mercredi 28 janvier 2015

Nous, citoyens belges de confession musulmane... Juste une mise au point





















Lutter contre le radicalisme.
Et surtout mettre en place un islam 
qui contribue positivement à l'ensemble de la société. 
A l'initiative du collectif musulman «EmBem»
(Empowering Belgian Muslims), 
plusieurs dizaines d'associations (1)
personnalités et citoyens engagés 
ont signé un document (2)
qui entend promouvoir un islam «généreux»
et identifier pour ce faire quatre axes de travail: 
celui de la religion, 
celui de l'éducation, 
celui de la lutte contre les discriminations 
et celui de la valorisation de la contribution musulmane 
en Europe et en Belgique.
Juste une mise au point
Oui.
Mais sans doute bienvenue dans le plat pays.
Où il s'agit de fermer la parenthèse 
d'une période de cacophonie 
qui avait vu le président de l'Exécutif des musulmans 
faire l'objet de pressions et de menaces
pour avoir affiché des positions sans ambiguïté
au lendemain des attentats de Paris.


«Nous, citoyen-ne-s de confession musulmane, acteurs associatifs de terrain, éducateurs, artistes, enseignants et/ou académiciens, responsables religieux, imâms, représentants de mosquées ou d’associations, représentants de communautés islamiques locales, représentants d’œuvres ou de fondations caritatives, de toutes appartenances à l’islam, de toutes tendances et écoles juridiques, de toutes origines ethniques, culturelles et linguistiques, de Flandre, de Bruxelles et de Wallonie, de toutes générations, femmes et hommes, sommes réunis en ce jeudi 22 janvier 2015 pour prendre acte de la situation dramatique de l’actualité vécue par les communautés musulmanes de Belgique.

Ces dernières semaines, les tragiques événements commis par une poignée d’individus au nom de l’islam ont mis en danger -comme jamais auparavant- l’avenir de notre présence paisible et durable ainsi que celle de nos enfants en ce pays qui a vu naître la plupart d’entre nous et dont nous sommes toutes et tous de fier-e-s citoyen-ne-s.

Notre objectif commun est de réfléchir sur le mieux vivre-ensemble mais aussi de promouvoir un islam généreux qui nourrit harmonieusement l’ensemble de la société, dans toute sa diversité et sa complexité, qui contribue activement à la cohésion sociale et à la construction d’une société interculturelle inclusive, fondée sur la justice sociale, l’égalité dans la pratique et le respect de chacun-e dans sa complexité.

Pour ce faire, nous avons décidé de commun accord, à partir de nos expériences, nos expertises, nos savoir-faire, nos points de vue respectifs, sans renier notre identité propre dans notre diversité, d’œuvrer, en collaboration et en partenariat avec toutes les composantes démocratiques de notre fabrique sociale nationale, autour de quatre axes principaux:
  • l’élaboration d’une compréhension commune de l’islam à long terme qui permettra aux musulmans de vivre leur foi de manière apaisée en Belgique, en bonne intelligence avec l’ensemble de leurs concitoyens, dans le respect mutuel et l’entente cordiale;
  • l’éducation dans la paix et la promotion d’une raison critique afin d’offrir aux jeunes les ressources nécessaires pour se construire en toute autonomie et loin des discours de rupture et de haine -en renforçant notamment le dialogue parents-enfants;
  • la lutte efficace contre les discriminations, les stigmatisations et les inégalités sociales dans notre pays qui accroissent les tensions et les méfiances entre les citoyens;
  • la valorisation de la contribution musulmane en Europe et en Belgique, montrant aux jeunes générations que le patrimoine musulman est constitutif de leur vécu aujourd’hui, en Belgique, en 2015, afin de rompre définitivement avec les théories du choc des civilisations.
Nous souhaitons œuvrer ensemble pour lutter sans concession contre certaines lectures faisant l’apologie de la violence et les idéologies totalitaires qui détournent nos textes sacrés de leurs finalités pacifistes, de la préservation de la vie, de l’intérêt général, du bien commun et de la justice.

Nous nous engageons également à travailler dans la transparence et le respect mutuel, à combattre sans réserve tout discours haineux, discriminant, violent à l’encontre de toute autre communauté, minorité ou groupe –sur quelques bases que ce soit (ethnique, sexuelle, religieuse, orientation sexuelle, âge, origine sociale, handicap).

Afin de nous aider à remplir cette mission essentielle d’intérêt public, nous appelons également nos représentants politiques à engager sans plus attendre les actions suivantes:
  • accorder à la religion musulmane sa place pleine et entière dans notre paysage institutionnel, en respectant le cadre constitutionnel de séparation entre le politique et le religieux et en concrétisant au plus vite les projets renforçant l’épanouissement d’un islam de Belgique (institutionnalisation de l’islam, engagement massif d’aumôniers, formation des responsables et d’éducateurs spécialisés dans la gestion du fait religieux, émissions concédées à la TV et à la radio, soutien à l’associatif musulman …);
  • lutter efficacement contre l’islamophobie qui renforce les tensions sociales et communautaires; et lutter sans réserve contre les préjugés et les discriminations dont souffrent les musulmans, notamment dans le monde de l’éducation et de l’emploi;
  • garantir la pratique digne de l’islam dans notre pays afin de permettre aux citoyens de confession musulmane de vivre pleinement leur foi en harmonie avec les autres convictions et dans le respect de la loi et de la neutralité de l’État;
  • engager une concertation véritable avec les responsables des communautés musulmanes locales, la police et les services de prévention pour soutenir les actions de protection et de monitoring des actes antiterroristes sans sombrer dans les mesures sécuritaires inefficaces de court terme;
  • s’attaquer sans tarder aux causes profondes des inégalités sociales et économiques dans notre pays afin d’offrir à l’ensemble de la jeunesse des perspectives d’avenir;
  • développer un véritable récit collectif national dans lequel la composante musulmane est partie prenante afin de mettre en lumière des parcours de "héros" musulmans de Belgique auxquels les jeunes peuvent s’identifier;
  • rompre avec le silence et l’impunité sur de nombreux conflits au niveau international;
  • monitorer et arrêter efficacement la propagation des discours de haine -de toutes les haines- sur Internet et les réseaux sociaux.
En prenant chacun sa part de responsabilités dans ce défi et en conjuguant nos efforts, nous pouvons désamorcer les frustrations et les discours de rupture qui ont mené aux actes de terreur plaçant  l’ensemble de notre population dans la souffrance, la peine et la peur.

Par la même occasion, nous appelons l’ensemble des acteurs investis dans les secteurs de la jeunesse, de la culture, de la prévention, des médias -dont le rôle dans la déconstruction des préjugés est essentiel- et du dialogue interculturel à soutenir toute initiative favorisant le respect mutuel et l’entre-connaissance. 
Seules nos actions communes permettront de transcender les différences pour agir pour le bien commun. 
Nos enfants méritent un avenir meilleur. 
C’est pour eux que nous souhaitons agir. 
Ensemble. 
Maintenant.»


Les porte-paroles de l’initiative citoyenne
  • Fouad GANDOUL (néerlandophone) : 0(032)477 / 75 88 19
  • et Hajib EL HAJJAJI (francophone) : 0(032)496 / 32 48 48

Les premiers signataires (par ordre alphabétique)

Associations 

  •  ADAHMANE Aicha, Génération Espoir asbl
  • AHRIKA Aziz, Président de l’Association des Commerçants de la rue de Brabant (ACRB)
  • AMZILE Taoufik, Président de l’Association Belge des Professionnels Musulmans asbl (ABPM)
  • AZZOUZI Karim & CHEMLAL Karim, Président et porte-parole de la Ligue des Musulmans de Belgique
  • BARMAKRAN Ahmed, Ligue du Conseil des Savants Musulmans (majliss al ‘ilmi)
  • BATAKLI Ismail, Wefa Belgium - Organisation Internationale d’Aide Humanitaire
  • BAYRAKTAR Fatih, Fédération Islamique de Belgique (FIB)
  • BELLAL Mourad, Président du Centre Culturel Islamique d’Ottignies Louvain-La-Neuve
  • BENKIRANE Mohammed, Union des Mosquées de la Région de Bruxelles
  • BOUEZMARNI Mohamed, Secrétaire général de l’Association des Musulmans d’Arlon asbl (AMA)
  • CHAHBAR Sarah, Eurêka asbl (aide et soutien)
  • CHAIRI Zaki, Les Fourmis - Scouts et guides musulmans de Bruxelles
  • CLARINVAL François, porte-parole de la Fédération Citoyenneté et Spiritualité Musulmane (CSM)
  • COURKZINE Somaya, Fédération des Associations Marocaines (FMV)
  • Darifton, Darifton & Compagnie (secteur culturel)
  • DENIZ Tekin, I respect this
  • EL ASRI Farid et HADDOU Aicha, co-fondateur de emridNetwork (Bruxelles)
  • EL BOUTAIBI Mohamed, Président du Centre Fraternité (Bruxelles)
  • EL HABSAOUI Mourad, Vice-Président du Jardin des Jeunes asbl
  • EL HAJJAJI Hajib, Vice-Président du Collectif Contre l’Islamophobie en Belgique asbl (CCIB)
  • EL HAMOUCHI Youssef, membre de l’Exécutif des Musulmans de Belgique
  • EL KAOUAKIBI Said et MAHBOUB Nordin, Al Mawada vzw
  • EL MALIJI Said et ABBACH Fatima, Divers-City
  • EL OUAMARI Ismaël, Président du Groupe des Etudiants Musulmans de l’UCL (GEMU LLN)
  • FADLAOUI Zakaria, Directeur de l’Institut Ibn El Jazari des Sciences du Coran (IJSC)
  • FAKIR Abdelouahid (Abdel en vrai), Coordinateur de Dream asbl
  • FATHALLAH Mohamed, Alternative Démocratique des Musulmans de Belgique (ADMB)
  • GEINAERT Karim, responsable des scouts et guides musulmans de Belgique
  • GUIZA Inès, Collectif Humanitarian Assistance for Minority Ethnics in Burma (HAMEB Belgique)
  • GULBAS Ismail, Président du COJEP Belgique
  • HAMIDI Malika, Directrice générale d’European Muslim Network (EMN)
  • HENSCH Franck Amine, Président du Complexe Educatif et Culturel Islamique de Verviers asbl (CECIV)
  • JABLI Hamza, Insaniya asbl
  • JAMOUCHI Mohammed, Secrétaire Général de Religions for Peace
  • KHALI Djameleddine, Président du CEAE
  • KOC Ali, AHI-IHH, Aide Humanitaire Internationale
  • LECOYER Kim, Présidente de Karamah EU asbl/vzw
  • HMOUDA Samira, Dafa Yow asbl
  • MAHFOUD Ahmed Hany, calligraphe et Président du Khan des Derviches, espace interculturel
  • MOUEDDEN Mohsin, Président des « Ambassadeurs de la Paix »
  • N’DIAYE Mouhameth Ghali, Directeur de l’Institut Islamique Européen
  • NAG Seydi, Union des Musulmans de Namur
  • OZDEMIR Mustafa Alperen, Représentant à Bruxelles de l'Association des Industriels et Hommes d'Affaires Indépendants (MUSIAD)
  • RIAHI Nadia, Présidente d’Inaya asbl
  • RIAHI Samir, Coordinateur de Mapgraf
  • SAADOUNE Najat, Dar El Ward vzw
  • SLACHMUYLDER Amina, administrateur du Cercle des Etudiants Arabo-Européens (CEAE)
  • SOUISSI Youssef, Président de VOEM vzw
  • TAHAR Farida, Vice-Présidente du Collectif Toutes Egales au Travail et à l’Ecole (TETE)
  • TASPINAR Isa, Secrétaire général de l’Union des Démocrates Européens Turcs (UEDT)
  • TAYBI Abdallah, Coordinateur de Tremplin pour la réussite scolaire (Louvain-la-Neuve)
  • TAYBI Driss, Association d’Entraide des Jeunes d’Anoual (Louvain-la-Neuve)
  • THEWISSEN Dominique, Hijab Friendly et Fonds d’Entraide Psycho-Spirituelle
  • TOISOL Denis, Président d’Euroislam
  • ZIBOUH Fatima & PRIVOT Michael, Présidente et vice-Président d’Empowering Belgium Muslims asbl (EmBeM)
Personnalités et citoyens engagés

  • AARRASS Farida, Comité Free Ali (Bruxelles)
  • AMEZIAN Karim, citoyen (Bruxelles)
  • AZZOUZI Layla, citoyenne (Verviers)
  • BEGFOURI Hafida, Coach de vie (Bruxelles)
  • BENALI Oussama, comédien (Bruxelles)
  • BOULIF Mohamed, ancien Président de l’Exécutif des Musulmans de Belgique (Bruxelles)
  • CEKIC Nurettin, citoyen (Liège)
  • CHAIRI Mustapha, citoyen (Bruxelles)
  • CHAHBOUN Morad, citoyen, (Bruxelles)
  • CHEREF-KHAN Chemsi, citoyen actif et engagé, conférencier (Bruxelles)
  • DAHRI Gamila, citoyenne (Bruxelles)
  • DEMA One, artiste (Bruxelles)
  • El AYADI Nahima, enseignante, (Bruxelles)
  • EL ARBI Adil, réalisateur (de slimste mens ter wereld)
  • FALLAH Bilal, réalisateur et cinéaste (Bruxelles)
  • GANDOUL Fouad, politologue (Genk)
  • GELEN Seyma, Enseignante de religion musulmane (Bruxelles)
  • GUNAYDIN Zehra, médecin et ancien membre de l’EMB (Verviers)
  • HADDACH Rachid, Enseignant de religion islamique, conférencier (Bruxelles)
  • HAMMOUTI Hafida, Enseignante de religion musulmane
  • HAMZAOUI Zina, Sage-femme, sexologue, conférencière (Bruxelles)
  • HAOUACH Ihsane, citoyenne, Bruxelles
  • HDIDOUAN Fatima-Zohra, citoyenne (Bruxelles)
  • ISMAILI Noureddine, Président de l’Exécutif des Musulmans de Belgique
  • JARFI Hassan, Professeur de religion islamique (Liège)
  • KASTIT Mustapha, écrivain, imam et théologien (Bruxelles)
  • LAMGHARI, Younouss chercheur et consultant en diversité (Bruxelles)
  • LEBLICQ Virginie, Psychologue clinicienne (Bruxelles)
  • Manza (Abdeslam), artiste rap, éducateur (Bruxelles)
  • PASCOET Julie, citoyenne (Verviers)
  • RAMDANI Ayman, citoyen (Bruxelles)
  • RIAHI Rachida, citoyenne (Bruxelles)
  • Rival CNN 199, artiste (Bruxelles)
  • SAIDI Ismaël, artiste (Bruxelles)
  • SANAY Sarhane, AmanBox (Bruxelles)
  • TALHI Hicham, citoyen (Evere)
  • VANDERSTEEN Victoria, citoyenne (Gand)
  • YACHOU Wahiba, citoyenne (Bruxelles)
  • ZEGUENDI Mourade, acteur (Bruxelles)
  • ZERQANE Ramzi, citoyen (Anvers)


(1) Dont l'Exécutif des musulmans de Belgique.
(2) Gandoul Fouad et Hajjaji Hajib el (Empowering Belgian Muslims), Convergences musulmanes de Belgique contre la radicalisation et pour la citoyenneté, 27 janvier 2015.

 

2 commentaires:

  1. Bonjour,

    En novembre de cette année, le livre qui raconte mon histoire ( Extra Muros, les métamorphoses d'un voyou ) va passer en justice pour le faire interdire en Belgique et dans les écoles.
    Les " Mathu-Versmissen " de Braine l'Alleud ( ils sont 4 à déposer plainte ) ne sont pas contents du livre et demande jusqu'à 15.000 euros de dommages et intérêts.
    Je n'ai pas pu trouver d'avocat pour me défendre, ils veulent tous des sous et j'en ai pas !
    Je n'ai pas pu trouver non plus de journaliste pour donner un écho à cette affaire.
    Mon histoire n’intéresse pas...
    Le seul qui ai accepté de parler de cette affaire est un jeune journaliste
    que j'ai connu pendant ses études. Il s'appelle Alexy Seny.
    Et voici ce qu'il a écrit, c'est en 2 partie. Il en a fait un conte de Noël !
    Première partie...
    https://branchesculture.wordpress.com/category/interviews/
    Deuxième partie...
    https://branchesculture.wordpress.com/2014/12/26/serge-thiry-conte-noel-extra-muros-crime-resilience/
    Il est clair que je compte défendre ce livre envers et contre tout.
    C'est un livre pour sensibiliser, pas un règlement de comptes !
    Qui veut m'aider ?
    J'ai tenté de parler à ces gens, mais ils vont directement à la police déposer plainte pour
    " harcèlement ".
    J'ai déjà 3 plaintes contre moi...
    Pourquoi le livre dérange t'il tellement ces gens ?
    http://extramurosasbl.123website.be/

    S.O.S
    Merci, même si vous ne pouvez rien faire pour moi.
    Carpe Diem.
    Serge

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  2. L'enfant entre bien et droit

    Il y a 25 ans, le 20 novembre 1989, l’ONU promulguait la Convention Internationale des Droits de l’Enfant, ratifiée par tous ses membres sauf les Etats-Unis et la Somalie. Cette convention constitue l’aboutissement d’un long parcours de ‘libération des enfants’ et de reconnaissance de leur statut de sujets au même titre que les adultes et, comme eux, porteurs des mêmes droits et des mêmes libertés. L’enfant détient non seulement le droit à être écouté, soigné, éduqué, protégé, il détient surtout le droit à être soi-même, à affirmer ses opinions, à décider de sa vie. Ce bouleversement dans la relation à l’enfant ne va pas sans quelques tensions. La première oppose une vision de l’enfant comme être vulnérable, à protéger et celle de l’enfant acteur, dont le pouvoir d’action et de réflexion est à renforcer. Comment concilier protection et liberté ? Dans la relation de soin, par exemple, est-il convenable de prendre en compte la parole de l’enfant et le consulter avant la mise en route d’un traitement ou de le mettre à l’abri de la décision et le protéger d’une forme de responsabilisation ? Si certains pointent les risques d’une dimension contractualiste dans le rapport démocratique à l’enfant (par exemple une plus faible légitimité de l’adulte dans la relation éducative), d’autres soulignent que la convention n’est pas imposée du haut des institutions internationales, mais elle relève déjà d’une mise en question de l’autorité adulte et de luttes que les enfants ont menées : tels les combats visant non pas à éliminer le travail enfantin, mais à en améliorer les conditions et à reconnaître aux plus jeunes un statut de travailleur.

    La convention nous défie alors sur la définition même d’enfance. Est-ce du même 'enfant' dont on parle quand il/elle est soldat, élève, travailleur, jeune mariée ? Comment concilier des droits en principe universels et des constructions locales, historiques et contextuelles de l’enfance ? Les préconisations de l'ONU émergent à partir des living rights (des droits vécus et issus de l’expérience) et font l’objet d’une double transposition: une codification dans le droit international et, en retour, des interprétations, appropriations, négociations et mises en œuvre différentes selon les situations et les acteurs. Ces effets multiples de traduction ne vont pas sans conflits.

    Un troisième point de friction, enfin, relève d’une vision concomitante de l’enfant comme fin et instrument, figure du sujet par excellence et maillon du groupe témoignant, par sa bonne conduite et son bon développement, la justesse d’un fonctionnement social. Notre société confère à l’enfant une valeur sacrée : il constitue l’objet d’une passion sans précédents et le dernier avatar du processus d’individualisation. A l’aune de l’enfance on ‘mesure’ l’efficacité des systèmes scolaires, la santé de la population, la tenue des relations intergénérationnelles, la validité des nouveaux modèles familiaux. L’idée de « bien de l’enfant », toutefois, si souvent mobilisée dans les controverses sociétales, risque de devenir une rhétorique morale et politique polysémique, toujours évoquée et jamais définie. Ces discours empreints d’affects et d’inquiétude constituent le support de nouveaux jugements normatifs qui peuvent être en décalage par rapport aux besoins, aux pratiques, aux attentes des enfants réels, dans la diversité de leurs conditions de vie et de leurs relations sociales.

    Nicoletta Diasio, Professeure, Faculté des Sciences Sociales, UMR 7367 Dynamiques européennes, Université de Strasbourg

    http://ethique-alsace.unistra.fr/uploads/media/82_Lettre_CEERE_fevrier_2015.pdf
    ceere@u-strasbg.fr - tél. +33 (0)3 68 85 39 68
    http://ethique-alsace.unistra.fr

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