vendredi 18 novembre 2016

Trump chante Cohen. Eh, bien! Dansez maintenant...



















De France (surtout),
des U.S.A. (de plus en plus), 
de Belgique (bon troisième), 
d'un peu partout (1)... 
Grand merci 
d'être toujours 






















(1) Allemagne, Russie, Pologne, Emirats arabes unis, Canada, Royaume-Uni, Ukraine...
(2) Ce qui se traduit par une progression avoisinant le un à cinquante en six bonnes années (voir, au bas de la colonne de gauche, la rubrique «Vous êtes ici chez vous...» qui vous indiquera le nombre de visiteurs enregistrés depuis juillet 2010: auparavant nous ne disposions d'aucun chiffre).
(3) Voir notre précédent message: «Démocratie. Ultime avertissement avant liquidation».
(4) Voir, en lien, la vidéo «Trump Singing Leonard Cohen's "Democracy is Coming"». 



jeudi 10 novembre 2016

Démocratie. Ultime avertissement avant liquidation








Après la Hongrie, 
la Pologne 
la Turquie
ou la Russie, 
les Etats-Unis... 
aura-t-elle raison 
de la démocratie?
Cette dernière, 
en tout cas, 
se retrouve confrontée 
à l'une des plus graves crises de son Histoire.
Car ne tournons plus autour du pot:
face à l'envahisseur fanatisé
par les sirènes de la violence psychique et/ou physique,
le régime politique qui nous reste cher
se retrouve aujourd'hui en péril.
Et une question de tarauder
les dissidents de la pensée ouverte et de l'inclusion:
n'est-il pas déjà trop tard?
Hommage de Leonard Cohen (1)
à celle dont on commence à se demander 
si, dans sa version authentique à tout le moins, 
il ne faudra pas bientôt la qualifier 
de «chère disparue»...


«Elle émane d'un trou d'air,
depuis ces nuits de Tiananmen Square.
Elle émane du sentiment
qu'elle ne peut être tout à fait réelle,
ou alors qu'elle est réelle mais pas vraiment là.
Elle émane des guerres contre le désordre,
des sirènes qui hurlent jour et nuit,
des feux du sans-abri,
des cendres de l'homo:
la démocratie s'en vient aux U.S.A.

Elle émane d'une brèche dans le mur,
sur un flot d'alcool visionnaire,
du récit bouleversant
du Sermon sur la Montagne
que je ne prétends pas du tout comprendre.
Elle émane du silence
sur les quais de la baie,
de l'âme courageuse, intrépide et cabossée
de la Chevrolet:
la démocratie s'en vient aux U.S.A.

Elle émane du chagrin de la rue,
des lieux saints où se rencontrent les races,
des jérémiades homicides
qui envahissent chaque cuisine
quand il s'agit de savoir qui va servir et qui va manger;
des puits de déceptions
où les femmes s'agenouillent pour prier
la grâce de Dieu dans le désert du tout proche
et dans le désert du grand lointain:
la démocratie s'en vient aux U.S.A.

Vogue, vogue,
la galère puissante de l'Etat,
vers les rivages de la nécessité,
entre les écueils de l'avidité
et les bourrasques de la haine.
Vogue, vogue, vogue, vogue...

Elle arrive d'abord en Amérique,
berceau du meilleur et du pire.
C'est ici que rode l'éventail
et les rouages du changement.
Ici aussi la soif spirituelle.
Ici encore la famille éclatée.
Et ici le solitaire qui préconise
que le coeur s'ouvre
fondamentalement:
la démocratie s'en vient aux U.S.A.

Elle émane des femmes et des hommes.
Oh, ma chérie! Nous allons refaire l'amour.
Nous allons nous plaire si intensément
que la rivière en pleurera
et que les montagnes s'écrieront "Amen!".
Elle apparaît comme le flot de la marée
sous le balancement de la lune,
impériale et mystérieuse,
en un amoureux tableau:
la démocratie s'en vient aux U.S.A.

Vogue, vogue,
la galère puissante de l'Etat,
vers les rivages de la nécessité,
entre les écueils de l'avidité
et les bourrasques de la haine.
Vogue, vogue, vogue, vogue...

Je suis sentimental, si vous voyez ce que je veux dire.
J'aime ce pays, mais je n'en supporte pas le décor.
Je ne suis ni de gauche ni de droite,
je reste simplement chez moi ce soir,
me perdant dans ce petit écran désespérant.
Mais je suis têtu comme ces sacs de légumes
que le temps n'arrive pas à faire pourrir.
Tout voyou que je sois,  je n'en continue pas moins à tenir bien haut
ce petit bouquet de fleurs sauvages:
la démocratie s'en vient aux U.S.A.» (1)



Leonard Cohen



(1) Cohen Leonard, Democraty, Sony Music Entertainement Inc., 1992.


samedi 5 novembre 2016

Néolibéralisme. Pour la petite Histoire...




                              
Mises et Hayek 
l'ont inventé.
Friedman l'a aiguisé.
Thatcher et Reagan 
l'ont appliqué.
Comment 
le néolibéralisme 
a-t-il réussi à tisser sa toile 
en toute discrétion?
Réponse de George Monbiot, 


«Paris, 1938.
Au Colloque Walter Lipman, le terme de "néolibéralisme" est mis sur les fonts baptismaux. 
Parmi les délégués, deux hommes oeuvrent particulièrement à préciser le contour de cette idéologie.
Leurs noms? 

Ludwig von Mises et Friedrich Hayek
Tous deux sont exilés d'Autriche.
Tous deux appréhendent avec sévérité le "
New Deal" de l'Américain Franklin Roosevelt et ce "welfare" qui n'en finit pas de se développer en Grande-Bretagne.
Tous deux 
voient la social-démocratie comme la manifestation d'un collectivisme qu'à leurs yeux il conviendrait de rapprocher du nazisme et du communisme... 

Hayek et l'Internationale néolibérale

Dans "La Route de la servitude", Hayek défend l'idée que toute forme de planification gouvernementale conduit inexorablement à un écrasement de l'individualisme et, de là, à la main-mise d'un contrôle social de type totalitaire.
Dans la ligne d'un livre de Mises répondant au nom de "
Bureaucratie", cet ouvrage
 publié en 1944 bénéficie d'un large lectorat. 
Il retient notamment l'attention de certains des plus nantis, qui voient dans la philosophie néolibérale l'occasion rêvée de se dédouaner de toute obligation réglementaire et fiscale.
Au point qu'en 1947, année de naissance du premier outil de promotion de la nouvelle doctrine -la "
Société du Mont Pelerin"-, 
Hayek se voit soutenu par les arguments sonnants et trébuchants de plusieurs millionnaires et de leurs fondations. 
De quoi mettre le pied à l'étrier d'un de ses grands projets: la création de ce que Daniel Stedman Jones décrit dans "Les Maîtres de l'Univers" comme "une sorte d'Internationale néolibérale", à savoir un réseau transatlantique d'universitaires, d'hommes d'affaires, de journalistes et de militants. 
Bingo!
Les confortables bailleurs de fonds du mouvement financent une série de groupes de réflexion chargés d'affiner et de promouvoir la précieuse idéologie.
L'
American Enterprise Institute par exemple.

Ou alors la Heritage Foundation, le Cato Institute, l'Institut des Affaires Economiques, le Centre des Etudes Politiques, l'Institut Adam Smith... 
Des alliés d'autant plus précieux qu'ils délieront également les cordons de la bourse quand il s'agira de créer postes et départements universitaires à Chicago, en Virginie et ailleurs

Friedman ou le néolibéralisme à la puissance deux

Ce n'est qu'un début.

Avec le temps, le messie néolibéral gagne en virulence. 
Des apôtres américains comme Milton Friedman débordent en effet la grande idée de Hayek selon laquelle les gouvernements devraient réglementer la concurrence pour empêcher la formation des monopoles.
Place, donc, à une croyance plus radicale.
Qui tend, désormais, à faire de la situation monopolistique une récompense à l'efficacité. 

Mais où est donc passé le néolibéralisme?

Autre évolution majeure liée à cette période de transition: le mouvement perd son nom.
Peu après cette année 1951 qui voyait toujours Friedman s'assumer avec délectation comme néolibéral, le terme commence à se raréfier.
Et pourtant...

Alors même que l'idéologie se fait plus affûtée et le mouvement plus cohérent, rien n'est prévu pour compenser une telle discrétion. 
Vous avez dit bizarre?

Keynes fait de la résistance

Dans un premier temps, en dépit du faste de sa promotion, le néolibéralisme reste marginal.
Et pour cause...

Dans l'après-guerre, le consensus se construit à peu près universellement autour des prescriptions économiques de John Maynard Keynes.
Qui sont largement mises en oeuvre.

C'est l'époque bénie du keynésianisme:
. les objectifs du plein emploi et de la réduction de la pauvreté font l'unanimité à la fois aux États-Unis et dans la majeure partie de l'Europe occidentale;
. les maxima des taux d'imposition ne se privent pas de grimper;
. les gouvernements clament haut et fort leur volonté d'obtenir des résultats sociaux via le développement de nouveaux services publics et de filets de sécurité. 


Petit à petit

Pourtant, dans les années 1970, ces politiques commencent à tomber en désuétude.

L'heure des idées néolibérales a sonné.
Dès lors que la crise économique frappe des deux côtés de l'Atlantique,  elles commencent à infiltrer le grand public.
"Au moment où l'occasion se présentait de changer d'orientation,... une alternative était là, toute prête, qui attendait.

Explique un Friedman tout sourire. 
Les conséquences, il est vrai, ne se font pas attendre...

Portées par le double soutien des journalistes sympathisants et des conseillers politiques, des bribes de néolibéralisme -à commencer par ses recommandations en matière de politique monétaire- sont adoptées par l'administration américaine de Jimmy Carter et par le gouvernement britannique de Jim Callaghan.

L'heure de la consécration


L'arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher et Ronald Reagan fera le reste.

Bonjour les réductions d'impôts massives pour les plus aisés.
Bonjour le concassage des syndicats.
Bonjour les dérégulations.
Bonjour les privatisations.
Bonjour les politiques d'externalisation et de concurrence dans les services publics.

Au travers des Fonds Monétaire International, Banque mondiale, traité de Maastricht et autre Organisation Mondiale du Commerce, les politiques néolibérales s'imposent un peu partout dans le monde. 

Souvent sans consentement démocratique.
Souvent aussi avec l'adhésion des partis qui appartenaient autrefois à la gauche, "Labour" ou "Démocrates" en tête. 

Au point de déboucher sur un implacable constat, signé Stedman Jones...
"Jamais autre utopie n'a réussi à s'incarner aussi pleinement dans la réalité."
» (1)

(A suivre)

George Monbiot


(1) Traduction de la deuxième partie de: Monbiot George, Neoliberalism- the ideology at the root of all our problems, in The Guardian, 15 avril 2016. La suite sera publiée dans les prochains jours. Les chapeau, illustrations et intertitres sont de la rédaction.





lundi 31 octobre 2016

Néolibéralisme. A la racine de tous nos problèmes



Effondrement financier, 
désastre environnemental
ou même montée en puissance
de Donald Trump...
Autant de phénomènes 
auxquels le néolibéralisme 
n'est pas étranger. 
Et de se demander 
pourquoi la gauche a échoué 
à formuler une alternative 
digne de ce nom. 


«C'est un peu comme si le peuple de l'Union soviétique n'avait jamais entendu parler du communisme...
Pour la plupart d'entre nous, l'idéologie qui domine nos vies ne porte pas le moindre nom.
En parlez-vous au détour d'une conversation?
N'attendez à votre intervention aucune autre gratification qu'un simple haussement d'épaules.
Et même dans l'hypothèse où le terme ne serait pas complètement étranger à leurs oreilles, vos interlocuteurs seront bien en peine de le définir.
Mais au fait, vous-même...
Le "
néolibéralisme", savez-vous seulement ce que c'est?

Discrétion assurée

Néolibéralisme.

Un terme dont l'anonymat est à la fois le symptôme et la cause de la puissance.
Et une idée qui a joué un rôle majeur dans bon nombre de crises: 
. débâcle financière de 2007-2008, 
. délocalisation de richesse et de puissance, dont les "Panama Papers" ne nous offrent qu'un timide aperçu, 
. lent effondrement de la Santé publique et de l’Éducation, 
. résurgence du phénomène des enfants pauvres, 
. épidémie de solitude, 
. saccage des écosystèmes, 
. ascension de Donald Trump. 
Pourtant, nous répondons à chacune de ces crises comme si elle apparaissait isolément.
Sans prendre conscience, donc, de la cohérence qui caractérise le déclenchement ou l'exacerbation de leur philosophie sous-jacente.
Une philosophie qui, même si elle porte -ou portait- un nom, bénéficie d'un insigne  privilège: celui de pouvoir opérer en tout anonymat.

Idéologie masquée

Le néolibéralisme est devenu à ce point omniprésent qu'il donne l'impression de s'être débarrassé des oripeaux de l'idéologie. 
Tout se passe en effet comme si nous prenions pour fait acquis que cette croyance aussi utopique que millénaire relève d'une force neutre: une sorte de loi biologique, façon théorie de l'évolution de Darwin. 
Et d'occulter ainsi un paramètre majeur: la philosophie en question a bel et bien surgi avec la volonté délibérée de remodeler la vie humaine et de déplacer les lieux d'exercice du pouvoir.

La concurrence, j'adooore...

Le néolibéralisme fait de la concurrence la pierre de touche des relations humaines. 
Il redéfinit les citoyens comme des consommateurs dont les prérogatives démocratiques s'exercent essentiellement par le biais d'un binôme achat/vente conçu comme processus de récompense au mérite et de sanction à l'inefficacité. 
Il soutient que "le marché" offre des avantages qui ne pourraient jamais être offerts par quelque type de planification que ce soit. 

Le néolibéralisme en sept leçons

Les tentatives visant à limiter la concurrence? 
Appréhendées comme attentatoires à la liberté. 
L'impôt et la réglementation?
Présentés comme appelés à être réduits au minimum.
Les services publics?
Considérés comme devant être privatisés. 
L'organisation du travail et la négociation collective par les syndicats?
Dépeintes comme des distorsions du marché qui empêcheraient le sain déploiement d'une hiérarchie naturelle entre gagnants et perdants. 

L'inégalité? 
Rhabillée en vertu, car vue comme récompense à l'utilité et comme génératrice de ces richesses dont on nous explique qu'elles ruisselleraient vers le bas pour contribuer à l'enrichissement de tous. 
Les efforts visant à créer une société plus égalitaire? 
Accusés de contre-productivité et de corrosion morale. 
Le marché?
Supposé offrir à tout un chacun la garantie de recevoir à juste proportion de ses mérites.

La parabole du bon riche et du mauvais pauvre

Toutes ces croyances, nous les intériorisons et les reproduisons. 
C'est ainsi que les nantis se persuadent que leur richesse émane en droite ligne de leur mérite, ignorant ainsi des avantages -tels que l'éducation, l'héritage et la classe d'origine- qui peuvent avoir fait le lit de leur confort du moment. 
Quant aux pauvres, ils tendent à se reprocher leurs échecs même quand ceux-ci doivent beaucoup moins à des insuffisances personnelles qu'au désavantage à peu près inextricable d'une situation moins propice.

Le camp des perdants 

Peu importe le chômage structurel: si vous n'avez pas d'emploi, c'est que vous n'êtes pas entreprenant. 
Peu importe les coûts improbables du logement: si votre carte bancaire est dans le rouge, c'est que vous êtes irresponsable et imprévoyant. 
Peu importe que vos enfants n'aient plus de terrain de jeu à l'école: s'ils prennent de l'embonpoint, c'est de votre faute. 
C'est que dans un monde soumis aux règles de la compétition, ceux qui échouent se retrouvent relégués, par les autres et par eux-mêmes, dans la catégorie des perdants.
Non sans fâcheuses conséquences, que Paul Verhaeghe ne se prive pas de mettre en lumière dans son livre "What About Me?": épidémies d'automutilation, troubles alimentaires, dépression, solitude, angoisse de la non-performance, phobie sociale... 
Peut-être ne faut-il pas s'étonner, dans ces conditions, que la Grande-Bretagne, chantre de l'idéologie néolibérale la plus rigoureuse, ait accédé au statut peu envié de capitale européenne de la solitude. 
Même si aujourd'hui, plus personne n'est épargné: nous sommes tous néolibéraux.» (1)


(A suivre)


George Monbiot


(1) Traduction de la première partie de: Monbiot George, Neoliberalism- the ideology at the root of all our problems, in The Guardian, 15 avril 2016. La suite sera publiée dans les prochains jours. Les illustrations et intertitres sont de la rédaction.



vendredi 23 septembre 2016

«Regarde-les bien, ces déracinés...»



«Regarde-les donc bien,
ces apatrides...»
«Regarde-les bien, 
ces déracinés...»
«Regarde-les bien, 
ces hommes entassés 
à l'arrière du bateau...»
Invitait déjà 
l'Autrichien Stefan Zweig...















«Regarde-les donc bien, ces apatrides, toi qui as la chance de savoir où sont ta maison et ton pays, toi qui à ton retour de voyage trouves ta chambre et ton lit prêts, qui as autour de toi les livres que tu aimes et les ustensiles auxquels tu es habitué. 

Regarde-les bien, ces déracinés, toi qui as la chance de savoir de quoi tu vis et pour qui, afin de comprendre avec humilité à quel point le hasard t'a favorisé par rapport aux autres.

Regarde-les bien, ces hommes entassés à l'arrière du bateau et va vers eux, parle-leur, car cette simple démarche, aller vers eux, est déjà une consolation;
et tandis que tu leur adresses la parole dans leur langue, ils aspirent inconsciemment une bouffée de l'air de leur pays natal et leurs yeux s'éclairent et deviennent éloquents.»




Stefan Zweig


(1) Zweig Stefan, Voyages, Belfond, Paris, 1902-1939.


mardi 20 septembre 2016

Congo Kinshasa. Le risque de l'implosion






















La République          
démocratique          
du Congo          
est au bord du précipice.          
S'alarme          
Human Rights Watch.          
Qui, dans un rapport (1)          
publié ces jours-ci,          
conjure          
de mettre fin          
à la répression          
et de promouvoir          
les principes          
démocratiques.          
Des          
recommandations          
qui résonnent          
comme          
des supplications...          


«Les décisions du gouvernement de la République démocratique du Congo concernant sa prochaine élection présidentielle seront cruciales pour l’avenir du pays.»
Ainsi s'exprime Human Rights Watch
Dont le rapport résume des recherches menées ces deux dernières années.
Soit une période au cours de laquelle le gouvernement n'a pas lésiné sur la répression à l'égard des activistes autant que des dirigeants et membres des partis qui se sont opposés à la prolongation de la présidence de Joseph Kabila au-delà de la limite constitutionnelle fixée à deux mandats et prenant fin le 19 décembre 2016. 
Au-delà de l'analyse, le document y va aussi de ses «recommandations pour dissuader d’autres violations des droits humains et empêcher une crise plus large dans les semaines et les mois à venir.»

Dialogue national: info ou intox? 

«Un "dialogue national" dirigé par le gouvernement est censé présenter son accord final dans les prochains jours, rappelle l'association
La plupart des principaux partis d’opposition n’ont pas participé à ce processus, le considérant comme un stratagème pour retarder les élections et permettre au Président Kabila de se maintenir au pouvoir. 
Des activistes et des groupes d’opposition ont appelé à des manifestations à l’échelle du pays, et ce à partir du 19 septembre, soit trois mois avant la fin du mandat de Kabila et au moment où, selon les exigences de la constitution, la commission électorale doit annoncer les élections présidentielles.»

Répression faite 

«La répression gouvernementale a connu une forte hausse dans les jours menant aux manifestations projetées. 
Dans la capitale, Kinshasa, au moins une dizaine des jeunes activistes pro-démocratie ont été arrêtés après une réunion tenue le 15 septembre sur la non-violence, la paix, et le respect de la constitution. 
Ils sont détenus par l’agence nationale de renseignements, sans inculpation et sans accès à leurs familles ou à des avocats.
Le 16 septembre, des policiers dans la ville de Lubumbashi, au sud-est du pays, fait usage de gaz lacrymogène et, plus tard, tiré à balles réelles pour disperser des membres de partis d’opposition qui se réunissaient pour préparer les manifestations du 19 septembre. 
Certains participants de la réunion ont répondu en lançant des pierres, en brûlant des pneus, en bloquant des rues, puis en pillant plusieurs commerces et bureaux. 
Des dizaines de personnes ont été arrêtées tôt le lendemain matin.
Le 17 septembre, des policiers et des agents des services de renseignements ont arrêté un activiste des droits de l'homme, Patrick Pindu, à son domicile à Kinshasa, peu de temps après avoir participé à une réunion de la société civile sur les élections. 
Il a été libéré le lendemain sans inculpation, sous condition qu’il se présente à l’agence de renseignements tous les 15 jours.» 

La croisée des chemins 

«Pour contribuer à prévenir la violence, les représentants du gouvernement et les membres des forces de sécurité devraient respecter les droits des personnes aux libertés d’expression et de réunion, et autoriser le déroulement de manifestations pacifiques et de meetings politiques. 
"Les décisions que le Président Kabila et son gouvernement vont prendre dans les prochaines semaines peuvent faire toute la différence pour l’avenir de la R.D.C., a déclaré Daniel Bekele, directeur de la division Afrique à Human Rights Watch. 
Il s’agit d’une opportunité cruciale de consolider la démocratie, l’État de droit, et les droits humains dans le pays. 
Tout profit, le cas échéant, pour le futur.
Celui du Congo lui-même.
Et celui de la région toute entière."» (1)






mercredi 14 septembre 2016

Nuit debout. Divergence des luttes?







































C'était en 2011.
Projet relationnel se penchait
sur les cas des Indignés.
Et mettait le doigt
sur plusieurs difficultés,
dans le fond et dans la forme.
Indignation aussi confuse
qu'hétérogène et disparate.
Engagement trop réactif
et trop peu défini,
tant dans son intensité
que dans son objet.
Pour faire bref,
la nébuleuse s'agrégeait 

davantage dans le rejet que dans le projet.
Et péchait, du coup, par manque de colonne vertébrale.
Cinq ans plus tard,
Nuit debout
allait-il tirer les leçons
de ce (relatif)
constat d'échec?
A lire Gazette debout (1),
il semble bien que non...




«Après bientôt six mois à observer le phénomène Nuit Debout et ses satellites, certaines problématiques majeures ressortent clairement. 
Où faut-il aller? 
Comment les décisions sont-elles prises? 
On retrouve aussi un sujet récurrent: celui des multiples désaccords qui s’expriment au sein des discussions et qui tournent parfois au déchirement. 
Les affrontements peuvent prendre le dessus et donnent de malheureux résultats. 
Il y a des irréconciliables à Nuit Debout, les débats n’y sont que plus passionnés.

Ces sujets de désaccords sont nombreux. 
Certains restent persuadés que ces mésententes sont uniquement politiques, mais il existe aussi des querelles de pouvoir, des affaires personnelles et des préjugés naturels qui alimentent certains conflits. 
Il faut aussi parler des lourdes responsabilités de celles et ceux qui prennent position, des responsabilités qui les amènent à l’épuisement, ou à l’explosion.

Il y a d’abord un courant anarchiste à Nuit Debout qui trouve tout le plaisir d’exprimer sa liberté d’expression, sa liberté d’inventer un nouveau modèle et sa liberté de désobéir dans la dignité. 
Il faut que notre monde ait pris bien des restrictions pour que quelques amoureux de la liberté soient contraints à se réunir sur les places publiques pour retrouver un souffle. 
Les anarchistes sont les premiers à avoir compris les mécanismes politiques et humains à Nuit Debout, et cela dès les premiers mois.

On trouve ensuite un courant humaniste, dont je fais partie, qui affirme sa volonté de «laisser faire le mouvement social» dans le sens de l’acceptation des revendications des uns et des autres, dans la continuité d’une philosophie ancrée dans le réel. 
Lorsque des milliers de citoyens se réunissent sur les places publiques pour s’entendre, c’est qu’il y a bien un problème à identifier. 
On croise de nombreux intellectuels à Nuit Debout qui comprennent la force du mouvement à élever la conscience générale, celle qui libère des fausses certitudes et des soumissions. 
Ce mouvement de construction de la pensée politique est nécessaire à notre quotidien. 
C’est en Nuit Debout qu’est apparu un nouveau sens de la liberté, un savoir tout particulier qui amène chacune et chacun à l’émancipation.

S’est également attaché à Nuit debout un mouvement «patriote», qui ressent dans cette impulsion des perspectives pour la France contraires à celles de la tyrannie et des programmes autoritaires.
Aujourd’hui la démocratie est asphyxiée, les patriotes ont vu un intérêt général à la réoxygéner. 
Un tabou s’est imposé au fil des mois sur la dimension nationale du mouvement, avec une certaine hantise du drapeau français et de l’héritage républicain; c’est ce qui a rendu une part non méprisable des participantes et des participants silencieux. 
En s’ouvrant, on constate que la dimension locale est fréquemment mise de côté au profit d’une ambition plus large. 
Ce courant démocrate reste assez ancré dans le mouvement, avec l’idée qu’il y aurait en Nuit debout l’avenir du pays dans ce qu’il a de plus constructif.

Nuit Debout est très majoritairement traversée par un discours anticapitaliste, mais celui-ci reste très mesuré, presque effacé. 
Un vrai mouvement anticapitaliste amène des décisions majeures, et une remise en question de l’exhibition capitaliste. 
On pourrait envisager un véritable combat contre l’exaltation du capitalisme tant celle-ci entrave les libertés. 
Ceux qui ne prêtent pas allégeance au culte populaire du capital deviennent immédiatement les ennemis de la nation. 
Dans une époque où la laïcité contraint à pratiquer ses cultes chez soi, les utopies capitalistes ne devraient pas être répandues en lieu public; Nuit Debout reste cependant très discrète sur ce terrain-là, se positionnant plus aisément contre le gouvernement en place ou pour des réformes du code du travail.

Il existe enfin une autre tendance, celle des participantes et participants qui ne croient absolument pas en la capacité de Nuit Debout à proposer un nouveau modèle de société. 
Il y a celles et ceux qui considèrent que Nuit Debout est un simple terrain de jeu
Ce sont des individus qui n’adhèrent pas au message politique, mais ils ont trouvé dans ce mouvement ce qu’ils n’ont pas trouvé ailleurs: un lieu commun où s’intégrer enfin. 
Ils n’ont pas conscience des enjeux, ils les ignorent, mais savent qu’ils trouveront là ce dont ils ont besoin pour vivre. 
Leur présence est sincère, c’est le désir de participer à ce qu’il se passe aujourd’hui.

Récemment, des propositions ont été faites pour dépasser les désaccords. 
Nous ne pourrons pas échapper aux questions les plus préoccupantes. 
À la Nuit debout de Paris, une Commission médiation s’est créée mercredi dernier, le 7 septembre, afin d’anticiper les conflits. 
D’autres ont proposé de créer un organe décisionnaire qui oblige chacune et chacun à accepter un consensus. 
Tout bouge, rien n’est immobile. 
Les débats reprennent à Nuit Debout, et nous ne sommes pas sûrs de ce qui en ressortira demain.» (2)


Alan Tréard 
pour la Gazette debout (1)


(1) Gazette debout est le journal indépendant de Nuit debout.
(2) Le message ci-dessus est repris intégralement de Tréard Alan, Confrontations à Nuit debout, in Gazette debout, 13 septembre 2016.