vendredi 12 septembre 2014

Immigration. Aléatoire, mon cher Watson...



Et si 
menait
Que 
découvrirait 
donc 
le célèbre 
détective?
Beaucoup 
de souffrance
sans doute.
Et aussi 
un système 
politique 
assez 
paradoxal.
Aléatoire,
mon cher Watson...


















 «Bloody hell!
Tout ceci fait insulte à mon légendaire sens de la logique!»
Ainsi le grand Sherlock aurait-il peut-être ponctué une enquête menée, couvre-chef sur la tête et loupe à la main, dans les milieux de la procédure d'asile.
Et pour cause...
Fortement conditionné par la crise, le système politico-juridique des pays occidentaux est largement soumis à l'aléatoire.
Car la délivrance du statut de réfugié s'articule à des paramètres sur lesquels le candidat à l'exil n'a aucune prise.
Des paramètres politiques tout d'abord, tels les accords bilatéraux entre Etats.
Des paramètres conjoncturels aussi, renvoyant à l'actualité du moment.
Des paramètres circonstanciels enfin: identité des personnes en charge du dossier, connaissance plus ou moins approfondie par le demandeur d'asile des règles du jeu politique, de sa rhétorique ou des codes linguistiques du pays d'accueil...

Cachez cette souffrance que je ne saurais voir...

Allons plus loin en nous référant à l'exemple de Catherine, cette jeune Guinéenne qu'évoque la psychologue et psychanalyste française Elise Pestre (1).
Et dont la procédure d'accès à l'asile a très rapidement débouché sur une conclusion favorable de l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides (OFPRA).
«Pour l'Etat, la "vraie réfugiée", appartenant à l'élite intellectuelle qui a su dompter ses traumatismes, (...) ne contamine pas les autres par sa honte et se montre comme il faut: exhaustive et "convaincante", qui plus est en français.» (2)
Et notre guide d'en tirer l'une des conclusions qui lui paraissent devoir s'imposer...
«Celui qui est en capacité de convaincre les autorités étatiques semble être celui qui est déjà partiellement sorti de son engluement traumatique, celui qui a pu entrer à nouveau dans l'ordre du discours, ou celui même qui n'a pas connu de tels effets ravageurs.» (3)

Paradoxal système

Emerge alors une impression paradoxale...
Autant l'existence de certains symptômes (notamment dépressifs) liés à un traumatisme semble aider le demandeur d'asile à se voir reconnu, autant les effets déstructurants de ce «trauma» sur la narration jouent en sa défaveur.
« By Jove, Watson!
J'ai bien peur que tout ceci ne manque singulièrement de cohérence...» (4)

(A suivre)

Christophe Engels


(1) Elise Pestre est maîtresse de conférences à l'Université Paris-Diderot et chercheure au centre de recherches Psychanalyse, Médecine et Société.
(2) Pestre Elise, La vie psychique des réfugiés, Payot et Rivages, coll. Petite bibliothèque Payot, Paris, 2010-2014, p.193.
(3) Pestre Elise, La vie psychique des réfugiés, Payot et Rivages, coll. Petite bibliothèque Payot, Paris, 2010-2014, pp.191-192.
(4) Pour suivre (sous réserve de changement de dernière minute):
. la suite d'une série de messages consacrés à l'immigration,
. des analyses sur la social-démocratie et l'écologie politique (après le libéralisme ainsi que l'humanisme démocratique qui, pour rappel, ont d'ores et déjà été abordés).


mardi 9 septembre 2014

Immigration. Asile hostile




 


















Ils ont beau être en demande d'asile,
ils n'en ont pas moins, le plus souvent,
à évoluer en terrain hostile.
Gros plan sur les candidats au statut de réfugié.


« L'amour ne finit jamais.
J'ai confiance.
Le monde est comme ça.
Chacun aura un jour sa chance.
On a tous besoin les uns des autres.
Je ne sais pas quand ta chance arrivera ... »
(Chant traditionnel mandingue)


On confond souvent les termes de «demandeur d'asile» et de «réfugié».
Le demandeur d'asile est quelqu'un qui dit être un réfugié mais dont la demande est encore en cours d'examen.
Le réfugié, lui, est une personne...
- «qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait
. de sa race,
. de sa religion,
. de sa nationalité,
. de son appartenance à un certain groupe social
. ou de ses opinions politiques,
se trouve hors du pays dont elle a la nationalité
et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays;
- ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner.» (1)
Tels sont en tout cas les termes de la Convention de Genève.
Qui prévoit donc que, pour pouvoir donner lieu à une admission au statut de réfugié, les craintes de persécutions doivent reposer sur des motifs relevant de l’un des cinq critères limitativement énumérés.
Reprenons-les point par point…

. La race

Il convient d’entendre le mot «race» au sens le plus large d’appartenance à un groupe ethnique.
On pense en particulier, ici, aux événements rwandais ou, dans certains pays ou contextes, aux craintes éprouvées du fait d’un mariage mixte entre deux personnes d’ethnies différentes.

. La religion

Il y a lieu, par exemple, de ranger sous ce critère les appréhensions légitimement liées à l’appartenance à une communauté religieuse.

. La nationalité

La notion de «nationalité» ne se limite pas à la citoyenneté ou à l'inexistence de celle-ci.
Elle recouvre, entre autres, l'appartenance à un groupe soudé...
. par son identité culturelle, ethnique ou linguistique, 
. par ses origines géographiques ou politiques communes, 
. voire même par sa relation avec la population d'un autre Etat.

. L’appartenance à un certain groupe social

L’appellation «groupe social» renvoie en l’occurrence à un ensemble de personnes de mêmes origine, mode de vie ou statut social.
Visant initialement les classes sociales dans les régimes communistes, cette notion s’est, depuis lors, ouverte à d’autres ensembles de personnes: femmes, homosexuels, intellectuels…
Autant de catégories qui peuvent, en effet, se voir persécutées parce qu’elles expriment leurs aspirations à une façon d’être différente de celle qui prévaut dans leur société.

. Les opinions politiques

Denrée rare en régime de dictature, la notion d’«opinion politique» recouvre, en substance, la (suspicion d')activité militante du demandeur au sein d’un parti politique d’opposition ou l’exercice du droit à sa liberté d’expression individuelle contre des positions du régime en place.

Au-delà du droit...

Race, religion, nationalité, appartenance à un certain groupe social, opinions politiques: cinq critères, donc, pour un statut juridique.
Qui, bien sûr, ne suffit pas à épuiser la problématique concernée.
Car le réfugié est évidemment bien davantage qu'un sujet de droit.
Il est avant tout un être humain... (2)

(A suivre)

Christophe Engels


(1) Selon les termes de l’article 1.A.2. de la Convention relative au statut des réfugiés ou Convention de Genève (1951). 
(2) Pour suivre (sous réserve de changement de dernière minute): 
. la suite d'une série de messages consacrés à l'immigration, 
. des analyses sur la social-démocratie et l'écologie politique (après le libéralisme ainsi que l'humanisme démocratique qui, pour rappel, ont d'ores et déjà été abordés).


vendredi 5 septembre 2014

Cinq cents messages et un prochain happy end... Projet relationnel: le bouquet final


 






















Et de 500 pour «Projet relationnel»!
Cinq cents messages qui ont  bien retenu l'attention.
Mais qui ne donnent toujours lieu 
ni à échanges
ni à relais
ni à prolongements événementiels. 
Etait-ce juste une illusion?
Juste mon imagination? 
«Projet relationnel»
en tout cas, 
s'apprête à tirer sa révérence.
D'ici quelques mois.
Sauf inattendu rebondissement 
de dernière minute.
Et non sans y avoir été 
au préalable 
d'un spectaculaire bouquet final.


Sauf improbable fait nouveau, «Projet relationnel» mettra la clé sous le paillasson d'ici quelques mois.
Le temps de développer les trois sujets annoncés depuis plusieurs semaines. 
A savoir l'immigration, l'écologie politique et la social-démocratie. 

Rideau! 

Le rideau devrait donc se fermer sous peu. 
Non pas que ce blog ne soit pas lu (1).
Il l'a été (et continue à l'être), essentiellement des deux côtés de Quiévrain (2) ainsi que (toujours davantage) aux Etats-Unis.
Il l'a même été de plus en plus, jusqu'il y a peu.
Seulement voilà...
D'une part, «Projet relationnel» ne donne pas lieu aux échanges de vue initialement espérés: peu de commentaires, insuffisance de réactivité, pas de discussions entre vous dans le prolongement des messages publiés. 
D'autre part, il a été fort peu relayé par les réseaux sociaux et encore moins par les médias traditionnels. 
En outre, il n'a pas réussi à déborder le carcan de son «fief» électronique...

Extension du domaine de la lutte

Si le virtuel ne s'est pas prolongé dans le réel, ce n'est pas faute d'avoir essayé.
Qui plus est avec les très précieux soutiens, directs ou indirects, de nombreuses et riches personnalités: qu'elles en soient, une fois, encore chaleureusement remerciées.
Pourtant, les prises de contact n'ont débouché sur rien de concret.
Des propositions de synergie ont été qualifiées de «grands messes».
Des invitations déclinées.
Des rencontres écourtées ou annulées.
Des lendemains de conférence assombris par des courriels aussi assassins que (unanimement reconnus comme) incongrus.
Des réunions de travail (répétitivement) avancées d'une heure sans avertissement préalable à votre serviteur. 
Des documents évacués avant d'avoir été discutés, voire simplement lus. 
Des opportunités sacrifiées sur l'autel de règlements de compte entre (autres) intervenants...
Ainsi va la vie. 
Et qu'importe le passé.
Le problème est ailleurs.
Je suspecte, aujourd'hui, que trop de responsables des courants de pensée et modes de vie émergents ne soient intéressés avant tout par des interlocuteurs dont on ne puisse redouter (à tort ou à raison) qu'ils cherchent à élargir le moule cloisonné, sinon cadenassé, d'un projet préalable. 
Et je crains que, dans bon nombre de cas, un journaliste n'intéresse qu'à proportion de l'audience du ou des média(s) qu'il représente. 

Quoique plusieurs des difficultés rencontrées me soient apparues comme inextricables et bien que l'une ou l'autre d'entre elles m'aient énormément coûté sur les plans émotionnel, psychique et même professionnel, j'entends prendre ma part de responsabilité dans ce qui apparaît bel et bien, à ce jour, comme un constat d'échec. 
Mais je dois bien le reconnaître: je ne suis pas sorti indemne de cette expérience. 
Et il est donc plus que temps pour moi de lever le pied.
Car, pour l'écrire sobrement en citant Pierre Rabhi, «Il faut se donner à soi-même ce qui est nécessaire pour être joyeux.» (3)

 Besoin de résultats 

«Pour trouver le courage de se mettre en marche, il nous faut peut-être apprendre à agir en étant conscients de l'importance même de chacun de nos actes et à les apprécier pour ce qu'ils sont, pour leur intention, écrivent ces Belges que sont la politologue Caroline Lesire et le psychologue Ilios Kotsou.
Sans être obsédés, donc, par leurs résultats qui ne dépendent pas uniquement de nous, et ne se produisent pas toujours dans l'immédiat.» (4)
Obligation de moyen et non pas obligation de résultat?
Sans doute.

Reste qu'autant celui-ci n'a pas à être systématiquement au rendez-vous, autant, sous un autre angle, il ne peut pas se maintenir trop longtemps aux abonnés absents.
Ce qu'explique par exemple le psychologue Albert Bandura.
Qui parle de «sentiment d'efficacité».
Soit ce ressenti qui nous incite à estimer que nous pouvons obtenir les résultats souhaités grâce à notre propre action.
Un ressenti dont le Canadien fait le fondement même de notre motivation à agir. (5)

 Sérénité, courage, sagesse 

Pour garder espoir, nous avons donc besoin de percevoir que ce que nous faisons sert à quelque chose.
Sous peine de «dégâts collatéraux»...
«Lorsqu'une personne se rend compte de son absence de contrôle sur les événements, elle adopte le plus souvent une attitude résignée ou passive, précisent Lesire et Kotsou.
Une attitude qui se généralise ensuite aux situations dans lesquelles son action aurait pu être efficace.» (6)
Confrontés à ce type de contexte, nous tendons à renforcer plus que jamais cette propension qu'a déjà l'être humain à verser davantage dans le négatif que dans le positif.
Un biais qui, selon le psychologue américain Roy Baumeister, s'expliquerait par le fait que l'environnement très périlleux de nos ancêtres rendait plus importante la capacité à en repérer les menaces que l'aptitude à en détecter les bénéfices potentiels. (7).
Une telle analyse, si on la reprend à son compte, tend à accréditer la pertinence de la prière souvent attribuée à Marc Aurèle et reprise par les... Alcooliques anonymes!
«Donnez-moi 
. le courage de modifier ce que je peux changer,
. la sérénité d’accepter ce sur quoi je n'ai aucune influence
. et la sagesse de voir la différence entre l'un et l'autre.» (8)

Christophe Engels


(1) Un total dont on précisera pour l'anecdote qu'il avoisine les 100.000 visiteurs à ce stade. Soit un nombre qu'on voudra bien, évidemment, comparer à ceux des blogs qui, non contents de se contenter d'annoncer péremptoirement des chiffres à jamais invérifiables, ont, comme Projet relationnel, joué la transparence d'un compteur affiché en permanence (voir le bas de la colonne de gauche).
(2) Davantage en France dans l'absolu, davantage en Belgique proportionnellement.
(3) Rabhi Pierre, cité dans Lesire Caroline et Kotsou Ilios, La conscience en action, in Se changer, changer le monde, L'iconoclaste, Paris, 2014, p.191.
(4) Lesire Caroline et Kotsou Ilios, La conscience en action, in Se changer, changer le monde, L'iconoclaste, Paris, 2014, p.182.
(5) Cfr. Bandura Albert, Auto-efficacité: le sentiment d'efficacité personnelle, De Boeck, Paris, 2003-2007 (traduction Jacques Lecomte).
(6) Lesire Caroline et Kotsou Ilios, La conscience en action, in Se changer, changer le monde, L'iconoclaste, Paris, 2014, p.179.
(7) Cfr. Baumeister R. F., Bratslavsky E., Finkenauer C. et Vohs K. D., Bad is stronger than good, Review of General Psychology, numéro 5, 2001, pp.323-370.
(8) Pour suivre (sous réserve de changement de dernière minute): des analyses sur l'immigration, puis sur l'écologie politique et la social-démocratie (après le libéralisme ainsi que l'humanisme démocratique qui, pour rappel, ont d'ores et déjà été abordés). 


vendredi 29 août 2014

Courants de pensée et modes de vie émergents (51) Stop ou encore ?


 
















La crise enferme, certes.
Mais elle libère, aussi.
Car autant elle prive de ressources,
autant elle contribue à ouvrir les esprits
Donc à faire jaillir les idées nouvelles.
C'est dire si, plus que jamais, 
les courants de pensée et modes de vie émergents
se retrouvent à la croisée des chemins.
Sans doute ont-ils déjà commencé
à élever significativement les niveaux conscience.
Reste à réussir dans une entreprise 
encore (beaucoup) plus ambitieuse:
celle de la convergence.


«Imagine qu'il n'existe
aucun paradis
- c'est facile, 
il suffit d'essayer-,
aucun enfer 
en-dessous de nous
et, au dessus de nous, 
seulement le ciel.

Imagine 
 que chacun d'entre nous
se mette à vivre 
pour aujourd'hui...

Imagine qu'il n'existe pas 
le moindre pays
- ce n'est pas si difficile à faire-,
pas la moindre cause pour laquelle tuer ou mourir,
pas même la moindre religion.

Imagine 
que chacun d'entre nous
se mette à vivre en paix...
 
Tu peux m'accuser d'être un doux rêveur, 
mais je ne suis pas le seul.
J'ai l'espoir 
qu'un jour, tu nous rejoindras
et que le monde vivra uni.

Imagine l'absence 
de possession
- je me demande 
si tu en es capable-,
la disparition du besoin 
de convoiter ou d'affamer,
l'avènement
d'une fraternité humaine.

Imagine 
que chacun d'entre nous
se mette à tout partager,
partout dans le monde...
 
Tu peux m'accuser 
d'être un doux rêveur, 
mais je ne suis pas le seul.
J'ai l'espoir 
qu'un jour, tu nous rejoindras, 
et que le monde vivra uni.»

(Lennon John, Imagine)



La conjoncture incite pour le moins à la morosité.
Pire: à la franche inquiétude. 
A tel point qu'il devient de moins en moins hardi de se demander si, au-delà de la crise économique, il ne convient pas de parler de crise de civilisation.
Peu importe ici.
Contentons-nous d'avancer l'idée qu'un tel contexte peut influer de deux manières sur l'évolution des courants de pensée et modes de vie émergents
C'est que, d'un côté, la crise tend à «enfermer», dans la mesure où elle prive de ressources.
Tandis que, de l'autre, elle laisse entrevoir une propension à «libérer», au sens où elle ouvre les esprits à des solutions nouvelles. 

Le moment ou jamais? 

Entre ces deux options, le coeur de Matthieu Ricard ne balance pas.
«La crise actuelle me semble être un moment précieux pour remettre en question notre train de vie, affirme résolument le moine bouddhiste français.
Jusqu'alors on ne s'interrogeait pas du tout sur ce superflu qui nous entourait.» (1)
Innovation: différents types de questionnement sont de mise, désormais.
Celui des
«simplicitaires», par exemple.
«La simplicité volontaire, ou sobriété heureuse, ce n'est pas se priver de ce qui est nécessaire pour vivre et de ce qui nous apporte un bonheur véritable -ce serait absurde-, mais se débarrasser du superflu, et ainsi renoncer aux causes de la souffrance.» (2)
Y renoncer.
Ou plutôt, donc, s'en libérer.
Car «L'oiseau ne "renonce" pas à sa cage, il s'en libère.» (3)

Mouvement de libération... occidental

Un tel «mouvement de libération» (!) se généralisera-t-il?
L'avenir le dira.
Mais, le cas échéant, il devrait prendre une double forme.
. Il passera, tout d'abord, par une élévation de conscience.
«Quand quelqu'un gravit une montagne, cela lui demande un effort, ses jambes fatiguent, mais le paysage s'élargit, devient de plus en plus intelligible, élucubre joliment le «paysan-philosophe» d'origine algérienne Pierre Rabhi. (...)
En élevant notre conscience, on peut voir la relation entre les éléments constitutifs d'une réalité plus large qui ne comporte aucune division.» (4)
. Le mouvement en question se fera également par la culture
Celle-là même à laquelle le sociologue américain James Jasper donne un rôle central quand il la définit comme une «toile de significations» (5) dont les fils renverraient à des idées, traditions, principes moraux, métaphores et autres croyances confuses.
Cocon de sens enveloppant individus et groupes, la culture modèlerait l'action collective et contribuerait à fixer des identités.
Sans, donc, se confondre avec les cadres, «efforts conscients de groupes ou de recruteurs pour adapter leur rhétorique et leurs dossiers de telle sorte qu'ils soient attractifs pour des recrues potentielles.» (5)

Incarner l'utopie

Le changement authentique, écrivions-nous précédemment, ne va pas sans un double questionnement radical, sur soi-même d'une part, sur la société d'autre part.
Encore convient-il de ne pas s'arrêter en si bon chemin.
Encore convient-il de passer à l'action.
Encore convient-il d'incarner l'utopie.
«L'alternative est là, reprend Rabhi.
Soit on reste dans le conformisme du "on ne peut rien changer", soit on le transgresse pour aller vers le changement.» (6) 
Un changement qu'il reste à construire.
Qui plus est en commun.  
Ce qui suppose de convaincre.
Donc, au préalable, de travailler sur les représentations pour donner au mécontentement un langage.
«Ce recours au langage comporte une dimension cognitive en apportant les mots, les classements, les explications qui ordonnent le monde, analyse le sociologue français Erik Neveu. (...)
En désignant des causes et des responsables, la dimension symbolique est aussi normative. 
Elle dit le bien et le mal, le nous et le eux et comporte aussi par là une composante identitaire. 
Enfin, en rendant possible la formulation des griefs et des demandes, elle ouvre un registre expressif.» (7)

Mobilisation générale!

Convaincre, donc, pour mobiliser.
Et, de là, pour converger.
Un ultime mais essentiel défi qui, à ce stade en tout cas, n'est pas près d'être gagné. (8)

Christophe Engels


(1) Ricard Matthieu, Demain, un monde d'altruistes, in Se changer, changer le monde, L'iconoclaste, Paris, 2014, pp.127-128.
(2) Ricard Matthieu, idem, pp.127-128.
(3) Ricard Matthieu, idem, p.128. 
(4) Rabhi Pierre, Ensemble, faire germer le changement, in Se changer, changer le monde, L'iconoclaste, Paris, 2014, pp.160-161.
(5) Jasper Karl, The Art of Moral Protest: Culture, Biography and Creativity in Social Movements, Chicago University Press, Chicago, 1997.
(6) Rabhi Pierre, ibidem, p.169.
(7) Neveu Erik, Sociologie des mouvements sociaux, La Découverte, coll. Repères, Paris, 1996-2011, pp.99-100.
(8) Pour suivre (sous réserve de changement de dernière minute):
. le cinq centième message de Projet relationnel,
. des analyses sur l'immigration, puis sur la social-démocratie et l'écologie politique (après le libéralisme ainsi que l'humanisme démocratique qui, pour rappel, ont d'ores et déjà été abordés).