mardi 17 février 2015

Djihadisme. «Je prie. Moi non plus.»




  

Islam?
Quel islam?
Ce qui explique 
le djihadisme
c'est moins 
le communautarisme 
que 
la désocialisation. 
Estime, 
pour Les inRocks
le sociologue 
et philosophe 
français 
Raphaël Liogier.
Extraits. 



Qui est le «client»  type 
du djihadisme?
Pour Raphael Liogier (1)
pas de doute...
C'est l'individu 

qui se sent moins intégré.
Fragile.
Minoritaire. 
Celui-là même 
qui donne l'impression 
de pouvoir être «récupéré»
«On lui dit: tu es un héros, tu n’es pas rien, tu es beaucoup plus que les autres, tu as été choisi mais tu ne le savais pas...
Il se trouve que, pour les raisons que j'évoque dans "Le Mythe de l’islamisation" (2), l’Europe est devenue un lieu stratégique de ce renversement du stigmate.
En raison aussi de "Ce populisme qui vient" (3) et qui est maintenant bien là. 
Les partis populistes européens utilisent les valeurs du Vieux Continent pour dire qu’elles sont attaquées par l’islamisation rampante.
Ils surfent et nourrissent cette angoisse collective identitaire qui existe depuis le début des années 2000.» 

Islam? Quel islam? 

Il est vrai que, au cours de la décennie précédente, le «camp d'en face» s'était radicalisé.
Au travers de l'islam, dit-on...
«Farhad Khosrokhavar parlait d’islamisme sans islam. 
Moi, je parle de djihadisme sans même l’islamisme, et donc a fortiori sans islam.» 
Pourquoi sans islamisme?  
Parce que les djihadistes ne passent même pas par un endoctrinement politique construit.
«Ils sautent directement dans la case djihad, sans passer par la case islam, car ils ont préalablement ce désir de violence. 
Vingt pour cent d’entre eux ne sont même pas nés dans un milieu "théoriquement musulman". 
Les 80 % restants? 
Là, ce sont des musulmans qui sont touchés.
Mais des musulmans théoriques.
C'est-à-dire qu'ils le sont par l’origine.
Et qu'ils vivent en général dans un milieu très peu pratiquant. 
Des exemples?
Avant de devenir des professionnels du djihad, les frères Kouachi buvaient de l’alcool, Amédy Coulibaly faisait des casses, Mohamed Merah se rêvait militaire d’élite… 
Autant de rêves déchus d’adolescents.
Autant de jeunes qui n’ont pas réussi leur processus d’individuation.
Autant d'individus qui ne trouvent pas de place.

Et qui se retrouvent complètement désocialisés. 
Y compris par rapport à leur communauté d’origine.»

Les bons comptes font les bons ennemis

Ce qui animerait fondamentalement les jeunes en question, ce serait donc une envie de vengeance.
Le djihadisme ne serait qu'une façon de régler leurs comptes avec une société qui  «oppresse»
Et, de là, le moyen de justifier un désir de pure violence, nourrie de frustration.
A l'origine de ces soldats de l’islam, il n’y aurait donc aucun système d’endoctrinement.
Seulement un processus d’entraînement. 
«Ils adoptent tout de suite les slogans. 
Ils ne découvrent l’islam qu’après être devenus des djihadistes, parce que cela fait partie de la panoplie.»


Extraits de Liogier Raphaël, Le djihadisme ne vient pas du communautarisme mais de la désolcialisation, in Les inRocks, 7 février 2015 (propos recueillis par Jean-Marie Durand).


(1) Né en 1967 et diplômé en philosophie de l'Université d'Edimburgh et l'Université de Provence, Raphaël Liogier est aujourd'hui professeur des universités à l'Institut d'études politiques d'Aix-en-Provence, où il dirige l’Observatoire du religieux depuis 2006. Il enseigne par ailleurs au Collège international de philosophie de Paris.
(2) Liogier Raphael, Le mythe des civilisations, essai sur une obsession collective, Seuil, Paris, 2012. 
(3) Liogier Raphael, Ce populisme qui vient, Textuel, Paris, 2013. 
 

1 commentaire:

  1. Voici la présentation de la dernière production
    de Culture & Démocratie…


    Neuf essentiels pour l'éducation artistique et culturelle

    «Neuf essentiels» est une initiative éditoriale de Culture & Démocratie qui consiste en la compilation, introduite et commentée, de notices bibliographiques concernant des ouvrages incontournables pour qui veut s'informer sur un sujet d'actualité qui touche à la culture et/ou à la démocratie.

    Ces Neuf essentiels pour l’éducation artistique et culturelle présentent, en introduction, la synthèse des observations et des analyses conduites par Culture & Démocratie sur la question depuis plus de dix ans.

    Déficit d’éducation artistique et culturelle : l’expression ne suffit pas à décrire la situation d’un système éducatif qui, pour des raisons d’efficience supposée, fait l’impasse sur les contenus de savoir, les compétences et les pratiques relevant de l’artistique et du culturel. Cet ouvrage collectif, réalisé sous la direction de Sabine de Ville, reprendra toutes les raisons qui conduisent à penser cette éducation artistique et culturelle à l’aune de considérations politiques (droits culturels), philosophiques (appréhension du symbolique, émancipation personnelle) et pédagogiques (et si ce champ disciplinaire avait la capacité de construire des compétences nouvelles, capables de réenchanter/réaménager toute l’expérience scolaire ?).

    Les ouvrages référencés traiteront de la culture, de la médiation culturelle, des relations culture/création et enseignement, des résidences d’artistes, de l’éducation à l’image et plus généralement des enjeux politiques, philosophiques et pédagogiques de l’éducation artistique et culturelle.



    Cet ouvrage n'est actuellement disponible qu'au format numérique, mais nous sommes à la recherche de fonds afin de pouvoir l'éditer au format papier.

    > http://www.cultureetdemocratie.be/documents/9essentiels_pour_leducation_artistique_et_culturelle.pdf

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