Ce qui
est en jeu dans «l’utopie relative» populaire?
répond Michel Maffesoli (1).
Qui parle aussi d’ajustement tragique à ce qui est.
Et de sentiment.
Michel Maffesoli
La politique moderne qui est, on le sait, la forme profane de la religion chrétienne, est obsédée par le «changement».
Il n’est pas
certain que ce soit le principe caché étant à l’œuvre dans la vie sans qualité
des peuples.
A l’œuvre dans cette nappe phréatique invisible, qui au-delà ou
en-deçà du simple social, sustente ce qu’il est convenu d’appeler le sociétal.
Au-delà du changement
Certes, il y a au fondement de tout être-ensemble une effervescence génératrice, mais ce n’est ni le changement, ni l’attitude conservatrice qui la meut.
Certes, il y a au fondement de tout être-ensemble une effervescence génératrice, mais ce n’est ni le changement, ni l’attitude conservatrice qui la meut.
Pour le
dire au travers de quelques images: ni la flèche du temps progressiste, ni le
cercle réactionnaire.
Un
terme anglais utilisé par la marine serait plus juste: «Rhumb»,
désignant l’aire des vents. Il vient du grec «Rhumbos»: rotation, ou
«Rhumbon»: circonvolution en spirale.
C’est bien cela
qui est au cœur de la sagesse des peuples, l’acceptation, voire le désir de la
rotation en spirale.
Pour le dire en d’autres termes, appétence pour ce qui
advient, ce qui naît, ou plutôt renaît, à partir d’ancestrales racines.
L’enracinement dynamique.
Effrayante vérité
Et
c’est cette conjonction de choses opposées que le politique moderne ne peut
pas, ne veut pas admettre.
On pourrait ici lui appliquer une remarque de Joseph
de Maistre, si on manque à la vérité, c’est que l’on a «une peur mortelle de la rencontrer».
Chamboulement? Changement? Statu quo?
Non, non et non!
Oui, peur d’être obligé de mettre à bas nos dogmes sécurisants.
Non, non et non!
Oui, peur d’être obligé de mettre à bas nos dogmes sécurisants.
Peur mortelle
d’abandonner la bien-pensance.
Peur qui, ne permettant pas d’évaluer la force
du feu générateur animant, avec constance, l’existence, ne peut en rien prévoir
les incendies qui, lorsque ce feu n’est pas régulé, enflamme régulièrement le
corps social.
L’enjeu, on le voit, est donc de taille: ni chamboulement
révolutionnaire, ni changement réformiste, ni statu quo mortifère.
Ni aveugle ni obscurantiste
Ce qui est en jeu dans «l’utopie relative» populaire, c’est donc une sorte d’ajustement tragique à ce qui est.
Ce qui est en jeu dans «l’utopie relative» populaire, c’est donc une sorte d’ajustement tragique à ce qui est.
Un savoir-vivre qui, sur la longue durée, a assuré la
perdurance de l’espèce humaine.
C’est ce sentiment tragique de l’existence, sentiment,
bien entendu, plus vécu que pensé, qui permet de comprendre une ambiguïté, à
moins que ce soit une ambivalence, propre à toute vie collective.
Ambiguïté/ambivalence fondatrices caractérisant bien ce clair-obscur qu’est toute
existence: ni l’aveuglement des «lumières» progressistes, ni l’obscurantisme
du blocage
révolutionnaire. (2)(3)
Michel Maffesoli
(A suivre)
Michel Maffesoli
(1) Membre de l’Institut universitaire de
France et professeur à la Sorbonne, directeur du Centre d’études
sur l’actuel et le quotidien (Paris-V), Michel Maffesoli est l’auteur,
entre autres, de La Part du diable (Flammarion, 2002), du Réenchantement
du monde (La Table ronde, 2007) et de Homo eroticus, des communions
émotionnelles (CNRS Éditions, 2012).
(2) Ce message est extrait d'un document de 24
pages qui nous a été envoyé par Michel Maffesoli sous l'intitulé L'Opéra-Bouffe
du Politique. Nous le publions ici avec l'accord explicite de l'auteur et
par parties. Avec, aussi, tous nos remerciements. Et en précisant que les titre, chapeau et intertitres sont de la rédaction.
(3) Pour suivre (sous réserve d’éventuelles
modifications de dernière minute) :
. «Politique. Le sens de l'ordinaire.» (Michel Maffesoli)...
. «Politique. Le sens de l'ordinaire.» (Michel Maffesoli)...
La Solution
«Après l'insurrection du 17 juin,
Le secrétaire de l'Union des écrivains
Fit distribuer des tracts dans la Stalinallee.
Le peuple, y lisait-on, a par sa faute
Perdu la confiance du gouvernement
Et ce n'est qu'en redoublant d'efforts
Qu'il peut la regagner.
Ne serait-il pas
Plus simple alors pour le gouvernement
De dissoudre le peuple.
Et d'en élire un autre?»
Fit distribuer des tracts dans la Stalinallee.
Le peuple, y lisait-on, a par sa faute
Perdu la confiance du gouvernement
Et ce n'est qu'en redoublant d'efforts
Qu'il peut la regagner.
Ne serait-il pas
Plus simple alors pour le gouvernement
De dissoudre le peuple.
Et d'en élire un autre?»
Brecht Bertolt, La Solution, 1953.
Mesdames, Messieurs,
RépondreSupprimerLe CeaQ vous invite à la rencontre Fashion & Modernity, conférence de Djurdja Bartlett (University of Arts London) le jeudi 7 mars en Sorbonne (salle des thèses E637) à 15h avec la participation de Stéphane Hugon, Najva Esfahani, Emilie Coutant. Coordination Fabio La Rocca, Antonio Rafele.
Belgique
RépondreSupprimerEt voici le dernier auteur du Prix Première 2013
Alexandre POSTEL : L’homme effacé (Gallimard)
Damien North est professeur de philosophie dans une université cossue. Veuf, il mène une vie triste et solitaire. Mais un jour, il est embarqué par la police qui l'accuse d'avoir téléchargé sur son ordinateur des images provenant d'un réseau pédophile... L'affaire fait grand bruit, d'autant que Damien est le petit-fils d'Axel North, figure politique historique.
L'inculpé a beau se savoir innocent, chacun se souvient d'un geste, d'une parole qui, interprétés à la lumière de la terrible accusation, deviennent autant de preuves à charge. Même une banale photo de sa nièce, unique enfant de son entourage, ouvre un gouffre d'horribles suppositions. Le terrible engrenage commence tout juste à se mettre en marche.
Alexandre Postel décrit avec acuité la farce des conventions sociales, les masques affables sous lesquels se cachent le pouvoir, la jalousie ou le désir de nuire – et les dérives inquiétantes d'une société fascinée par les images.
La Première