jeudi 22 janvier 2015

Jamel Debouze. Ma Foi, ma République



Charlie Hebdo,
la porte de Vincennes,  
les agissements de Boko Haram au Nigéria,
les manifestations dans les pays musulmans...
Autant d'événements
qui en ont laissé plus d'un sans voix.  
Hagards.
Abasourdis.
Sidérés.

Anéantis
par tant de violence.
Avouons le piteusement:
l'initiateur de ce Projet relationnel
fait partie du nombre.
Comme bien d'autres.
Dont l'humoriste Jamel Debbouze.
Qui, jusqu'à nouvel ordre, ne rit plus
et a perdu toute envie de le faire.
S'il a repris la parole (1)
c'est, autant que possible, 
pour apporter sa pierre 
à l'édifice d'une réconciliation 
entre les Charlie
et ceux qui ne le sont pas.
Pour dire, aussi, sa fierté
d'être français et musulman.
Et non plus, donc, pour faire le clown.
Car l'heure est grave.
A découvrir ou à redécouvrir.


(1) Ce dimance 18 janvier, dans l'émission Sept à Huit, sur TF1.


mardi 20 janvier 2015

Plus jamais ça?


Dix morts, 
des femmes 
violentées
et violées, 
une 
vingtaine 
d'églises 
saccagées
et brûlées,
des hôtels 
incendiés,
des débits 
de boisson 
partis 
en fumée...
Les suites 
de l'affaire 
Charlie 
Hebdo 
ont pris 
des 
proportions 
inouïes
au Niger.
Un 
incroyable 
déferlement 
de violence
que 
l'édito-
rialiste
musulman
du 
quotidien
national 
Le Sahel 
lit 
et décrit 
comme une 
perversion 
de l'Islam. 
Extraits... (1)


«L'Islam est une religion de tolérance, d'ouverture sur autrui, qui encourage le dialogue civilisationnel. 
Aujourd'hui, nous sommes dans un village planétaire où certaines forces occultes ou forces du mal font un odieux commerce de ce qu'on peut appeler le choc des civilisations, le choc des cultures ou le choc des religions.
Ces forces du mal cherchent à tirer prétexte de n'importe quel événement pour justifier leurs attaques contre l'Islam. 
L'islamophobie s'est aujourd'hui constituée en fonds de commerce attisant des campagnes médiatiques dans certains pays, utilisant les amalgames et favorisant l'intolérance, la haine, la violence. 
Il y a l'image qu'on veut nous donner de l'extérieur et il y a la réalité interne. 
Et cette réalité, c'est la tolérance, l'acceptation de l'autre, la solidarité entre tous les membres de la communauté et à l'égard de l'extérieur.»

Condamner le fanatisme

«Le fanatisme, quand il existe, doit être condamné dans toutes les religions.
Il est important pour tous les musulmans d'appliquer cette sage recommandation de notre Prophète Mouhammad (PSL): ''
Quiconque parmi vous voit un mal, qu'il le change par sa main; s'il ne peut pas, qu'il le change par sa langue; s'il ne peut pas, qu'il le condamne avec son cœur, et c'est le dernier degré de la foi''. (...)
Le changement par la main, c'est-à-dire par la force, est réservé à celui qui le peut comme le chef de famille dans sa famille, l'autorité dans sa sphère de responsabilité.
Le changement par la langue se fait par la dénonciation verbale ou écrite du mal, le bon conseil adressé au malfaiteur...
Le changement par le cœur consiste à condamner le mal au fond de son cœur et implorer le secours de Dieu qui peut changer le mal.
L'essentiel, c'est de protéger l'Islam contre les déviances, les déviations défendues au nom de ses principes par des millions de fidèles, une communauté de savants et de sages agissant au nom de l'Ijtihad, théorie dont l'usage est particulièrement recommandé dans la religion, et qui permet de revenir à tout ce qui est authentique. 
Le Coran a ses fondements et ses piliers qui se retrouvent dans la défense de la justice, de la paix, de l'égalité. 
L'Islam, c'est la manifestation de la sagesse.» (1)
 

Mahamadou Adamou 



(1) Ce message reprend une partie de l'éditorial de Mahamadou Adamou (Plus jamais ça, in Le Sahel, 19 janvier 2015). Merci à l'auteur pour son autorisation. Les titre, chapeau et intertitre sont de la rédaction.



jeudi 15 janvier 2015

Pourquoi je ne suis pas Charlie...



 

La barbarie 
se situe-t-elle 
exclusivement 
dans le camp 
de ces extrémistes 
qu'on ose à peine 
appeler «musulmans»?
Et la liberté d'expression 
ne s'arrête-t-elle 
que là où commence 
la menace 
de condamnation judiciaire?
Non, 
deux fois non,
répond le philosophe belge 
Jean-Michel Longneaux (1).
Qui clame haut et fort
ne pas se sentir Charlie
Et qui s'en explique...






















Par Jean-Michel Longneaux (1)


Indigné et triste comme tant d'autres, je condamne radicalement les tueries de Charlie Hebdo et de la Porte de Vincennes.
Je dois même avouer avoir ressenti un certain soulagement lorsque les assassins,  aussi lâches que déterminés, ont été «neutralisés».
Pourtant, je ne suis décidément pas Charlie.
Deux raisons au moins me l'interdisent...

Tous contre la barbarie?

Tout d'abord, lorsqu'une communauté a été ébranlée au point de se sentir menacée dans ses propres fondements, elle éprouve le besoin de resserrer les rangs, de partager un même sentiment d'appartenance pour revendiquer son droit à l'existence. 
C'est à ce réflexe de survie et de réassurance pour le moins légitime que l'on a assisté ces derniers jours, à travers des rassemblements spontanés et des marches organisées. 
Mais les émotions partagées se traduisent malheureusement en slogans consternants qui visent à donner bonne conscience. 
Nous réaffirmons notre unité en dénonçant la barbarie. 
Et du même coup, nous nous rangeons dans le camp des «civilisés». 
D'un côté l'obscurantisme, la violence, l'intégrisme, et de l'autre côté la raison éclairée, la solidarité et la tolérance. 
Quelle naïveté!
Non pas à propos des barbares, mais de nous-mêmes: notre société n'est-elle pas, elle aussi, d'une violence inouïe? 
Les injustices sociales, la recherche du profit au détriment des individus et des peuples, l'exclusion ou l'indifférence au quotidien, le repli sur soi, tout cela tue en silence, «légalement», sans coup de feu, loin des médias. 
Par ailleurs, n'est-ce pas dans cette société «civilisée» qu'ont grandi les futurs assassins? 
N'est-ce pas dans nos prisons, auxquelles nous refusons d'allouer des budgets suffisants, qu'ils ont été endoctrinés? 
Ce sont eux les coupables, bien évidemment, mais nous ne sommes pas innocents. 
La barbarie a différents visages, et je ne suis pas certain que la nôtre, celle dont nous sommes responsables, à défaut d'être moins spectaculaire, n'en soit pas pour autant moins cruelle. 
Nous sommes tous des Charlie
Mais nous sommes aussi tous des barbares, à notre façon.

Pardonnez-nous nos offenses... 

Je suis également réservé quant à la liberté d'expression qui aurait été visée à travers le massacre dans les locaux de Charlie Hebdo
Plus exactement, je m'étonne que personne n'ait relevé de contradiction entre les deux slogans brandis en même temps : «non à la haine» et «oui à la liberté d'expression»
Pris séparément, ces deux slogans sont justes... mais simplistes. 
Car mis ensemble, une étrange complexité apparaît. 
Il faut distinguer ce que l'on exprime -le fond- de la façon de l'exprimer -la forme.
Concernant le fond, toutes les idées doivent pouvoir s'échanger, tous les désaccords aussi, sans que l'on soit menacé dans sa vie. 
Si les terroristes avaient attaqué un journal «ordinaire», c'est ce droit fondamental qui aurait été visé. 
Mais Charlie Hebdo n'est pas un journal ordinaire. 
Il est un journal satirique, qui, à travers ses caricatures, entend faire réfléchir en se moquant. 
Ici, ce qui est en jeu, c'est la forme.
Proclamer être Charlie, ce n'est pas seulement défendre le droit de pensée, le droit au désaccord -ce que je partage, comme tant d'autres-, c'est défendre aussi le droit d'offenser selon les codes de l'autre, c'est défendre le droit d'humilier, de ridiculiser publiquement.
C'est autre chose que l'impertinence dont parlent pudiquement certains journalistes. 
Voilà pourquoi je ne suis pas Charlie. 

Pourquoi tant de haine?

Etre Charlie, c'est croire aussi que tout le monde est capable d'encaisser impassiblement ou avec le sourire les humiliations publiques. 
C'est croire que toutes les cultures partagent nos codes, notre sens de l'humour et que, si ce n'est pas le cas, elles devraient y tendre puisque nous détenons la vérité sur les bonnes conduites. 
Voilà pourquoi je ne suis pas Charlie: parce que dans le monde réel, je sais que tout le monde n'est pas capable de rire de tout, y compris de soi-même. 
Par contre, tout le monde a besoin de se sentir respecté, y compris dans le désaccord. 
Non à la haine, oui à la liberté d'expression?
A cela je réponds qu'au nom du refus de la haine, il faut oser refuser les modes d'expression qui peuvent blesser, qui sont ressentis par ceux qui sont visés comme de la haine, et qui suscitent en retour de la haine. 
On a le droit de n'être pas d'accord avec les autres, on n'a pas le droit de les humilier. 

Maux d'esprit 

Entre des crayons et des kalachnikovs, le rapport de force semble disproportionné, injuste, cruel. 
Ce que nous ne voulons pas voir -et que pourtant nous savons tous-, c'est que l'humour peut être d'une violence inouïe, qu'il peut blesser, qu'il peut détruire: certains se suicident à force d'être ridiculisés. 
Certains dessins, certains mots d'esprit sont pires que des fusils: ceux-ci tuent d'un coup, ceux-là, à petit feu.
Les lâches assassinats, que rien ne saurait excuser, nous renvoient une image de nous-mêmes bien cruelle. 
Je crains que l'émotion nous aveugle. (2)


Jean-Michel Longneaux (1) 


(1) Jean-Michel Longneaux est philosophe et professeur à l'Université de Namur.
(2) Cette tribune a déjà été publiée sur le site du Vif/L'Express (sous le titre de «Tous contre la barbarie?») et est reproduite ici avec l'autorisation de l'auteur, que nous remercions. Les titre, chapeau et intertitres sont de la rédaction.

 

lundi 12 janvier 2015

Dieudonné. Rire et laisser mourir



«Je me sens 
Charlie Coulibaly» (1).
S'esclaffe Dieudonné.
Plus extrémiste 
de la provoc' que jamais.
Heureusement pour 
le (toujours plus) tragique 
(toujours moins) comique, 
le ridicule, lui, ne tue plus.
Ce qui n'empêche pas
le parquet français d'enquêter
pour «apologie 
du terrorisme» (2).



(1) Doit-on vraiment rappeler que Amedy Coulibaly a assassiné quatre personnes, ce vendredi 9 janvier, dans une épicerie casher de la porte de Vincennes?
(2) A noter que le message en question a désormais été supprimé de la page Facebook de Dieudonné.


jeudi 8 janvier 2015

My name is Hebdo. Charlie Hebdo


Mon nom est Hebdo
Charlie Hebdo
Mais pas seulement.
Car depuis ce mercredi, je m'appelle aussi Ahmed (1)
Et Mustapha (2).
Et Bernard (3).
Et Elsa (4).
Et Charb (5).
Et Cabu (6).
Et Franck (7).
 Et Frédéric (8).
Et Honoré (9).
Et Michel (10).
Et Tignous (11). 
Et Wolinski (12).


(1) Merabet, agent de police.
(2) Ourrad, correcteur.
(3) Maris, économiste et chroniqueur. 
(4) Cayat, psychanalyste et chroniqueuse.  
(5) Dessinateur.
(6) Dessinateur. 
(7) Brinsolaro,brigadier au service de la protection.
(8) Boisseau, agent d'entretien. 
(9) Dessinateur.
(10) Renaud, ancien directeur de cabinet du maire de Clermont.  
(11) Dessinateur.
(12) Dessinateur.


mardi 6 janvier 2015

Immigration. Etes-vous pirogue, arbre ou vol retour?




Phénomène complexe, 
l'immigration 
peut s'appréhender 
sous des angles multiples.
Qu'il est possible de ramener 
à deux tendances lourdes.
Celle qui réfère à un «espoir»,
côté pays de départ.
Et celle qui renvoie 
à un «problème»,
côté pays d'arrivée.
En cette période 
Projet relationnel livre 
quatre témoignages bruts. 
Histoire de donner matière à réflexion. 
Histoire, aussi, d'inciter à prendre position
en préalable à l'approche économique qui suivra.
Et vous? 
Etes-vous plutôt pirogue?
Plutôt arbre?
Ou plutôt vol retour?...


Témoignage 1. 
Le sage mélanésien 

«Tout homme est tiraillé 
entre deux besoins...
Le besoin de la
pirogue,

c'est-à-dire du voyage,
de l'arrachement à soi-même,
Et le besoin de l'
arbre

c'est-à-dire de l'enracinement, 
de l'identité.
Les hommes errent constamment 

entre ces deux besoins
en cédant
tantôt à l'un,
tantôt à l'autre.
Jusqu'au jour où ils comprennent
que c'est avec l'
arbre qu'on fabrique la pirogue.
..» (1)

Témoignage 2.
La responsable française d'une unité locale d'éloignement

«Ce ne sont pas des délinquants qu'on a ici.
Ce sont des gens qui, généralement, 
se trouvent dans une situation particulière.
Soit une situation de pauvreté chez eux, 
raison pour laquelle ils viennent ici pour essayer de vivre mieux. 
Donc, ça pourrait être moi. 
Je pourrais très bien être à leur place.
Je ne sais pas comment je réagirais.
Je ne sais pas comment je ferais.
Donc, voilà...
Autant le fait de ne pas être une voleuse 
relève d'une décision de ma part.
Autant le fait d'être née au bon endroit, 
c'est un coup de chance.» (2)

Témoignage 3.
L'expulsé pakistanais

«J'ai payé 11.000 euros pour venir ici.
Ce sont mon papa et ma maman qui ont payé. (...)
Je ne veux pas rentrer au Pakistan.» (2)
 
Témoignage 4.
L'escorteur français
 
«On évite de se poser 
des questions en ces termes.
Parce qu'à ce compte-là...
Si on commence 
à prendre tout ça 
en considération
on va finir par penser 
qu'effectivement, 
c'est un puits sans fond...» (2)(3)


Christophe Engels


(1) Mythe mélanésien de l'île de Vanuatu. 
(2) Lequertier Jean-Marie (avec Goutard A., Brunet C. et Montel N.), Grand reportage. Clandestins: le vol retour, extrait du journal télévisé (20 h) de France 2, 18 mars 2013.
(3) Pour suivre (sous réserve de changement de dernière minute):  
. la suite d'une série de messages consacrés à l'immigration; 
. des analyses sur la social-démocratie et l'écologie politique (après le libéralisme ainsi que l'humanisme démocratique qui, pour rappel, ont d'ores et déjà été abordés).