mercredi 23 février 2011

Actu. Chauffe, Marcel...

Sur la route de la (psycho-)sociologie,
le Belge Marcel Bolle de Bal (1)
a chaleureusement côtoyé
bien des maîtres,
bien des amis
et bien des compagnons.
Dans un tout récent ouvrage,
l'apôtre (2) de la «reliance»
tire son chapeau
à sept d'entre eux...

Sociologue d’audience nationale et internationale, le professeur émérite de l'Université Libre de Bruxelles (ULB) a réuni ici une série de textes épars, naguère rédigés en hommage à sept de ses collègues de Belgique, de France et du Québec:
. Doucy,
. Henrion,
. Janne,
. Maffesoli,
. Morin,
. Rocher,
. Sainsaulieu.
«Au crépuscule de l'existence, des marées de souvenirs remontent à la mémoire, nous explique l'auteur. L'envie de rendre hommage aux personnes/personnages remarquables qui vous ont guidé et/ou marqué vous taraude parfois. C'est ce qui vient de m'arriver. D'où la réalisation concrète de ce légitime désir dans un petit livre qui vient de sortir de presse: "Sur la route de la sociologie. Maîtres , amis et compagnons" (3).»
Par delà le désir de reconnaissance intellectuelle et affective, se révèle à cette occasion la genèse d’une pensée originale, appelée à cerner la dynamique complexe des sociétés contemporaines.
Une pensée articulée autour de trois dimensions-clés pour la sociologie en devenir:
. la reliance comme notion de base,
. la recherche-action comme méthode,
. la sociologie existentielle comme discipline intégrant l’affectif, le subjectif, l’irrationnel dans ses modèles, théories et pratiques...

C.E.

(1) Marcel Bolle De Bal a été président du Collège scientifique de l’Institut de Sociologie ainsi que de la Faculté des Sciences Psychologiques et Pédagogiques, au sein de l’Université Libre de Bruxelles. Président d’honneur de l’Association Internationale des Sociologues de Langue Française, il a été également professeur visiteur aux Universités de Genève, Paris-Dauphine, Toulouse-le-Mirail et Fribourg (Suisse). Engagé dans la gestion de la cité, il a été élu à quatre reprises membre du Conseil Communal de sa commune de Linkebeek. Il a publié une trentaine de livres et plus de 250 articles à titre personnel.
(2) «Apôtre»: si l'on ose dire, l'intéressé revendiquant haut et fort ses positions athées.
(3) Bolle de Bal Marcel, Sur la route de la sociologie: maîtres, amis et compagnons, E.M.E. Société, Fernelmont (Belgique), 2010. A découvrir dans toutes les bonnes librairies (comme on dit) ou à commander via votre libraire favori. Autres solutions: par internet ou courriel chez l'éditeur EME, 40 rue de Hanret, 5380 Fernelmont, Belgique, 00.32.81.83.42.63, edition@intercommunications.be, http://www.intercommunications.be/.

samedi 19 février 2011

Projet relationnel. Un an, déjà...

C’était le
19 février 2010.
«L'appel à projet relationnel»
apparaissait
sur la toile.
Un an plus tard,
un sympathique
cadeau
d’anniversaire
nous parvient
d’outre-Atlantique.
De l’Université
du Québec
à Montréal
plus précisément.
Dont la Chaire
a décidé de faire
de Projet relationnel
son «site du mois»...

Merci, la Belle Province!
Cette «nomination» nous va droit au cœur.
D’autant qu’elle paraît confirmer l’élargissement de notre audience.
Vers le Québec sans doute.
Mais aussi vers beaucoup d’autres régions.
Notamment francophones, bien sûr.
A commencer par la France.
C’est en effet depuis l’Hexagone que, désormais, on nous lit le plus.
Et non plus depuis la petite Belgique.
Qui, évidemment, n’en reste pas moins fidèle au poste (1)...

Ecouter, relayer, fédérer...

Du cœur de cette petite contrée politiquement agitée pourrait d’ailleurs jaillir d’ici quelques mois le premier événement non virtuel (co-)porté par Projet relationnel.
Avec, le cas échéant, le concours d’une belle brochette de partenaires.
Un beau clin d’œil aux soubresauts communautaires qui accablent actuellement le plat pays?
Plus que jamais, en tout cas, l’objectif de Projet relationnel semble rester d’actualité.
Plus que jamais, il s’agit de relayer et de fédérer les voix, toujours plus nombreuses, de ceux qui, loin de se contenter de pourfendre les excès d’une société toute en individualisme consumériste et en matérialisme acquisitif, entendent apporter leur pierre à l’édifice d’une alternative positive et constructive.
Plus que jamais, il convient de tendre l’oreille à ceux qui se proposent d’interroger posément et rigoureusement la pensée (de moins en moins) «unique» à laquelle nous sommes si souvent confrontés.
Des citoyens.
Des intellectuels.
Des artistes aussi.
Tel Yves Duteil.
Dont la chanson «Avoir et être» a tant à nous dire…

Avoir et être

«Loin des vieux livres de grammaire,
Écoutez comment un beau soir
Ma mère m'enseigna les mystères
Du verbe être et du verbe avoir...

Parmi mes meilleurs auxiliaires,
Il est deux verbes originaux.
Avoir et Être étaient deux frères
Que j'ai connus dès le berceau.

Bien qu'opposés de caractères,
On pouvait les croire jumeaux,
Tant leur histoire est singulière.
Mais ces deux frères étaient rivaux

Ce qu'Avoir aurait voulu être,
Être voulait toujours l'avoir.
À ne vouloir ni dieu ni maître,
Le verbe Être s'est fait avoir.

Son frère Avoir était en banque
Et faisait un grand numéro,
Alors qu'Être, toujours en manque,
Souffrait beaucoup dans son ego.

Pendant qu'Être apprenait à lire
Et faisait ses humanités,
De son côté sans rien lui dire,
Avoir apprenait à compter.

Et il amassait des fortunes
En avoirs, en liquidités,
Pendant qu'Être, un peu dans la lune,
S'était laissé déposséder.

Avoir était ostentatoire
Lorsqu'il se montrait généreux,
Être en revanche, et c'est notoire,
Est bien souvent présomptueux.

Avoir voyage en classe Affaires.
Il met tous ses titres à l'abri.
Alors qu'Être est plus débonnaire.
Il ne gardera rien pour lui.

Sa richesse est tout intérieure:
Ce sont les choses de l'esprit.
Le verbe Être est tout en pudeur,
Et sa noblesse est à ce prix...

Un jour à force de chimères,
Pour parvenir à un accord,
Entre verbes ça peut se faire,
Ils conjuguèrent leurs efforts.

Et pour ne pas perdre la face
Au milieu des mots rassemblés,
Ils se sont répartis les tâches
Pour enfin se réconcilier.

Le verbe Avoir a besoin d'Être
Parce qu'être c'est exister.
Le verbe Être a besoin d'avoirs
Pour enrichir ses bons côtés.

Et de palabres interminables
En arguties alambiquées,
Nos deux frères inséparables
Ont pu être et avoir été.» (2)

Christophe Engels

(1) Merci, notamment, aux lecteurs néerlandophones, dont la présence nous est particulièrement chère.
(2) Duteil Yves, Avoir et être, extrait de l'album Chante Les Enfants, 2002, IFR.

samedi 12 février 2011

Commerce équitable. Objectif: court circuit.



«L’éthique
du
commerce
équitable
est
fondamen-
talement
une éthique
relationnelle
dans le sens
où elle donne
un visage concret
aux conséquences
des actes
des consom-
mateurs»(1),
interpellent
les économistes
Jérôme Ballet et Aurélie Carimentrand (2).
Ainsi s’agirait-il, autant que possible,
de rendre les communautés paysannes des régions du Sud
toujours plus «proches et chères».
Haro, donc, sur l’allongement des circuits!
Qui pourrait entraîner un déficit éthique.
Et, de là, nuire au mouvement du commerce équitable.


Outre le danger lié à la distribution (3), le commerce équitable est confronté à un péril plus global: celui des intermédiaires en général…

Circuit commercialement court : moins d’intermédiaires.

Un petit exemple valant souvent mieux qu’un long discours, choisissons celui du café bolivien…
«Certains intermédiaires-importateurs n’acceptent d’acheter une certaine quantité de café équitable qu’à la condition que leur soit fournie simultanément une quantité beaucoup plus grande de café standard à un prix en dessous du prix de marché, expliquent Aurélie Carimentrand et Jérôme Ballet.
De telles pratiques réduisent évidemment à néant les efforts faits par le commerce équitable puisque le gain pour les producteurs réalisés sur le café équitable est compensé par la perte subie sur le café non équitable.» (4)
L’épisode montre bien que les circuits longs tendent toujours à accroître le risque de vider de leur substance les garanties apportées aux consommateurs en matière d’équité.
Conséquence: pour se donner les meilleures assurances de succès, les acteurs du commerce équitable auraient tout intérêt à se mettre en position de contrôler toute la chaîne, de la production à la distribution.

Circuit géographiquement court : moins de distance.

Vivent les circuits courts, donc!
Au sens commercial de l’expression, bien sûr.
Mais aussi dans son acception géographique.
Car il conviendrait autant de réduire le nombre d’intermédiaires que de minimiser les distances parcourues...
- Côté commercial, les circuits courts contribueraient à atténuer les risques de pressions sur les prix, qui plus est -rappelons-le- à un double titre:
. d'une part en favorisant une visibilité forte qui tendrait à multiplier le nombre de consommateurs,
. d'autre part en évitant que les intermédiaires n’acquièrent ce rôle prépondérant qui leur permettrait, en définitive, d’imposer leur vues et de contrôler les filières.
- Côté géographique, les circuits courts se traduiraient notamment par des restrictions en matière de transports.
Mieux: sous peine d’incohérence, le premier objectif (commercial) n’irait pas sans le second (géographique).
Une analyse qui plaiderait en faveur d’un ralentissement des relations Nord-Sud, dominantes actuellement.
Histoire d’aller dans le sens d’un développement des relations Sud-Sud et Nord-Nord… (5)(6)

Christophe Engels (d’après Jérôme Ballet et Aurélie Carimentrand)

(1) Ballet Jérôme et Carimentrand Aurélie, Commerce équitable et durabilité institutionnelle, in Colloque organisé par la Chaire de responsabilité sociale et de développement durable les 19-21 juin 2006 (Montréal, Québec, Canada), p.21: http://www.crsdd.uqam.ca/.
(2) Université de Versailles Saint Quentin en Yvelines.
(3) Voir message précédent : «Commerce équitable. L’occasion fait le larron».
(4) Ballet Jérôme et Carimentrand Aurélie, Commerce équitable et durabilité institutionnelle, in Colloque organisé par la Chaire de responsabilité sociale et de développement durable les 19-21 juin 2006 (Montréal, Québec, Canada), p.13: http://www.crsdd.uqam.ca/.
(5) Ce message s’inspire d’un texte disponible sur le site www.crsdd.uqam.ca de la Chaire de responsabilité sociale et de développement durable de l’Université du Québec à Montréal (UQAM): Ballet Jérôme et Carimentrand Aurélie, Commerce équitable et durabilité institutionnelle, in Colloque organisé par la Chaire de responsabilité sociale et de développement durable les 19-21 juin 2006 (Montréal, Québec, Canada).
(6) Pour suivre (sous réserve d'éventuelles modifications de dernière minute):
. «Projet relationnel. Un an déjà…»,
. «Commerce équitable. L’envers du décor.»,
. «Commerce équitable. C’est une très bonne question…»...

mardi 8 février 2011

Commerce équitable. L’occasion fait le larron.

Dans la diffusion
des produits
du commerce équitable,
l'importance croissante
de la grande
distribution
ne va pas
sans risque.
Car l'occasion
fait le larron.
Et les mastodontes du secteur
pourraient donc être tentés
de profiter de leur position de force
pour dicter leurs conditions…

En grande surface plus encore que dans un magasin de produits biologiques, la crédibilité de l’information transmise par une marque est sujette à caution.
Un problème d'autant plus substantiel que beaucoup de consommateurs manquent déjà, au départ, de la connaissance de base qui leur permettrait de se poser les bonnes questions.
Nombreux sont-ils ainsi à ignorer que, d’un label à l’autre, le niveau d’exigence diffère.
Et rares sont-ils à savoir que le pourcentage d’ingrédients équitables varie en fonction des produits abordés.
Quant à ceux qui sont au parfum, comment arriveraient-ils à s’y retrouver dans le foisonnement des modalités particulières qui caractérisent la jungle des labels?
«Vingt-cinq pour cent d’intrants certifiés "Bio-équitable" suffisent à l’attribution de la marque pour un produit, précisent par exemple Aurélie Carimentrand et Jérôme Ballet, de l’Université de Versailles Saint Quentin en Yvelines.
Comparativement, le cahier des charges "Main dans la Main" exige que 50% des intrants soient issus d’une ou plusieurs de ses sept filières certifiées "Main dans la Main".» (1)

Certififié incompréhensible...

Source de confusion encore, source de confusion toujours, source de confusion plus que jamais.
Qui plus est susceptible de provoquer un effet d’éviction des «bons» labels par les «mauvais»...
De quoi, à nouveau (2), alimenter la suspicion du «consomm’acteur».
De quoi, derechef, nuire à l’accroissement de la demande.
De quoi, une fois de plus, contrarier, voire anéantir le développement de l’ensemble des filières de commerce équitable… (3)(4)(5)

Christophe Engels (d'après Aurélie Carimentrand et Jérôme Ballet)

(1) Ballet Jérôme et Carimentrand Aurélie, Commerce équitable et durabilité institutionnelle, in Colloque organisé par la Chaire de responsabilité sociale et de développement durable de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) les 19-21 juin 2006 (Montréal, Québec, Canada), p.5: http://www.crsdd.uqam.ca.
(2) Voir le message précédent : «Commerce équitable. La grande vadrouille.»
(3) Ce message s’inspire d’un texte disponible sur le site
http://www.crsdd.uqam.ca de la Chaire de responsabilité sociale et de développement durable de l’Université du Québec à Montréal (UQAM): Ballet Jérôme et Carimentrand Aurélie, Commerce équitable et durabilité institutionnelle, in Colloque organisé par la Chaire de responsabilité sociale et de développement durable les 19-21 juin 2006 (Montréal, Québec, Canada), p.5.
(4) Dans l'esprit des derniers messages publiés sur ce blog, la revue Éthique économique proposera sous peu un article de Corinne Gendron et Bernard Girard (respectivement titulaire et chercheur affilié à la Chaire de responsabilité sociale et de développement durable de lUQAM) consacré à "l'équité" du commerce équitable.
(5) Pour suivre (sous réserve d'éventuelles modifications de dernière minute):
. «Commerce équitable. Objectif : court circuit!»,
. «Projet relationnel. Un an déjà…»,
. «Commerce équitable. L’envers du décor.»,
. «Commerce équitable. C’est une très bonne question.».

vendredi 4 février 2011

Commerce équitable. La grande vadrouille.

Le commerce équitable se pose
en solution de rechange
aux échanges commerciaux inégaux.
Alternative?
Oui.
Mais alternative hétérogène,

sinon confuse.
Car la multiplication des règles et des labels ne va pas sans difficulté.
Pire: elle tend à enrayer la dynamique du mouvement.
Y a plus d’hélice, hélas!
C’est là qu’est l’os…
(1)

La définition consensuelle retenue par les quatre principales organisations du commerce équitable (2) fait la part belle aux impératifs moraux de justice et de solidarité.
Mais elle n’empêche pas la subsistance de nombreuses divergences portant sur l’interprétation de ces règles générales et sur le contrôle des droits économiques associés aux labels concernés.
D’où la création de nouvelles règles ayant vocation à encadrer les systèmes de production et les échanges.
Des règles multiples.
Portant par exemple sur le paiement d’un prix équitable.
Sur le soutien financier, technique et organisationnel aux producteurs.
Sur l’engagement à long terme.
Ou alors sur la transparence.
Autant de règles cristallisées dans des codes de conduite et dans des labels privés.
Que mettent au point différentes organisations.
D’où la multiplication de ces labels.
Et, par voie de conséquence, l’apparition de problèmes liés à l’institutionnalisation du commerce équitable.

«C’est TRES mauvais. Voilà!»

Le commerce équitable est donc aujourd’hui confronté au défi de son institutionnalisation.
En cause:
. l’unification des règles formelles ou non formelles qui régissent les relations entre les acteurs,
. la reconnaissance de la légitimité de ces règles.
«L’institutionnalisation de l’"innovation sociale" que représente le commerce équitable est d’autant plus délicate que les règles implicites sont interprétées et retranscrites de manière explicite à travers différents cahiers des charges, aux niveaux d’exigence variables, expliquent Aurélie Carimentrand et Jérôme Ballet, de l’Université de Versailles Saint Quentin en Yvelines (3).
Cette confusion risque de nuire au développement de l’ensemble des filières de commerce équitable.
Car en introduisant un facteur de suspicion, elle menace le développement de la demande des consommateurs.
Au point que, bientôt peut-être, ceux-ci en arriveront à poser la question qui tue.
Celle qui remettrait en cause l’opportunité de leur propre contribution.
Celle qui contribuerait à ébranler la légitimité même du système.
Celle qui en rappellerait une autre:
«De moi vous osez vous fouteer… ?!» (4).
Et qui forcerait, le cas échéant, à y aller d'un constat accablant:
«C’est TRES mauvais. Voilà!»(5)(6)

Christophe Engels (d'après Jérôme Ballet et Aurélie Carimentrand)

(1) Réplique culte de Bourvil et Louis De Funès dans le film «La Grande Vadrouille».
(2) Voir le message du 24 janvier 2011: «Commerce équitable. L'intention qui compte...
».
(3) Ballet Jérôme et Carimentrand Aurélie, Commerce équitable et durabilité institutionnelle, in Colloque organisé par la Chaire de responsabilité sociale et de développement durable de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) les 19-21 juin 2006 (Montréal, Québec, Canada), p.5: http://www.crsdd.uqam.ca/.
(4) Réplique du général allemand dans le film «La Grande Vadrouille».
(5) Réplique du chef d'orchestre (Louis De Funès) dans le film «La Grande Vadrouille».
(6) Ce message s’inspire d’un texte disponible sur le site http://www.crsdd.uqam.ca/ de la Chaire de responsabilité sociale et de développement durable de l’Université du Québec à Montréal (UQAM): Ballet Jérôme et Carimentrand Aurélie, Commerce équitable et durabilité institutionnelle, in Colloque organisé par la Chaire de responsabilité sociale et de développement durable les 19-21 juin 2006 (Montréal, Québec, Canada), p.5.

lundi 31 janvier 2011

Parole de lecteur. Eloge de la pluralité.

«C'est parfois dans les périodes
qui bougent le plus
qu'il faut prendre tout son temps
pour penser ce qu'il faut faire»,
nous écrit fort judicieusement
le sociologue et anthropologue français
Denis Duclos (1).
Qui renvoie à son site (2) pour nous adresser l'intégralité des mille pages d'un «livre électronique» dont il est le remarquable auteur (3).
Eloge de la pluralité...

Denis Duclos

Je vous adresse ce livre sur la défense de la pluralité en régime de société mondiale, sous forme électronique.
Il est aussi possible que vous l’ayez téléchargé de votre propre initiative.
Il ne sera probablement jamais publié en librairie, ce qui lui épargnera ce que Jacques Lacan appelait la poubellication (tout au moins physique).
Je vous demande d’essayer de le lire.
Je m’excuse auprès de ceux qui ne sauraient lire un livre à l’écran parce qu’il comporte plus de mille pages, ce qui, s’ils le font photocopier, leur reviendra au moins aussi cher que d’acheter un volume de cette taille en librairie.
Qu’ils se disent qu’ils ont évité ainsi une succession de petits livres, qui auraient eu l’inconvénient de disperser d’emblée un propos qui se prétend cohérent.
Je crois sincèrement y avoir rassemblé et approfondi quelques idées permettant d’envisager dans une perspective favorable un aspect crucial de la situation que l’espèce humaine (la nôtre, ne l’oublions pas!) est en train de produire et de subir.

Imagination créatrice

Cet aspect –le problème de la pluralité des cultures- ne se substitue pas aux classiques questions de l'inégalité entre les hommes, mais, dans une société mondialisée, il tend à passer au premier plan et à inclure les autres questions irrésolues, telle celle de l'injustice sociale et économique.
L'enjeu politique central pour les êtres humains vivant une unification planétaire de leurs sociétés (ne serait-ce que par le biais de la crise financière) devient -et deviendra toujours davantage- de savoir comment préserver liberté, intimité et solidarités de proximité à l'encontre des énormes forces de normalisatiion universelle.
Comme il ne s'agit pas de revenir aux particularismes nationaux il faudra bien faire preuve d'imagination créatrice.
Notons qu'il s'agit du problème inverse de celui qui a porté jusqu'ici des centaines de générations et qui était de produire et de conserver l'unité des peuples contre la tendance aux divisions ou aux querelles sanglantes et destructrices entre familles ou ethnies.
Cette orientation a porté progressivement ses fruits et, s'il reste encore à l’assurer et à la parfaire, nous pouvons dire que l'humanité «sait» désormais comment se rassembler et maintenir une organisation commune.
En revanche, elle n'a pas encore appris à protéger les différentes dimensions de la culture humaine contre leur propension à se fondre sous l'égide d'une passion dominante.
C'est là que commence la tâche de notre époque (et sans doute pour une longue période dans l'avenir).

Communication directe

C’est parce que cette conviction –bien trop ambitieuse aux yeux de ceux qui ne croient plus qu’à la spécialisation à outrance- n’est pas relayable par des éditeurs contraints à envisager une rentabilité impossible, que je me risque à cette forme de communication directe, un peu comme au XVIIIe siècle les auteurs tentaient de joindre désespérément des lecteurs, des souscripteurs ou des mécènes.
Il me semble un peu ridicule, à ce stade, de justifier de ma qualification à aborder un problème aussi vaste et aussi crucial, car, après tout l’un de mes héros, qui me précéda avec génie sur ce genre de chemin -Jean Jacques Rousseau- n’en disposait d’aucune assez officielle à son époque, mais je dirai tout de même, à l’adresse des lecteurs que cela peut rassurer, que cet ouvrage couronne une quarantaine d’années de métier de ce qu’on nomme aujourd’hui «chercheur», et cela comme anthropologue, et depuis 15 ans directeur de recherche au CNRS dans l’orbe (artificielle et inadéquate) de la science politique, métier que j’exerce encore avant une retraite aussi tardive que possible.

Méthode inédite

Je puis aussi arguer que ce travail impubliable n’est pas proposé comme exutoire à une incapacité, puisque j’ai déjà «commis» un certain nombre de livres et d’articles suffisamment reconnus (à mon goût) sur la place éditoriale pour me guérir de toute frustration.
Il ne s’agit donc pas d’une de ces poussées prophétiques tardives par lesquelles un auteur incompris, voire maudit, tente de défier l’approche de la mort sociale (et physique).
Mais bien plutôt d’une démarche qui se voudrait rationnelle en une époque où, pour se faire entendre sans être immédiatement emporté dans le brouillage médiatique, il faut peut-être explorer des méthodes inédites, dussent-elles ressembler à la classique «bouteille à la mer» de nos ancêtres naufragés.
Je ne sollicite aucune rémunération, bien qu’un soutien moral du projet que ce travail implique me serait évidemment agréable, en un temps où la multiplication des moyens de communiquer n’a d’égal que la raréfaction des échanges humains.
En revanche, je souhaiterais que, si l’ouvrage vous intéresse et vous paraît utile, vous en envoyiez des copies à des amis ou leur en conseilliez la lecture.
Il me semble normal, en ce cas, de recommander de ne pas modifier le texte que vous feriez circuler.
En cas de doute sur certains propos pouvant m’être imputés par des «correcteurs» bien intentionnés, ou encore par d’éventuels intervenants malveillants à mon égard, je vous demande de vous référer alors à la version la plus récente et seul original valide, qui est «entreposée» sur mon site personnel : www.geo-anthropology.com/, cet exemplaire téléchargeable faisant foi. Comme ce livre est un appel à la réflexion collective mais aussi à l’action –pour autant que les véritables changements commencent toujours par l’association improbable de «songe-creux»-, je reste évidemment à votre disposition pour tout lien (électronique ou réel) que vous souhaiteriez établir en ce sens.

Bien à vous,

Denis Duclos (duclos.denis@wanadoo.fr)

(1) Le sociologue et anthropologue français Denis Duclos est directeur de recherche au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS). Depuis quelques années, il travaille plus particulièrement sur le concept de «pluralité».
(2) http://www.geo-anthropology.com/Eloge-de-la-Pluralite-Conversation-entre-cultures-et-continuation-de-l-humanite_a48.html, dont nous reproduisons un extrait ci-dessus. Avec nos remerciements à l'auteur.
(3) Duclos Denis, Eloge de la Pluralité. Conversation entre cultures et continuation de l’humanité, 2010. Les titre, chapeau et intertitres sont de la rédaction.

vendredi 28 janvier 2011

Projet relationnel. Et de cent...

Et de cent…
Cent messages publiés.
Souvent avec la participation de contri-
buteurs exemplaires.
Toujours avec le concours d’inspira-
teurs de haut niveau.
Si une partie substantielle des sujets initialement annoncés a été traitée,
c’est sans conteste grâce à eux.
C’est aussi grâce à vous.
Vous qui nous rendez visite, régulièrement ou ponctuellement.
Vous qui nous lisez.
Vous qui, peut-être, allez nous aider à passer la vitesse supérieure…


Rappelons-le: c’est à concurrence de plusieurs milliers (1) que vous avez lu les messages de ce Projet relationnel.
Mieux: vous êtes toujours plus nombreux à le faire.
Pour un blog, qui plus est né il y a moins d’un an, c’est un résultat remarquable, nous dit-on.
D’autant que son approche est fréquemment plus «pointue», donc plus «exigeante», que celle des grands médias.

Le revers de la médaille…

Reste qu’à ce stade, l’audience de Projet relationnel demeure, malgré tout, insuffisante.
Car il n’a pas (encore?) atteint la masse critique qui permettrait de retenir l'attention des médias traditionnels, qu’ils soient écrits, radiophoniques ou audio-visuels.
Peu de relais de ce côté-là, donc.
Peu de relais, aussi, sur la toile: malgré quelques -très- notables exceptions (permanentes ou épisodiques), Projet relationnel reste insuffisamment référencé.
Autre bémol: la proportion de ceux qui, parmi vous, se manifestent est infime.
«Le niveau de qualité est tel qu’on n’ose pas trop participer», m’explique-t-on.
Toujours est-il qu’autant Projet relationnel suscite l'intérêt, autant il passe à côté du rôle de plate-forme escompté.
Rédhibitoire? Non, sans doute.
Mais peut-être révélateur.
Révélateur de la difficulté d’ouvrir l'angle de vision des différents mouvements de pensée émergents.
Dont on peut se demander si, trop souvent, ils n’ont pas une fâcheuse propension à opter pour la stratégie du vase clos.
Soit par confort cognitif.
Soit, le cas échéant, par volonté de se consacrer à la gestion de leurs différends internes.
Soit par choix délibéré de se focaliser exclusivement sur leurs propres outils, sur leurs propres préoccupations, sur leurs propres réflexions.

«Dispersion inouïe…»

Projet relationnel?
«Trop rationnel», estiment les uns.
«Pas assez braqué sur nos centres d’intérêt à nous», expliquent d’autres.
«Porteur d’un esprit de convergence qui charrie avec lui tous les périls liés à un affaiblissement de la critique sociale», renchérissent les suivants.
Fort bien.
Mais des auteurs prestigieux écrivent tout autre chose.
Ainsi le sociologue français Alain Touraine, auquel nous reviendrons.
Ou alors son confrère et compatriote Edgar Morin…
«Il existe déjà, sur tous continents, en toutes nations, un bouillonnement créatif, une multitude d'initiatives locales, dans le sens de la régénération économique, ou sociale, ou politique, ou cognitive, ou éducationnelle, ou éthique, ou de la réforme de vie, écrit, dans son dernier et tout récent livre (2), le chantre de la «complexité».
Mais leur dispersion est inouïe.
(Tout ce qui devrait être relié est séparé, compartimenté, dispersé).
Ces initiatives ne se connaissent pas les unes les autres, nulle administration ne les dénombre, nul parti n'en prend connaissance.
Mais elles sont le vivier du futur.
Le salut commencera par la base.
Il s'agit de les reconnaître, de les recenser, de les collationner, de les répertorier, et de les conjuguer en une pluralité de chemins réformateurs.
En chacun et en tous, il s'agit de relier, améliorer, stimuler.
Ce sont ces voies multiples qui pourront, en se développant conjointement, se conjuguer pour former la Voie nouvelle, laquelle altérerait et décomposerait la voie que nous suivons, et nous mènerait vers l'encore invisible et inconcevable Métamorphose.» (3)
Et le même penseur hexagonal d’ajouter…
«Dans toutes les sociétés civiles il y a multiplicité d'initiatives dispersées, ignorées des partis, des administrations, des médias.
Tout est épars, séparé, compartimenté.
Mais les reliances, développements et convergences des innombrables initiatives permettraient de frayer des voies qui convergeraient pour former La Voie.» (4)

Les coulisses de… l’ «exploit»!

Que les choses soient claires.
Mon investissement personnel est démesuré.
Et ma situation professionnnelle pas tous les jours facile.
Pour ceux -et, bien sûr, seulement ceux- d'entre vous que cette initiative relationnelle ne laisse pas indifférents, il ne s’agit donc pas simplement d’attendre.
De voir.
De se dire qu’il sera toujours temps de prendre le train en marche si le projet s’avère (encore?) plus porteur.
L’heure, au contraire, est au questionnement.
N’est-il pas temps de passer la vitesse supérieure?
De faire connaître ce Projet relationnel autour de vous?
En attendant, peut-être, de répondre présents à la deuxième phase de notre «Appel à projet relationnel»: celle qui, au-delà du contexte virtuel que vous savez, pourrait, si tout va bien, être lancée d’ici quelques mois.
Car en coulisses, le travail se poursuit…

Relationnellement vôtre,

Christophe Engels

(1) A peu près 5.000 (comptabilisés) depuis juillet dernier, soit sans doute 8 à 9.000 (extrapolation) depuis le "lever de rideau" de février 2010.
(2) Morin Edgar, La Voie. Pour l'avenir de l'humanité, Fayard, Paris, 2011.
(3) Morin Edgar, idem, p.34.
(4) Morin Edgar, idem, p.41.

lundi 24 janvier 2011

Commerce équitable. L’intention qui compte...

Juste prix et long terme:
deux objectifs majeurs
du commerce équitable.
Qui fait ainsi sécession
avec les us et coutumes
d’un capitalisme
trop souvent cynique et à courte vue.
Un ton plus bas,
la politique de pression sur les prix!
Du balai, la stratégie
de turn-over
appliquée aux fournisseurs!
Arrière,
la sacro-sainte maximisation des profits!
La contre-offensive de l’... autre intention a commencé.
L’intention qui compte.
Qui compte différemment...

Alternative au mode de fonctionnement actuel du capitalisme international, le commerce équitable?
Tel est en tout cas le projet qu’il s’assigne.
Histoire de construire un nouveau type de relation entre producteurs et consommateurs.
Place, ici, à des rapports de travail fondés sur l’intérêt partagé.
Sur le partenariat authentique.
Sur la confiance méritée.
Sur l’équité véritable...

Des mots pour le dire…

Pour ce faire, de nouvelles règles sont proposées.
Elles visent à organiser les échanges économiques autour d’une définition consensuelle.
Consensus international tout d'abord.
Consensus, aussi, liant ces quatre principales organisations du commerce équitable que sont IFAT (1), EFTA (2), FLO (3) et NEWS! (4).
Consensus formalisé enfin:
«Le commerce équitable s’entend comme un partenariat commercial fondé sur le dialogue, la transparence et le respect dans le but de parvenir à une plus grande équité dans le commerce international.
Il contribue au développement durable en offrant de meilleures conditions d’échanges et en garantissant les droits des producteurs et des travailleurs salariés, en particulier ceux du Sud.
Les organisations du commerce équitable s’engagent activement à soutenir les producteurs, à sensibiliser l’opinion publique et à mener des campagnes pour des changements dans les règles et les pratiques du commerce international conventionnel.
» (5)
Trop beau pour être vrai…? (6)(7)

Christophe Engels

(1) IFAT (International Federation for Alternative Trade) est une fédération qui rassemble 160 organisations de commerce équitable du Nord et du Sud : fédérations nationales de commerce équitable, ONG d’appui au commerce équitable, organisations de producteurs…
(2) EFTA (European Fair Trade Association) est une association regroupant douze importateurs européens.
(3) FLO (FAIRTRADE Labelling Organizations) est une ONG internationale qui réunit dix-neuf initiatives nationales de labellisation du commerce équitable : Fairtrade Mark (Irlande), Fairtrade Foundation (Grande-Bretagne), Förningen för Rättvisemärkt (Suède), Max Havelaar Belgium, Max Havelaar Fonden (Danemark), Max Havelaar France, Max Havelaar Norge (Norvège), Max Havelaar Stiftung (Suisse), Reilun Kaupan (Finlande), Sitchting Max Havelaar (Pays-Bas), Transfair Austria, Transfair Canada, Transfair Germany, Transfair Italy, Transfair Japan, Transfair Minka (Luxembourg) et Transfair USA (Etats-Unis).
(4) NEWS! (Network of European World Shops) est un réseau de quinze fédérations nationales de «magasins du monde» en Europe représentant plus de 2.500 magasins.
(5) FINE, Basis for improved co-operation in fair trade, FLO-IFAT-NEWS!-EFTA, 2001.
(6) Pour plus d'informations sur le commerce équitable, on se référera utilement au site de la Chaire de responsabilité sociale et de développement durable de l'Université du Québec à Montréal (UQAM): http://www.crsdd.uqam.ca/. Et en particulier à sa nouvelle page internet dédiée au commerce équitable: http://www.crsdd.uqam.ca/Pages/pagece.aspx.
(7) Pour suivre (sous réserve d'éventuelles modifications de dernière minute):
. «Projet relationnel. Et de cent…»
. «Commerce équitable. La grande vadrouille.»
. «Commerce équitable. Objectif : court circuit!»
. «Commerce équitable. L’occasion fait le larron.»
. «Commerce équitable. L’envers du décor.»
. «Commerce équitable. C’est une très bonne question…»
. «Projet relationnel. Un an déjà…»

mercredi 19 janvier 2011

Commerce équitable. Le juste prix.



Acheter équitable,
c’est opter
pour une politique
du «juste prix».
Juste
car calculé
en tenant compte
du petit producteur.
Et non plus seulement
en fonction
du gros intermédiaire
et du courtisé consommateur.



«Refusant l’équation prix juste égale prix le plus bas, le commerce équitable propose une approche régulationniste des échanges économiques.
Une approche dans laquelle la fixation des prix n’est pas laissée à une hypothétique main invisible, mais obéit au contraire à des règles établies à l’avance par les partenaires commerciaux.» (1)
Ainsi s’exprime l’altermondialiste et environnementaliste Charly Poppe (2).
Qui fait donc référence à l’instauration de «règles du jeu» spécifiques...

Par dessus le marché…

Ces règles doivent permettre de voir plus loin, dans le temps et dans «l'espace».
- Plus loin dans le temps tout d’abord.
Car ce dont il est question ici, c’est bel et bien d’une relation à long terme, fondée sur la prévisibilité des prix et des commandes.
- Plus loin dans «l'espace» ensuite.
C'est-à-dire au-delà de ce «terrain de je» qu'est le domaine étriqué de mes intérêts purement individuels et matériels de consommateur.
Il s'agit, de la part de l'intermédiaire bien sûr mais également dans le chef du «consomm'acteur» que je suis, de consentir à débourser un prix qui soit réellement rémunérateur pour le petit producteur.
Un prix qui couvre en tout état de cause
. aussi bien le coût de ses matières premières
. que ses coûts fixes
. et ceux de sa main d’oeuvre.
«Pour certaines denrées, notamment les matières premières agricoles telles la banane ou le café, les participants à la chaîne équitable fixent ensemble un prix minimum à payer au producteur, explique Poppe.
Le prix final payé au producteur correspondra alors au prix le plus avantageux entre le prix local, le prix du marché mondial et le prix défini a priori par les partenaires.» (1)
Par dessus le... marché (!), la rémunération équitable doit intégrer les «coûts cachés» de la production, à savoir
. le bien-être social des travailleurs
. et le respect de l’environnement.
«C’est dans cette optique qu’intervient la "prime de développement", fixée aux alentours de 10% du prix d’achat et destinée à être investie par exemple dans des infrastructures sociales, éducatives ou sanitaires ou dans l’amélioration de la qualité des produits.»
(1) C'est que le prix s’inscrit aussi, en définitive, dans une démarche plus globale de développement durable, avec la prise en compte de critères tels que
. le préfinancement (3),
. l’information des producteurs,
. le «renforcement des capacités»
. ou encore le soutien à la diversification économique.
Allo, tonton néolibéral? Pourquoi tu tousses…?

Christophe Engels

(1) Poppe Charly, Louvain (Revue bimestrielle de l’Université catholique de Louvain), n°162, avril 2006, p.20.
(2) Membre des Amis de la Terre - Europe.
(3) Pour éviter l’endettement des producteurs.

samedi 15 janvier 2011

Investissement solidaire et commerce équitable. Faits pour s’entendre…

Briser le carcan réductionniste
d’un «homo economicus»
aux visées fondamentalement,
voire exclusivement,
individualistes et matérialistes?
Un objectif commun
à la finance solidaire
et au commerce équitable.
Qui, pour autant, n’envisagent
ni l’une ni l’autre
de se contenter d’en appeler
à la solution de facilité
d'un processus de régulation
aussi traditionnel
que lacunaire.
Décidément, ces deux-là
sont faits pour s’entendre…


Finance solidaire et commerce équitable, même combat?
Oui, estiment bon nombre d’économistes. Dont le directeur d’une coopérative de crédit social belge (1), Michel Genet…
«Finance solidaire et commerce équitable sont le fait de citoyens qui, tout en s’intégrant dans le cadre d’une économie de marché, ont voulu aménager celle-ci pour y insuffler des valeurs qui, d’habitude, dépassent l’Homo economicus.» (2)
D’un côté, donc, un épargnant solidaire qui, loin de se borner à maximiser le return immédiat de son investissement, accorde aussi une importance déterminante à la perspective de son impact sur la cohésion sociale ou l’environnement…
Et de l’autre, un consommateur-citoyen qui, faute de se satisfaire de maximaliser son utilité, entend intégrer dans son acte d’achat une dimension d’équité et d’aide au développement …

Proximité de motivation

Pour Genet, l’émergence des deux mouvements renverrait à une seule et même explication: la déficience de la régulation dans son rôle de grand ordonnateur des marchés.
Ainsi, le succès des placements solidaires se serait construit en réaction à l'incapacité affichée par les pouvoirs publics de contrer une évidente «mauvaise volonté»: celle mise par les entreprises à prendre leurs responsabilités face aux effets secondaires (3) de leurs opérations économiques, tant sur le plan social qu’en matière environnementale.
Quant à la montée en puissance du commerce équitable, elle s’enracinerait dans le terreau d’une indignation: celle née de l’impossibilité manifeste de brider la croissance des inégalités entre acteurs du marché, les plus forts persistant à imposer des rapports d’échange toujours plus défavorables aux «petits».

Proximité d’enjeu

Deuxième type de proximité: celle des enjeux.
Finance solidaire et commerce équitable sont en effet confrontés à un risque de perversion similaire.
Perversion, d’une part, liée à une récupération par les banques de la notation éthique de leurs fonds d’investissement, l’option de l’internalisation permettant de mettre sur la touche ces «empêcheuses de tourner en rond» que sont les agences indépendantes.
Perversion, d’autre part, découlant du lancement (4) de labels bien moins ambitieux que leurs prédécesseurs.

Proximité de terrain

Proximité des motivations et des enjeux, donc. Mais aussi proximité de terrain.
Car désormais, les institutions de finance solidaire comptent parmi leurs clients des organisations de commerce équitable...
«Crédal, par exemple, a financé des acteurs aussi importants que Max Havelaar, Oxfam, Magasins du Monde ou encore Citizen Dream, confie notre guide. Il apparaît maintenant évident que l’objectif de rendre l’économie plus citoyenne ne pourra être atteint qu’en coalisant ces forces afin de sensibiliser un maximum de citoyens. Un monde plus juste est à ce prix.» (2)

Christophe Engels

(1) Crédal.
(2) Genet Michel, L'investissement solidaire: l'argent équitable, Louvain (Revue bimestrielle de l’Université catholique de Louvain), n°162, avril 2006, p.26.
(3) Les économistes parlent d’«externalités», une notion initialement proposée par A. Marshall pour désigner l’impact d’une opération économique entre A et B sur un facteur C qui n’était pas a priori concerné.
(4) Notamment par des grands toréfacteurs privés.

vendredi 14 janvier 2011

Actu. Partie remise?

Mauvaise nouvelle:
l’émission «3D» qui devait réunir
Stéphane Hessel, Edgar Morin et Claude Alphandéry (1)
le 16 janvier est annulée.

L’actualité du Maghreb commande finalement à France Inter et à Stéphane Paoli de se consacrer à la Tunisie le dimanche 16 janvier, de 12h à 13h.
Exit, donc, l'émission annoncée sous le titre «Après l’indignation vient le temps des résistances».
Et annulé, en définitive, ce rendez-vous fixé autour de l’économie sociale et solidaire.
Dommage, même si l'importance majeure et même historique des événements d'outre-Méditerranée suffit bien-sûr amplement à justifier un tel changement de programme.

(1) Lire notre précédent message.

mardi 11 janvier 2011

Actu. Appel à indignation de Stéphane Hessel. Papy fait de la résistance!



«Après l’indignation
vient le temps
des résistances»:
le débat organisé
par Stéphane Paoli
dans le cadre du prochain numéro (1)
de son émission «3D»,
sur France Inter,
est riche de promesses.
Non seulement parce que
l’économie sociale et solidaire
y sera à l’honneur.
Mais aussi parce que seront réunis
pour la circonstance
Claude Alphandery (2),
Edgar Morin (3)
et Stéphane Hessel (4).
L'occasion, ici, de rendre hommage au troisième nommé.
Dont le dernier ouvrage, «Indignez-vous!» (5),
rencontre un succès époustouflant (6)...
et rafraîchissant!
Défense et illustration de la langue citoyenne...

Stéphane Hessel

«On ose nous dire que l’État ne peut plus assurer les coûts de ces mesures citoyennes.
Mais comment peut-il manquer aujourd’hui de l’argent pour maintenir et prolonger ces conquêtes alors que la production de richesses a considérablement augmenté depuis la Libération, période où l’Europe était ruinée?
Sinon parce que le pouvoir de l’argent, tellement combattu par la Résistance, n’a jamais été aussi grand, insolent, égoïste, avec ses propres serviteurs jusque dans les plus hautes sphères de l’État.
Les banques désormais privatisées se montrent d’abord soucieuses de leurs dividendes, et des très haut salaires de leurs dirigeants, pas de l’intérêt général.
L’écart entre les plus pauvres et les plus riches n’a jamais été aussi important; et la course à l’argent, la compétition, autant encouragée.

Dictature des marchés financiers: tous dans le maquis!

Le motif de base de la Résistance était l’indignation.
Nous, vétérans des mouvements de résistance et des forces combattantes de la France libre, nous appelons les jeunes générations à faire vivre, transmettre, l’héritage de la Résistance et ses idéaux.
Nous leur disons: prenez le relais, indignez-vous!
Les responsables politiques, économiques, intellectuels et l’ensemble de la société ne doivent pas démissionner, ni se laisser impressionner par l’actuelle dictature internationale des marchés financiers qui menace la paix et la démocratie.

Militants de l'Histoire...

Je vous souhaite à tous, à chacun d’entre vous, d’avoir votre motif d’indignation.
C’est précieux.
Quand quelque chose vous indigne comme j’ai été indigné par le nazisme, alors on devient militant, fort et engagé.
On rejoint ce courant de l’histoire et le grand courant de l’histoire doit se poursuivre grâce à chacun.
Et ce courant va vers plus de justice, plus de liberté, mais pas cette liberté incontrôlée du renard dans le poulailler.
Ces droits, dont la Déclaration universelle a rédigé le programme en 1948, sont universels.
Si vous rencontrez quelqu’un qui n’en bénéficie pas, plaignez-le, aidez-le à les conquérir.» (7)

Stéphane Hessel

(1) Diffusion en direct le dimanche 16 janvier 2011, de 12h00 à 13h00.
(2) Ancien résistant, économiste, militant communiste... et banquier, Claude Alphandery a développé le réseau France Active de finance solidaire.
(3) Directeur de recherche émérite au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), le sociologue Edgar Morin est surtout connu pour avoir développé un concept de «complexité» qui lui a valu d'être nommé docteur honoris causa de plusieurs universités à travers le monde.
(4) Stéphane Hessel, né à Berlin en 1917, a vécu à Paris à partir du milieu des années 1920. Arrêté par la Gestapo pour ses activités dans la Résistance, il a été déporté à Buchenwald. A la Libération, il a occupé divers postes diplomatiques. Un contexte qui lui a permis de participer à la rédaction de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme adoptée le 10 décembre 1948 par l’Assemblée Générale des Nations Unies.
(5) Hessel Stéphane, Indignez-vous!, Indigène éditions, Montpellier, 2010.
(6) Plus de... 500.000 exemplaires vendus avant lancement, tout début janvier, d'un nouveau tirage de 300.000 unités!
(7) Extrait de Hessel Stéphane, Indignez-vous!, ibidem, p.11. Les titre, chapeau et intertitres sont de la rédaction.