vendredi 11 avril 2014

Courants de pensée et modes de vie émergents (26) Militants et méditants: le feu et l'eau ?









 















Les uns se focalisent sur l'extérieur d'eux-mêmes.
Ils pensent et sont censés viser 

ce qui leur semble bon pour le collectif.
Les autres se concentrent avant tout sur l'intériorité.
Sur ce qui convient à leur propre personne.
 
Militants et méditants: le feu et l'eau?

Jusqu'ici et en attendant d'aller plus loin, nous avons envisagé les courants de pensée et modes de vie émergents (C.P.M.V.E.) sous l'angle de deux des (trois) grandes familles qui nous paraissent les composer:
. les «militants»,
. les «méditants»
Restent donc les «mutants».
Soit, pour rappel, la catégorie centrale des C.P.M.V.E..
La... meilleure en quelque sorte!
Celle, en tout cas, qu'il n'est pas encore temps d'appréhender ici. 
Et que nous garderons donc pour la fin.
Histoire, dans l'intervalle, de nous pencher sur les rapports entre militants et méditants...

Militant: qu'il est mou, ce méditant! 

Chez les militants, on ne parle jamais de soi, de ses doutes, de ses craintes… 
Pour eux, tout va très bien, merci!
C’est le monde qui ne va pas bien.
Les intéressés recourent donc à un logiciel très différent de celui des méditants.
Qui, d'ailleurs, tiennent facilement des propos que ce créatif culturel qu'est Vincent Commenne décrit comme «incompréhensibles pour les gens qui n’ont pas longuement cheminé parmi les voies spirituelles.» (1)
Circonstance aggravante: les militants ne s'intéressent absolument pas aux méditants.
Pour plusieurs raisons...
. D'abord, ils constatent que leurs vis-à-vis font grand cas du ressenti et de l'intuition. 
Et qu'ils en appellent par là à une voix intérieure qui, pour beaucoup de militants, est vécue comme «culpabilisatrice ou perturbatrice.» (2)
. Ensuite, le militantisme se vit comme une démarche avant tout altruiste.
Rien à voir, semble-t-il, avec le méditant qui s'en tient à u
ne approche profondément égocentrée.
«Mes besoins»? 
«Mes limites»?
Autant de considérations qui, une fois tombée dans l'oreille des militants, les confortent plus que jamais dans leur impression de voir transparaître le règne du «moi, moi, moi».
Il est vrai que ceux-ci, dans la mesure où ils ont souvent opté pour des choix de vie qui rendent leur existence matérielle plus difficile, n'en perçoivent que plus facilement les méditants comme prisonniers de «leur petite vie sociale et familiale» (3), donc de «leur petit confort» (3), avec pour seule perspective de l'accroître toujours davantage.
. Enfin, le militant tend à reprocher au méditant un supposé déficit d'enthousiasme pour l'action. 
«La majorité des militants agissent sur base des valeurs masculines (entre autres "se battre contre", viser le "résultat à atteindre", proclamer "il faut que" (…)) qui sont les mêmes valeurs que celles qui mènent le système en place.»
Les méditants, eux, seraient «plutôt imprégnés des valeurs dites féminines: prendre soin, vision globale, ouverture, empathie, écoute, processus…, toutes choses qui semblent des pertes de temps à beaucoup de militants.» (4)

Méditant: quelle arrogance, ce militant!

Et les méditants?
Connaissent-ils les militants?
Et veulent-ils les connaître? 

Pas davantage... (5)
Nombre d'entre eux «ressentent» qu'il ne faut pas mettre la charue avant les boeufs.
Qu'ils ne sont pas prêts à s'investir dans le monde.
Qu'ils doivent d'abord (continuer à) travailler sur eux-mêmes. (6) 
Le méditant est donc la plupart du temps dans une démarche de (re)construction de son identité, avec une faible capacité à découvrir qui il est et où il veut aller… 
Il est par conséquent assez rebuté par l’assertivité du militant, qui lui semble déplacée car basée sur «tellement d’inconscience de lui-même et de la relation à l’autre et à la vie». (7)
L'«accusé», en effet, est «une personne qui possède un ego fort».
Sûr de ses valeurs, il affirme «connaître les causes de la situation» et savoir «vers où il faudrait aller et comment.» (8) 
Tout faux pour le méditant qui, fort d'une conception tout en nuances de la réalité, a appris à éviter de percevoir l’autre comme «coupable» et lui comme «innocent».
Rien de tel pour le militant qui, à l'opposé, revendique haut et fort ses raisonnements en noir et blanc.
Quitte à pécher par l'un ou l'autre amalgame. 
A commencer par celui de la confusion entre méditants et mutants. (9)


(A suivre)

Christophe Engels (d'après Vincent Commenne)


(1) Commenne Vincent, Evaluation des valeurs et des comportements. Un nouveau regard sur les acteurs de changement, Créatifs Culturels en Belgique, 2013, p.56. A noter que nous nous inspirons librement de cet auteur dans la mesure où sa typologie des acteurs de changement se fonde sur un pôle binaire (militants et mutants) alors que la nôtre se construit sur une distinction ternaire (entre militants, méditants et mutants) qui nous semble à la fois plus susceptible de rendre justice au concept de mutance  proposé par le philosophe français René Macaire et plus à même de cerner la complexité des courants de pensée et modes de vie émergents.
(2) Commenne Vincent, idem, p.56. 
(3) Commenne Vincent, idem, p.56.
(4) Commenne Vincent, idem, p.57.
(5) Cfr. Commenne Vincent, idem, p.64. 
(6) Cfr. Commenne Vincent, idem, p.58.
(7) Commenne Vincent, idem, p.58.
(8)  Commenne Vincent, idem, pp.58-59.
(9) Pour suivre (sous réserve de changement de dernière minute):
. la suite d'une longue série de messages consacrés à une réflexion approfondie sur les courants de pensée et modes de voie émergents,
. (d'ici plusieurs semaines,) d'autres séries sur la social-démocratie, sur l'écologie politique,sur l'immigration...


3 commentaires:

  1. Pourquoi je quitte le Parti socialiste


    Paris, le 10 avril 2014
    Premier Secrétaire du Parti socialiste
    10, rue de Solférino
    75007 PARIS

    Objet : Démission


    Cher Harlem ou celui (celle ?) qui te remplacera,


    Je souhaite mettre fin aux mandats que j’exerce au Parti socialiste. Après 13 ans de militantisme, je rends ma carte.

    Je me suis engagée en politique convaincue que les injustices et les inégalités n’étaient pas la faute à pas de chance mais le produit de choix politiques qui ont toujours favorisé quelques-uns au détriment de tous les autres. J’ai adhéré au Parti socialiste convaincue que nous pouvons transformer le réel et que l’organisation collective d’individus doués de raison est le meilleur moyen de contrer un ordre établi qui creuse les inégalités, fragilise nos sociétés et porte en son sein le rejet des autres, quels qu’ils soient.

    Depuis deux ans que la gauche est au pouvoir, j’ai le sentiment que nous avons plus géré que transformé. Comme si le pouvoir nous avait changés au point que nous ayons abandonné toute analyse des rapports de forces. La société est traversée par des intérêts contradictoires, notamment économiques : nous devons choisir pour qui nous voulons agir et nous battre. C’est bien d’une bataille dont il s’agit. Car dans ces rapports de force sociaux, la gauche est – devrait être – du côté des salariées et salariés, des femmes et des hommes qui ne détiennent pas le pouvoir, les codes culturels ou les richesses. Nous devrions être leur porte-voix et leurs défenseurs.

    Nous avons cessé ce combat. La liste de nos renoncements est si longue ces derniers mois que cela donne le tournis. Au lieu de construire un rapport de force et de nous dégager des marges de manœuvres politiques et économiques pour mieux répartir les richesses, nous avons – presque méticuleusement – remis en cause nos fondements politiques.

    Nous avons fait reculer la gauche dans les têtes et dans les faits lorsque nous avons parlé de coût du travail ou lieu de parler de la richesse qu’il constitue et du coût – exorbitant – du capital. Nous avons fait reculer la gauche quand nous avons hésité ou capitulé face à des ultra-conservateurs minoritaires. Nous avons fait reculer la gauche lorsque nous avons entériné une réforme des retraites contre laquelle nous étions descendus dans la rue dix-huit mois auparavant. Nous avons fait reculer la gauche lorsque nous avons choisi de parler de « ras-le-bol fiscal » ou du « trop d’impôts » plutôt qu’engager la fameuse réforme fiscale promise en 2012. Nous allons faire reculer la gauche avec le « pacte de responsabilité » qui demande aux salariés et salariées de financer des exonérations pour les entreprises, sans qu’aucune contrepartie solide soit exigée.

    Un autre chemin était possible. François Hollande l’avait d’ailleurs dit lors du discours du Bourget : le changement, c’était pour maintenant. Changer la société, changer la vie. Nous aurions pu, fort des 18 millions de voix du 6 mai, imposer ce changement en Europe et renégocier le traité budgétaire. Nous aurions pu nous appuyer sur les nombreux travaux de celles et ceux, parmi lesquels des prix Nobel, qui appellent à refuser le dogme de l’austérité. Nous aurions pu prendre appui sur les manifestations en France et en Europe, syndicales ou associatives, qui revendiquaient plus de justice et de protection sociale. Au lieu de nous nourrir de la force donnée par le suffrage universel et les mouvements sociaux, nous avons choisi de les ignorer.

    Nous avons payé le prix fort lors des dernières élections municipales. Avons-nous tiré les leçons de ce scrutin ? Non, pas plus que nous ne l’avions fait après le 21 avril 2002 ou le 29 mai 2005. La seule chose que nous avons dit, c’est « ne vous inquiétez pas, on va mieux vous expliquer ». Comme s’il s’agissait simplement d’un problème de communication ou de casting. Les citoyennes et citoyens ne sont pas idiots, ils ne sont simplement pas d’accord. Et pour une raison très simple : les politiques que mène actuellement la gauche au pouvoir vont à l’encontre de leurs intérêts.
    ./...

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  2. ./...


    Alors que nous devrions changer de cap, nous continuons à leur adresser des sourires polis : « c’est difficile, mais nous n’avons pas le choix ». Mais s’il n’y a pas d’alternative, à quoi cela sert de faire de la politique ? Les grandes écoles regorgent de femmes et d’hommes très compétents qui sont tout à fait capables de gérer au mieux les comptes pour les faire rentrer dans les exigences de Bruxelles. La politique, c’est l’inverse : refuser l’état de fait et construire un rapport de force permanent qui nous donne des nouvelles marges de manœuvres pour agir. En donnant le sentiment qu’il n’y a pas d’autre voie possible, nous renforçons la désespérance et les partis qui prospèrent dessus.

    Certes, nous nous heurtons à des années de construction libérale de l’Europe et à dix années de droite au pouvoir qui a profondément rebattu les cartes. Je ne reproche pas au Parti socialiste de ne pas avoir renversé la table. Je lui reproche de n’avoir même pas essayé de la faire bouger.

    Je suis restée au Parti socialiste pendant 13 années, pas toujours d’accord avec les orientations qu’il portait mais convaincue qu’il fallait mieux un outil – même imparfait – capable de changer la vie que pas d’outil du tout.

    Si je pars, c’est que je constate que le Parti socialiste tel qu’il existe aujourd’hui n’est plus cet outil de transformation de la société. Il suffit d’ailleurs de regarder avec un peu de lucidité ce qui se passe au sein même de cette organisation : j’ai vu pendant des années une reproduction implacable des inégalités (sociales, de sexe, d’origine, etc…) que nous combattons à l’extérieur.

    Je vais donc aller construire la gauche ailleurs et participer comme je peux à préparer une alternative au chemin politique que vous avez décidé d’emprunter.

    J’espère que les chemins de toutes et tous les militants de gauche finiront par se retrouver pour construire ensemble un projet politique qui fasse reprendre à notre société la marche du progrès.


    Caroline De Haas

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  3. Belgique

    Réforme bancaire : la loi est passée ... dans l'indifférence et sans problème ?

    La loi sur la « séparation des métiers bancaires » a été votée ce jeudi 3 avril dans la quasi indifférence générale. L'analyse du texte rendu enfin public confirme qu'il ne s'agit pas d'une séparation stricte comme le souhaitaient les membres de la campagne « scinder les banques ». Il faudra compléter la réforme durant la prochaine législature, notamment en se montrant plus ambitieux quant à la réforme bancaire européenne.

    Scinder les banques
    En octobre dernier, le Ministre des Finances Koen Geens annonçait vouloir un accord sur la réforme bancaire avant la fin de la législature. Le Réseau Financité, FairFin et le collectif citoyen Roosevelt .BE se sont alors mobilisés autour de la campagne « scinder les banques ».
    L'objectif de cette campagne était de rassembler les citoyens et demander à notre gouvernement de revenir à une séparation stricte entre banque d'investissement et banque de dépôt. Cette solution est le seul moyen pour que l’État n'ait pas, en cas de nouvelle crise, à supporter financièrement un nouveau sauvetage dont les citoyens devraient à nouveau payer le prix.

    Pas de vagues

    La loi sur la réforme bancaire votée jeudi dernier constitue clairement une avancée mais pose encore question, notamment au niveau de sa mise en œuvre, du contrôle, de la portée des exceptions pour lesquelles le
    trading pour compte propre est encore permis et de la hauteur du seuil de 15 % des activités de trading
    dont on ne peut être sûr qu'il permette totalement de mettre les épargnants à l'abri des prises de risques des banques.

    La suite

    La suite de cette loi se jouera désormais au niveau européen. En janvier dernier, la Commission a publié une proposition de réglementation. Les objectifs du texte sont ambitieux mais les écueils sont nombreux sur le chemin de son adoption. D'abord, il faudra que le nouveau Commissaire au marché intérieur (successeur de Barnier) soutienne le texte comme une priorité. Ensuite, et surtout, il faudra que le Conseil des Ministres (dont fera partie notre prochain Ministre des finances) maintienne l'ambition du texte, alors que la France, l'Allemagne, la Suède, la Pologne et la République Tchèque ont déjà annoncé leur opposition. Ce débat ne doit pas occulter la nécessité de revoir la nouvelle loi bancaire belge insuffisante au cours de la prochaine législature.

    C'est dans ce but que les partenaires de la campagne « scinder les banques » adressent un message à tous les candidats, aux élections européennes et fédérales : mettez tout en œuvre pour voir aboutir un texte sur une séparation stricte des métiers bancaire au niveau européen, pour qu'enfin on puisse affirmer « 2008, plus jamais ».

    Annexes
    http://www.ecosocdoc.be/static/module/bibliographyDocument/document/003/2706.pdf

    Les partenaires de la campagne
    La campagne ScinderLesBanques.be est menée par le collectif citoyen Roosevelt.be, le Réseau Financité et Fairfin. la campagne est menée dans le cadre de la campagne européenne de Finance Watch "Changer la Finance”. Elle est soutenue par de nombreuses associations, organisations, syndidats et mutuelles (voir sur www.scinderlesbanques.be).
    Plus d'infos

    Sites internet : www.scinderlesbanques.be et www.bankensplitsen.be
    https://www.facebook.com/pages/Scinder-les-banquesBanken-splisten/170581943145757?fref=ts
    #splitbanks

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