samedi 20 juillet 2013

Taxe sur les Transactions Financières. Taxée-coulée?




Qui, de plus en plus, se voit ainsi réduite 
à la portion congrue.
A tel point que
en arrive désormais à être... taxée (!) d'irréalisme
par le ministre des Finances en personne!
Taxée-coulée, la T.T.E.?

Deuxième semestre 2012.
Conformément au septième engagement du programme du candidat Hollande, l'idée d'une  Taxe sur les Transactions Financières (T.T.F.) est relancée à l'échelon européen.
Et ce malgré le blocage de la Grande-Bretagne, de la Suède et du Luxembourg.
A la manoeuvre: la France donc, mais aussi la grande Allemagne, la petite Belgique et huit autres pays: l'Autriche, l'Espagne, l'Estonie, la Grèce, l'Italie, le Portugal, la Slovaquie et la Slovénie.

Maillon faible ?

Février 2013.
La commission chargée du marché intérieur présente le résultat de ses travaux.
Largement inspirée par la réglementation française (1), elle suggère d'imposer 
. les actions et les obligations à raison de 0,1 %,
. les produits dérivés à concurrence de 0,01 %.
Recette attendue: 35 milliards d'euros par an pour les onze pays engagés (2).
Oui, mais...
Dans l'Hexagone comme ailleurs, ni le patronat ni le secteur bancaire n'ont dit leur dernier mot.
Le premier joue de tout son poids pour s'opposer à un projet «qui affaiblira gravement la compétitivité des entreprises» (3).
Et le second, également debout sur les freins, abreuve son argumentation à la source d'une étude made by Goldman Sachs...
. Une étude opportunément sortie en mai.
. Une étude que le monde bancaire européen s’empresse de diffuser largement.
. Une étude qui a vocation à diaboliser le principe de la T.T.F. en lui prêtant des effets dévastateurs.
Reprendre la directive européenne?
Vous n'y pensez pas...
 . D'abord, les financements de l’économie en général et des P.M.E. en particulier s'en trouveraient gravement compromis.
. Ensuite, la préservation de la place de Paris ne pourrait que pâtir d’un tel dispositif, a fortiori si Londres se refuse à appliquer la même taxe.
. Enfin, les mesures envisagées nuiraient irrémédiablement au placement des obligations souveraines et au refinancement de la dette française.
Trois objections qui, déclinées à toutes les sauces, se voient sans surprise relayées par un lobbying puissant et efficace.
D'autant plus efficace, d'ailleurs, que, suite la démission de ce détenteur du portefeuille du Budget qu'a été Jérôme Cahuzac, c'est le ministre des Finances qui a pris la main dans les négociations.
Un maillon faible?
Pierre Moscovici, en tout cas, a déjà laissé peser de lourds soupçons sur sa perméabilité aux pressions financières en acceptant de réduire aux acquêts sa loi sur la séparation des banques...

Arrière, toute !

De quoi inquiéter les adeptes de la T.T.F.
Dont les craintes trouvent rapidement matière à renforcement.
Dès le mois d'avril en effet, la position française amorce un changement d'orientation manifeste. 
Et le 11 juillet, Moscovici en arrive à confirmer officiellement le bien-fondé de ce qui, jusque-là, était resté implicite.
«La Taxe sur les Transactions Financières suscite des inquiétudes renvoyant à l'avenir industriel de la place de Paris et au financement de l'économie française, annonce le ministre.
Sa mise en œuvre rencontre de nombreux obstacles et de nombreuses questions.»
Cette fois, le doute n'est plus permis: la France fait bel et bien marche arrière sur la T.T.F.
Après le temps de la récupération de feu la Taxe Tobin (ou Robin des Bois), voici donc venu celui de l'évanescence pour sa remplaçante.
Sauf (plus qu')improbable revirement de situation, le fait de renoncer à tout lien avec la dette des pays du Tiers-Monde n'aura donc pas suffi.
La perspective de l'évaporation pure et simple semble de plus en plus inéluctable.
Au grand dam de ceux qui, dans la société civile, portent ce projet à bout de bras. 
Tel le mouvement altermondialiste.
Ou le Collectif Roosevelt... 

(1) En février 2012, le Parlement a adopté le principe d’une taxation financière de 0,1 % sur les échanges d'actions des sociétés dont la capitalisation boursière dépasse 1 milliard d'euros et dont le siège social est en France.
(2) Dont sept milliards pour la France
(3) Ce qui, en France, vaudra au ministre de l'Economie une «mise en garde» publique de six associations professionnelles, dont le Médef.




Créer une vraie Taxe sur les Transactions Financières 

Si une telle taxe avait été créée en 2008, même à un taux très faible, elle aurait déjà rapporté entre 250 et 600 milliards. 
La crise grecque aurait pu être réglée très vite, sans demander d’efforts aux peuples d’Europe. 
Qu’attendons-nous pour créer enfin cette taxe et rassurer le peuple allemand comme les autres peuples d’Europe en leur disant que c’est la dernière fois qu’on leur a demandé un effort injuste? 
Dorénavant, ce sont les marchés financiers qui seront mis à contribution pour abonder le Fonds européen de Stabilité. 
Si Londres s’oppose à la création d’une taxe sur les transactions, il faut sans agressivité "mettre les points sur les i" et avoir le courage de déclencher une crise clarificatrice: 
Les émeutes de l’été 2010 ont montré que le peuple anglais n’en peut plus des politiques d’austérité. 
La dette privée du Royaume-Uni dépasse les 230 % du PIB (1) contre 130 % en France. 
Et si l’on intègre la dette publique et surtout l’immense dette du secteur financier, la dette totale de la Grande-Bretagne dépasse les 900 % du PIB (2)
C’est dire l’extrême fragilité du "modèle anglais". 
Dans 2 mois ou dans 2 ans, les Anglais viendront supplier l’Europe de les aider pour sauver leurs banques. 
Il faut leur mettre le marché sur la table et leur dire que c’est aujourd’hui qu’ils décident si, Oui ou Non, ils sont dans le même bateau que les autres peuples d’Europe. 
Ils ne pourront pas nous supplier d’être solidaires demain s’ils refusent d’être solidaires aujourd’hui. 
Si les Anglais comprennent que, de fait, nous avons tous intérêt à être solidaires, nous pouvons mettre en place très vite une taxe Tobin à un taux assez élevé. 
Sinon, nous pouvons le faire au niveau de la zone euro, avec un taux plus faible. 
La mise en place d’une Taxe sur les transactions financières est tout à fait réaliste au niveau de la seule Zone Euro (même M. Barroso l’admet aujourd’hui) mais elle serait plus efficace et aurait un rendement nettement plus élevé si elle était mise en place simultanément dans l’ensemble de l’Europe ou dans l’ensemble des places financières mondiales. 
Comme tous nos États ont besoin de dégager des ressources nouvelles (3), tous les dirigeants du G 20 devraient mettre en œuvre cette taxe sur les transactions financières sans tarder. 

(1) Dette des ménages et dette des entreprises hors secteur financier. 
(2) Source Morgan Stanley Décembre 2011 
(3) «La Chine voit son économie ralentir et fait face à un grand nombre de mouvements sociaux» annonce Le Monde du 6 décembre 2011. 
Aucun pays n’est épargné par le retour de la crise. 
Aucun pays ne peut dire qu’il n’a pas besoin de ressources supplémentaires. 
C’est le seul intérêt de la période: nous sommes tous embarqués dans la même crise. 



Créer une vraie taxe sur les transactions financières internationales 

L’idée de taxer les transactions financières internationales s’inspire de l’idée initiale du prix Nobel d’économie James Tobin, qui proposait au début des années 1970 de taxer à un faible taux toutes les transactions de change à l’échelle mondiale. 
Depuis lors, la proposition a été élargie à la taxation de toutes les transactions financières internationales, ce qui permettrait de mobiliser chaque année environ 500 milliards d’euros. 
L’avantage d’une telle taxe est qu’elle pénalise les transactions à court terme, qui sont les plus spéculatives, mais quasi pas les transactions à long terme, plus utiles pour le financement de l’économie réelle et de la création d’emplois. 
En outre, une telle taxe permettrait non seulement de « mettre un grain de sable dans les rouages de la finance internationale », mais aussi de mobiliser des moyens importants pour les recettes publiques. 
De nombreux pays dans le monde appliquent déjà une taxe similaire. 
Parmi les membres du G20, 11 pays sont concernés dont le Royaume-Uni, la Corée du Sud, Hong Kong, pour les transactions sur les actions, l’Inde et Taïwan pour les produits dérivés, la Suisse et le Brésil pour les obligations. 
Au Royaume-Uni, le droit de timbre, qui date de 1986 dans sa forme actuelle mais existait sous d’autres formes bien avant, équivaut à 0,5 % du montant de la transaction. 
Cet impôt porte sur les actions de sociétés britanniques quelle que soit leur place de cotation, les actions de sociétés étrangères cotées au Royaume-Uni, les options sur actions, les droits de souscription d’actions et toute autre forme de produits adossés à des actions. 
La mise en place d’une taxe sur les transactions financières (TTF) est tout à fait réaliste au niveau de la seule Zone Euro, mais elle serait plus efficace et aurait un rendement nettement plus élevé si elle était mise en place simultanément dans l’ensemble de l’Europe ou, mieux, dans l’ensemble des places financières mondiales. 
Comme tous nos États ont besoin de dégager des ressources nouvelles, tous les dirigeants du G20 devraient mettre en œuvre cette taxe sur les transitions financières sans tarder. 
Au niveau européen, l’Ecofin, le conseil des ministres des Finances de l’Union européenne (UE), a donné le feu vert à 11 pays qui ont décidé de l’appliquer selon la procédure de coopération renforcée. 
Les 11 pays participants sont l’Autriche, la Belgique, l’Estonie, la France, l’Allemagne, la Grèce, l’Italie, le Portugal, la Slovaquie, la Slovénie, et l’Espagne. Ils représentent environ 90% du PIB de la zone euro. 
Cette initiative rapportera entre 10 et 37 milliards d’euros par an, selon les estimations. 
Selon les propositions de la Commission, la TTF frapperait toutes les transactions effectuées entre institutions financières (banques, bourses, fonds de placement, assurances, hedge funds) à hauteur de 0,1% et celles liées aux produits dérivés de 0,01%. 
Il faut aller plus loin. 
Ainsi, pourquoi limiter à 0.01% la taxe sur les transactions liées aux produits dérivés, alors que ces produits ont justement montré le risque qu’ils pouvaient représenter
Il faut cibler la spéculation à court terme qui ne présente aucun intérêt pour l’économie réelle et exacerbe au contraire l’instabilité financière. 
Dans ce but, une taxe à taux variable, comme proposée dans la loi adoptée par le Parlement belge en juillet 2004, permettrait d’augmenter le taux de la taxe en cas de fluctuations importantes, ce qui renforcerait son caractère régulateur.