vendredi 10 mai 2019

Désexcellence. Le jour le plus lent










Ces 16 et 17 mai 2019 
à Bruxelles, 
l'Atelier 
des Chercheur.e.s 
pour une Désexcellence 
des Universités 
organise 
sa Journée 
des bricolages 
pédagogiques
Objectif: 
développer 
et améliorer 
des trousses 
à outils 
pédagogiques, 
dans l’esprit 
de la Charte 
de la désexcellence
N'hésitez pas 
à vous y rendre.
Mais doucement...


En ce début de 21ème siècle, «l’Excellence» est partout.
Depuis les accords de Bologne, cette notion a aussi profondément pénétré le fonctionnement des universités. 
Cheval de Troie de la pensée néolibérale et managériale, ce mot d’ordre dissimule, mal, la mise en concurrence généralisée, la précarisation, la dévalorisation des savoirs minoritaires ou construits sur l’expérience, l’indifférence aux contenus ou encore la confiance absolue attribuée aux évaluations standardisées.
Après plus d’une décennie de réforme ininterrompue justifiée par la recherche d’excellence, nous sommes aujourd’hui confrontés à une détérioration de nos univers de travail, à une perte de sens de nos activités et à la diminution continue de la qualité du travail fourni. 
Formatage des champs et des objets de recherche, multiplication des résultats invalides et des fraudes, disparition progressive de l’esprit critique, marchandisation des enseignements, autant de conséquences très concrètes de l’idéologie de l’excellence sur les pratiques d’enseignement et de recherche.
Face à ces constats a émergé la notion de «désexcellence». 
Loin d’inciter à la paresse ou la médiocrité, elle invite à se préoccuper de la qualité effective du travail -qui porte à la fois sur la nature de ce qui est accompli et sur la satisfaction que l’on en retire -et à remettre en cause la gestion actuelle des universités.
L’appel à la désexcellence ne revient pas à regretter un «âge d’or», qui n’a jamais existé, mais à s’opposer par nos pratiques au dévoiement actuel des universités.

C'est dans cet esprit que l'Atelier des Chercheur.e.s pour une Désexcellence des Universités organise sa Journée des bricolages pédagogiques, les 16 et 17 mai 2019 sur le Campus du Solbosch de l'Université Libre de Bruxelles (ULB). 
«Cette journée -et demi- de réflexions et d’échanges réunira des intervenants de l’ULB, de l’UMons, de Paris-Nanterre, de Lille et de Toulouse 2, explique le... désexcellent Olivier Gosselain, professeur affilié au Centre d'Anthropologie Culturelle de l'institution bruxelloise.
Les exposés porteront sur la présentation d’expériences pédagogiques concrètes et de retours critiques, y compris d’étudiants.
Histoire de nourrir la réflexion. 
Histoire de développer et d'améliorer nos trousses à outils pédagogiques en matière d'enseignement et d'évaluation.
Histoire de s'inscrire, plus que jamais, dans l'esprit de la Charte de la désexcellence.
La rencontre se veut résolument ouverte, modeste et fondée sur le partage.
Bienvenue, donc, aux académiques, doctorant.e.s, post-doctorant.e.s, étudiant.e.s, personnels administratif et toutes personnes intéressées par les questions de pédagogie à l'université.»





















dimanche 10 février 2019

La transition sera écologique & sociale ou ne sera pas Génération Climat: pour une transformation radicale














Elle ne croit plus à leur soi-disant progrès. 
Elle désire un autre horizon 
que celui de l'accumulation matérielle 
et de l'aliénation des individus.
Elle ne veut plus 
de la croissance 
et de l'expansion économique.
Et elle va jusqu'à acter 
la déconnexion entre «leur» monde et le sien, 
pour mieux revendiquer 
une transition 
à la fois écologique et sociale,
qui passera nécessairement, 
à ses yeux, 
par un changement de société radical.
En Belgique, 
la Génération Climat y va de sa lettre ouverte.
Pas piquée des hannetons.








Lettre ouverte de Génération Climat







«Nous ne croyons plus au progrès vendu par votre génération de responsables politiques et industriels et vos chiens de garde. 




Nous ne voulons plus de la croissance et de l'expansion économique, car cette quête insensée et aveugle, inhérente à notre civilisation industrielle, nous mène vers le gouffre écologique.

Nous actons ici la déconnexion entre votre monde et le nôtre. 
Nous aspirons à une autre société, où la politique appartient à tous, où chaque décision intègre la finitude et la fragilité de la nature, où les relations humaines priment sur la compétition et la concurrence entre tous, où toute vie humaine, animale et végétale, est considérée comme importante peu importe sa valorisation économique. 
Votre civilisation a un besoin insatiable de ressources naturelles que vous allez puiser sans cesse plus loin. 
En fait, cette civilisation est animée par une pulsion de mort, elle cherche à tout prix à détruire la Vie sur Terre afin de la convertir en marchandises.

Cette nouvelle société, ou plutôt ces nouvelles sociétés, le système politique et économique actuel ne peut nous l'offrir sur un plateau. 
C'est pourquoi nous continuerons à nous battre, à faire la grève, à manifester et à désobéir, pour notre avenir.

Nous avons le désir radical de transformer la société, et vous, tout comme vos collègues, avez la volonté radicale de gagner des élections. 
La faute à un système politique dépassé et uniquement représentatif qui met en compétition des partis dont le but principal est d'arriver au pouvoir. 
Vous ne cherchez pas à nous garantir un avenir, mais plutôt à satisfaire votre électorat et vos intérêts personnels sur le court terme. 
A partir de ce constat, la probabilité que nous tombions d'accord est proche de zéro, et l'intérêt que nous avons à négocier des petits pas avec vous l'est tout autant.

Il est temps d'entamer la décroissance: la réduction de la production matérielle est une nécessité absolue, et doit se combiner à une réduction drastique des inégalités et une meilleure redistribution des richesses. 
Le confort matériel excessif dans lequel vivent certaines sphères de la population est parfaitement indécent au vu de l'impact que cela génère sur les êtres vivants et la biosphère.

Tous les jeudis, et ce jusqu'aux élections, nous ferons grève, toujours plus nombreux. 
Tous les jours, nous nous organiserons pour développer les alternatives au vieux monde, et nous construirons des moyens d'action innovants et divers pour faire pencher la balance vers la préservation de la vie sur Terre plutôt que vers sa destruction.

De votre côté, faites ce que vous pouvez. 
Ou plutôt, faites ce que vous devez, si tant est que l'avenir des jeunes générations vous est prioritaire: réunissez tous les partis démocratiques autour de la table et travaillez pour inscrire dans le marbre le basculement vers une société juste, démocratique et soutenable. 
Ensemble, prenez des décisions courageuses pour mettre fin au règne de l'énergie sale et abondante, et ce dans les plus brefs délais. 
Ensemble, acceptez l'impossibilité de concilier des objectifs antagonistes tels que la croissance et l'écologie.

La transition écologique suppose un juste partage des ressources et des richesses, la fin de l'expansion industrielle incontrôlée, la fin des grands travaux inutiles, destructeurs de terres arables et d'écosystèmes. 
La reconversion de l'économie capitaliste et industrielle en multitudes d'économies locales et conviviales, basées sur les échanges humains et la solidarité.

La transition sera sociale, ou elle ne sera pas. 
Il est dès lors nécessaire de construire la société de demain, d'abandonner les activités qui ravagent la nature, et de nous recentrer sur l'essentiel: les relations sociales, une éducation émancipatrice, une agriculture paysanne, biologique et à taille humaine, des économies locales, diversifiées et autogérées,...

Pour parvenir à cette société, nous envisageons de nombreux moyens d'action, car nous ne croyons plus que les changements de comportement individuels puissent suffire à changer la donne.

Nous sommes prêts à nous interposer physiquement entre les machines et les êtres vivants. Nous sommes prêts à faire grève, et nous inciterons le reste de la population à nous rejoindre.

Nous souhaitons développer une culture de résistance et agir de façon démocratique. 
En marge de nos actions et rassemblements, des assemblées populaires seront organisées afin de décider de nos modes d'action, désigner nos représentants, et définir nos revendications.

Nous allons déranger, bloquer, créer et nous battre et débattre, car nous voulons nous faire entendre afin d'empêcher le système capitaliste et industriel de détruire la seule planète qui abrite la vie et la beauté. 
Et nous avons compris que négocier avec des ennemis ne nous mènerait à rien de concluant.

Ou plutôt une utopie que nous partageons, dans une part croissante des jeunes générations. 
Nous n'avons pas honte d'employer ce mot, car les utopies devraient être la lanterne de toute société, au lieu d'être considérées comme des rêves naïfs. 
Et nous ne comptons pas sur vous pour faire de cette utopie une réalité. 
Tout au plus, vous nous dites que vous êtes d'accord avec nous. 
Votre mission devrait être la même que la nôtre: préserver les conditions de vie sur Terre, et ce pour les humains comme les non-humains. 
Nous ne défendons pas la Nature, nous sommes la Nature qui se défend. 
C'est là que se trouve le combat du XXIe siècle.»



vendredi 8 février 2019

Youth for Climate. Ours polaire et humour potache


Amis 
des courants de pensée 
et modes de vie 
émergents, 
êtes-vous plutôt 
«fin du mois 
ou «fin du monde?
En France, 
c'est la fin du mois 
qui, pour l'heure, 
tient la corde, 
avec les Gilets jaunes
En Belgique, 
c'est la fin du monde, 
Billet d'humeur
Ou histoire 
d'un ours polaire
sur la banquise 
d'un humour potache... 



























Dans le «plat pays», ils étaient encore vingt mille jeunes, ce jeudi 7 février 2019, à manifester pour le climat.
Dix mille à Louvain.
Cinq mille à Bruxelles.
Cinq mille, encore, ailleurs, de Liège à Mons en passant par Anvers, Courtrai, Hasselt, Liège ou Herve. 
N'y tenant plus, l'auteur de ces lignes s'en est allé voir dans la double capitale, du pays et de l'Europe. 
Et il est tombé nez à nez avec un... ours polaire.

Comediante

Ours polaire?
Oui.
Une petite jeune fille, en fait, joliment déguisée et flanquée, à hauteur de l'oreille, de l'esquisse d'un personnage à ce point désespéré qu'il en est à se tenir sur la tempe une funeste... poignée de pompe à essence.
Humour potache.
Tout à l'avenant de l'atmosphère qui préside à cette manifestation bon enfant.
Les slogans en témoignent à qui mieux mieux...
«Quand c'est fondu, c'est foutu».
«Ainsi fond, fond, fond notre belle petite planète».
«Désolé maman, la planète m'attend».
«Nous vivons la sixième extinction de masse. 
La cinquième, c'étaient les dinosaures».
«No time to fake».
«Vade retro, CO2».
Ou alors un «Ca urge!» illustré du Premier ministre local, Charles Michel, dont la fameuse antienne «Jobs, jobs, jobs!» se retrouve opportunément détournée en «Cop, Cop, Cop!».
C'est drôle.
Pétillant.
Rafraîchissant.
Jusqu'au facétieux «Si des demoiselles veulent m'aider à sauver le climat, voici mon insta...»
Voire jusqu'au grivois «Le climat est plus chaud que mon mec».
Ou même jusqu'à l'incestueux «Arrête de niquer ta mer».


Tragediante

La tragédie vous attire davantage?
Il suffit de demander...
«Réveillez-vous, indignez-vous, engagez-vous».
«Vous le voyez, mais vous ne faites rien: la terre pleure, le monde s'éteint».
Tiens, voilà la statue de la liberté, venue nous assurer que «War kills climate». 
Ou un (autre) ours blanc, en deux dimensions celui-ci, qui nous met en garde: «You are endangered too». 

Chaud devant!

Les policiers surveillent, paisibles, parfois goguenards.
L'hélicoptère survole, en toute sérénité.
Les motards veillent, sans inquiétude. 
Pas un sursaut, pas même un cil qui bouge alors que surgit une clameur stridente...
«On est plus chaud, plus chaud, plus chaud que le climat!». 
En marge du cortège, des quidams passent leurs chemins.
D'autres observent, incrédules.
A moins qu'ils ne sourient.
Ou qu'ils ne s'enthousiasment, parfois.
Ici, un badaud immortalise de son smartphone deux jeunes manifestantes, fières comme Artaban.
Là-bas, au deuxième étage d'un immeuble adjacent, des riverains agitent les bras et manifestent leur approbation. 
Parti de la gare du Nord, le cortège achève son périple à proximité de celle du Midi.
Un petit avant-dernier pour la route?
«Tous ensemble, tous ensemble...»
Un tambour prend le relais.
Il scande le rythme de «Ce n'est qu'un début, continuons le...».
«Climat!».
L'assistance vient de ponctuer dans un hurlement assourdissant.

A suivre

La fin se profile.
Non sans quelques digestifs verbaux.
Celui d'un jeune homme et d'une jeune femme, qui s'expriment en français...
Succès assuré!
Mais déjà une autre oratrice reprend le flambeau, en néerlandais cette fois...
«Nous sommes fiers de représenter l'Humanité». 
Le sonomètre résiste de justesse.
Mais pas pour longtemps...
«Merci beaucoup!
On vous attend la semaine prochaine...»
Aïe, aïe, aïe!
Le volume de la réponse, affirmative bien sûr, atteint un volume qui met à rude épreuve la stabilité des murs du quartier.

«Et toi tu veux faire quoi, plus tard? Moi, vivre!»

Un trajet de tram plus loin, je retrouve l'ours polaire.
Avec deux (autres) jeunes filles dont quelque chose me dit qu'elles reviennent, elles aussi, de la marche.
Le libellé du panneau transporté par l'une d'elles peut-être: «Marche (pour le climat) ou crève». 
Ou alors son cri de triomphe, le nez sur le smartphone...
«Ouaiiiiis! Cinq-cents likes en plus...»
Dans le (deuxième) tram, une femme s'approche...
«Bravo, les jeunes!
On compte sur vous, hein!»
L'ours polaire sourit jusqu'aux oreilles.
Mais entre-temps, un badaud, pas très futé, se risque...
«Vous êtes un chien?»
L'homme tient le crachoir comme pas deux.
«Moi aussi, j'ai pas mal de problèmes...»
Les jeunes filles écoutent poliment, sans arriver à en placer une.
L'une descend à un premier arrêt.
L'autre à un deuxième, d'où elle s'en va prendre son train.
La troisième un peu plus loin. 
«Je m'arrête ici. 
Au revoir, Monsieur.»
La vie continue.
La vie d'après la manif'.
La vie, aussi, d'avant la catastrophe?
Peut-être.
Mais le cas échéant, ce ne sera pas la faute de cette jeunesse-là.
Dynamique.
Vivifiante.
Revigorante.



mercredi 6 février 2019

Intériorité citoyenne

  

Intériorité et citoyenneté 
seraient-elles 
les deux faces 
d'une même pièce?
le pense.
Car, assure-t-il,
seule la richesse 
d'une vie intérieure 
profonde 
peut nous protéger 
d'une triple brutalité. 
Celle des rapports 
de fonction,
de consommation
et de matérialisme.








(Christophe André)



«Avec l'intériorité citoyenne, je réconcilie deux notions qui semblent se tirer la langue depuis longtemps.»
Comment mieux que par ce questionnement retenir l'attention des sympathisants de ce Projet relationnel?
Qui, plus souvent qu'à son tour, a plaidé la cause de la complémentarité entre militants et méditants.
Thomas d’Ansembourg abonde en ce sens (2).
Et ne rechigne pas, c'est le moins que l'on puisse écrire, à verser de l'eau à ce moulin...
«L'intériorité semble relever depuis longtemps de la vie privée.
La citoyenneté renvoie aux droits et aux devoirs, à l'engagement dans la société, dans les communautés.
Tout se passe comme si les deux étaient divisés. 
Or, beaucoup d'entre nous réalisent qu'on ne peut plus les discerner. 
Qu'au contraire, c'est notre vie privée, intérieure, intime qui non seulement commande, mais féconde notre appartenance au groupe, qui la rend créatrice, renouvelée, collaborante, compassionnée. 
A défaut d'une vie intérieure profonde, nous sommes livrés à la brutalité de rapports de fonction, de consommation, de matérialisme, dont on voit combien, aujourd'hui, ils causent de la détresse.»

Intériorité: la bouteille à l'... ancre

Toute citoyenneté digne de ce nom convoquerait-elle l'intériorité?
Oui, répond l'apôtre belge de la Communication Non Violente.
Selon lequel, aussi inconfortable puisse-t-il parfois se révéler, un tel ancrage n'en serait pas moins nécessaire. 
Pour faire quelquefois le tour de soi-même.
Et, de là, pour se rencontrer et revisiter ses systèmes de pensée.
«Il y a trois bonnes raisons à développer une vie intérieure, précise l'intéressé.
Trouver plus de joie de vivre, plus de paix intérieure d'abord.
Permettre à mon entourage d'être plus joyeux ensuite.
Servir le monde avec toute mon énergie et toute ma vitalité enfin.» 
Reliance avec soi, donc.
Mais aussi reliance avec autrui.
Et reliance avec le monde.
«Toute personne qui s'implique dans du développement personnel profond fait au fond du développement social durable.»

Du rêve à la réalité

Rêve ou réalité?
Les deux, mon général.
Car l'idée, c'est, d'une certaine façon, de rendre le rêve performatif.
D'en arriver, en l'incarnant, à l'inscrire dans ma réalité. 
Voire, si tout va bien, dans la réalité.
«Nous avons tous un rêve pour l'Humanité.
Souvent, il est assez semblable: plus d'amour, plus de tendresse, plus de présence, plus de douceur, moins de précipitation, plus de paix intérieure.
Je propose de se demander devant toute chose: est-ce que ma façon d'être au monde incarne, là où je suis, le rêve que j'ai pour le monde.
Autrement dit: est-ce que j'entretiens le problème ou est-ce que je fais partie de la solution?» (3)


(1) Thomas d’Ansembourg a exercé la profession d’avocat au Barreau de Bruxelles pendant cinq ans et travaillé dans une entreprise internationale comme conseiller juridique durant une décennie. Parallèlement, il s’est engagé, pendant dix ans également, en tant que responsable-animateur bénévole d’une association d’aide au jeunes en difficultés. Devenu psychothérapeute et formateur certifié en Communication Non Violente en 1995, il propose depuis plus de vingt ans un travail de connaissance de soi, de démantèlement des pièges de l’ego, d’écoute et d’empathie se donnant vovation à «apprendre à mettre le meilleur de soi au service de tous». 
(2) Nous avons récemment rencontré l'intéressé dans le cadre d'un événement organisé par l'association NEW6S - Les acteurs de l'info constructive. Nous y reviendrons. 
(3) Les citations attribuées dans ce message à Thomas D'Ansembourg sont reprises d'une conférence TEDx prononcée par l'intéressé (Louvain-la-Neuve, le 23 mars 2003).






mercredi 30 janvier 2019

Ami, entends-tu le vol noir de l'émergence citoyenne?








Vingt-six mouvements 
engagés 
dans une transition, 
à la fois citoyenne, 
écologique, 
sociale 
et humaine. 
Plusieurs projets, 
dont le Pacte 
pour la transition 
ou la Fête des Possibles.
Collectif 
pour une Transition 
Citoyenne,
si votre ramage 
se rapporte 
à votre plumage... 




Bandeau de la Fête des Possibles : Créons demain près de chez vous














Déclaration commune 
des membres 
du Collectif pour une Transition Citoyenne 




«Face à une crise systémique (écologique, économique, sociale,…) chaque jour plus profonde, un mouvement est en marche qui, partout, réinvente nos façons de produire, d’échanger, d’habiter, de nous nourrir, de nous déplacer, d’éduquer nos enfants…

Des centaines de milliers de personnes construisent des alternatives au modèle actuel qui déstructure le tissu social, financiarise tous les aspects de nos vies, pille les ressources naturelles et encourage un consumérisme et une croissance matérielle forcenés.
Des organismes financiers d’un genre nouveau remettent l’économie au service du bien-être humain et non de l’enrichissement matériel d’une minorité. 

Des entreprises, des citoyen(ne)s, des élu(e)s donnent la priorité à une économie réelle, sociale, solidaire, ancrée dans les territoires et les communautés humaines; ouverte aux solidarités internationales et à la diversité des peuples de la terre. 
Construisent une économie circulaire, intelligente, participant à la régénération des écosystèmes.

Des citoyen(e)s, ingénieurs, acteurs associatifs, collectivités, scénarisent une transition énergétique pour progressivement abandonner les énergies fossiles et fissiles et développer un bouquet d’énergies renouvelables. 
Proposent des trajectoires afin d’engager un véritable effort de sobriété et d’efficacité énergétique. 
Des fournisseurs d’énergie proposent une électricité 100% renouvelable, rapprochent les producteurs et les consommateurs au sein de circuits courts, permettant ainsi la réappropriation citoyenne de l’énergie.

Des paysans, des agronomes développent une agriculture capable de nous nourrir sans pétrole et sans intrants chimiques, fondée sur un haut savoir agronomique, la connaissance des processus naturels, une grande diversité de semences et de variétés, librement reproductibles. 
Des producteurs associés à des citoyens, des élus locaux, réimplantent une agriculture vivrière dans chaque territoire (rural, péri-urbain ou urbain), afin d’assurer sécurité, salubrité et autonomie alimentaire pour tous.

Des démarches pédagogiques nouvelles se montent, proposant à nos enfants une éducation basée sur la coopération, la complémentarité, la connaissance de soi, des autres et de la nature. 
Une éducation leur prodiguant les savoirs, savoir-être et connaissances dont ils auront besoin pour s’épanouir et relever les défis du XXIème siècle.

Des processus d’approfondissement de la démocratie sont conduits, facilitant la participation directe des citoyens aux décisions qui les concernent, dans la cité et dans l’entreprise, instaurant une véritable coopération entre les élu-e-s et les autres citoyen(ne)s. 
Inventant les institutions nouvelles qui permettent à chacun-e de peser dans le sens de la transition à laquelle nous aspirons.

Nous, organisations qui œuvrons, chacune dans notre domaine, à cette transition écologique sociale et humaine, croyons qu’il est temps d’amplifier ce mouvement et de lui donner la puissance nécessaire à un profond changement de société.

Afin d’encourager cette dynamique, nous créons aujourd’hui, le Collectif pour une Transition Citoyenne
Montrant ainsi qu’il est indispensable d’unir nos forces, de coopérer et de sortir des logiques de chapelles. 
Nous entendons ainsi rassembler nos compétences, nos ressources, nos réseaux afin d’optimiser l’impact de nos actions individuelles et collectives. 
Nous relier pour nous soutenir mutuellement.

Nous invitons aujourd’hui toutes celles et tous ceux qui souhaitent participer à ce grand projet d’une transformation non violente de notre société, à nous rejoindre en s’impliquant dans une ou plusieurs de nos structures.

Plus que jamais nous croyons indispensable "d’être ce changement que nous voulons pour le monde", individuellement et collectivement.
De préférer dans nos vies une forme de sobriété heureuse à l’ébriété consumériste. 
La coopération à la compétition. 
L’altruisme à l’égoïsme.

N’attendons pas le changement. 
Prenons notre avenir en main, maintenant. 
Ces initiatives pionnières, ont fait leurs preuves. 
Si nous le voulons, elles pourront construire en quelques décennies, une so­ciété radicalement nouvelle, partout sur la planète.»



jeudi 24 janvier 2019

Splendeur et fragilité du lien










La fragilité du lien? 
Une évidence
dans notre société moderne.
Et pourtant...
Il est ce qui humanise 
et relie les hommes entre eux.
Utile rappel
de la psychiatre française
Anne Danion
(1).






Un lien, du latin ligamen, est ce qui lie. 
Ce peut être un objet, fil, ficelle, corde, chaîne qui attache, met en relation de proximité mais aussi retient, ferme, emprisonne. 
Il peut relier de façon virtuelle deux idées, pensées, informations pour une ou entre deux personnes, dans une dimension plus ou moins logique d’appartenance, de dépendance. 


Sur le plan affectif, symbolique et aussi juridique, il atteste d’une relation entre une ou plusieurs personnes. 
Ainsi, il maintient, fait tenir ensemble, relie, soutient, accompagne, soigne, (re)humanise, mais aussi retient.
Ces oppositions obligent à envisager le fait que le lien ouvre à une conflictualité éthique.
L’origine du lie
n humain, c’est à dire ce qui lie les êtres entre eux, est à trouver dans la relation de l’enfant à sa mère (et au-delà, ses parents).
De façon biologique tout d’abord: le cordon ombilical relie le fœtus à la mère et permet à celui-ci de se développer pour vivre.
Puis affective: le lien affectif protège l’enfant, le garde en sécurité, le guide puis doit se desserrer progressivement pour lui permettre de s’autonomiser.

De la «relation d’objet» à la relation entre sujets

Pour la psychanalyse, le lien se construit psychiquement en termes de «relation d’objet» (constitution du sujet en prise directe avec «l’objet-mère»), puis d’accès au statut de sujet autonome parlant et désirant. 
Le lien humain ouvre à la subjectivité et à l’intersubjectivité (espace de chevauchement entre l’individuel et le collectif). 
Le lien est donc ce qui humanise l’enfant grâce et dans la relation à l’autre mais peut aussi l’aliéner.
Dans le monde moderne, le lien entre particulièrement en concurrence avec l’éthique du sujet et la montée de l’individualisme qui distend le lien social: il est en même temps magnifié et fragilisé par une culture de moins en moins contenante (2)
Mais c’est parce qu’il a perdu de sa netteté que le lien nécessite aujourd’hui plus d’attention, de sollicitude aux besoins de chacun dans une éthique de la responsabilité et du care
Celle-ci met en avant l’interdépendance fondamentale des humains et la nécessité du maintien du lien, avec la sollicitude, l’attention portée à l’autre dans le respect de l’autonomie et la dignité de chacun. 

Quoi de neuf, docteur?

Cette éthique du care traverse la relation médecin malade, au-delà des seuls soins organiques. 
C’est bien sûr le cas en psychiatrie: le lien y est particulièrement fragilisé, non pas du fait de l’individualisme ambiant mais en raison de la spécificité de la maladie mentale et de la pathologie du lien qu’elle engendre. 
C’est ce qui complexifie (mais n’annule pas) la prise en compte des principes interrogeables de respect de l’autonomie de la personne malade mais aussi isole celle-ci, la coupe des autres et de la compréhension du monde par les troubles affectifs et/ou cognitifs qui lui sont intrinsèques: rejet, perte, fragilisation, absence, rupture ou encore dysfonctionnement du lien, dépendance, délire. 
Plus que jamais, le lien demeure un enjeu éthique. (3)


Anne Danion (1)


(1) Le Professeur Anne Danion est psychiatre. Elle enseigne la Psychiatrie de l'Enfant et de l'Adolescent à l'Université de Strasbourg (UDS) et exerce différentes charges aux Hôpitaux Universitaires de Strasbourg (Chef de service adjoint du Service psychothérapique pour Enfants et adolescents, responsable de l’Unité de psychopathologie de la périnatalité et du très jeune enfant et de psychiatrie de liaison, membre de la Commission Médicale d’Etablissement). Elle est en outre Vice-présidente du Comité Hospitalo-Universitaire Consultatif d’Éthique (CHUCE) et Secrétaire générale du Collège National Universitaire de Psychiatrie.
(2) Arènes, Jacques. Penser l'éthique de la famille et l'éthique du lien dans le contexte d'une culture moins soutenante, Dialogue, vol. 199, n°1, 2013, pp. 107-117.
(3) Le présent message est repris de la Lettre n°122 du CEERE (octobre 2018). Elle nous a été adressée par le Centre Européen d'Enseignement et de Recherche en Éthique (CEERE) de l'Université de Strasbourg, que nous remercions, ainsi que l'auteur. Ci-dessus, seuls les titre, chapeau et intertitres sont de la rédaction.