1930, 2000), naît au début du XIXe siècle avec J. C. L. Simonde de Sismondi (1773-1842), en réaction aux changements provoqués par l’industrialisation dans l’organisation du travail et les habitudes sociales et à la nécessité de subvenir aux besoins les plus urgents de la population. Elle s’inspire ensuite de la pensée socialiste (L. Blanc, P.-J. Proudhon, etc.) et des pratiques sociales (Pionniers de la Rochdale (1844), développement des sociétés de secours mutuels, etc.) au cours du XIXe siècle. Elle est systématisée au début du XXe siècle par Ch. Gide (1905). Elle connaît un nouveau développement dans les années 1960 et 1970 notamment au travers de la pensée de C. Vienney (1966) et de H. Desroche (1976, 1983). L’analyse contemporaine privilégie une conception institutionnelle de l’économie sociale par l’étude des mouvements coopératifs, mutualistes et associatifs. La seconde approche, celle de l’économie solidaire, émerge au début des années 1990 et poursuit en partie les études principalement anglo-saxonnes déjà entreprises sur les organisations sans but lucratif (nonprofit organizations) et se pose en héritière directe de l’associationnisme des années 1830-1848 en France. Nous ne tenons compte par la suite que de l’approche de l’économie solidaire.
(4) Voir à ce propos Servet J.-M. (dir.), Une économie sans argent, les systèmes d’échange local, Seuil, Paris, 1999.
(5) Blanc Jérôme Formes et rationalités du localisme monétaire, in L’Actualité Économique, 78 (3), septembre 2002.
(6) C’est le choix de l’Alliance pour un monde responsable et solidaire qui développe depuis début 2000 un forum dit des monnaies sociales en vue d’aboutir à un certain nombre de propositions générales visant à répandre ce type de systèmes. Par la suite cette terminologie s’est rapidement diffusée en langue française et espagnole, un peu moins en langue anglaise où l’on préfère parler de community currency systems.
(7) Ce message est extrait du texte: Blanc Jérôme et Ferraton Cyrille, Une monnaie sociale? Systèmes d’Échange Local (SEL) et économie solidaire, 2001
. Avec l’aimable autorisation des auteurs, que nous remercions. La suite sera prochainement publiée sur ce blog (in extenso pour l'essentiel, en résumé pour le solde). Les titre, chapeau et intertitres sont de la rédaction. Le texte original a d’abord été présenté lors des Deuxièmes Journées d’Etude du LAME, «Économie sociale, mutations systémiques et nouvelle économie», Reims, 29-30 novembre 2001. Il est ensuite paru dans l’ouvrage collectif (actes du colloque): G. Rasselet, M. Delaplace et E. Bosserelle (coord.), L’économie sociale en perspective, Presses Universitaires de Reims, Reims, 2005, pp.83-98.
(8) Pour suivre (sous réserve d'éventuelles modifications de dernière minute):
. «Monnaie sociale. Archétypes et vieilles dentelles
. «Monnaie sociale. Questions de principe.»
. «Monnaie sociale. Marché: non, merci!»
. «Monnaie sociale. Marché: oui, mais...»
. «Monnaie sociale. Oyez, citoyens...»

. «Monnaie sociale. LETS béton…»