mardi 9 mars 2010

Simplicité volontaire. L’éternelle résurgence…


Un ton plus bas, les biens matériels ! Les «biens» relationnels ne se contentent plus des seconds rôles. Ils revendiquent dorénavant leur part du gâteau. Et brandissent crânement leur nouveau mot d’ordre : «Moins de biens, plus de liens». Lubie ? Marginalité ? Effet de mode ? Vraiment… ?


Un article dans Le Vif / L’Express par ci. Une carte blanche dans Le Soir par là. Ou alors un Forum qui fait le plein à Louvain-la-Neuve… Mine de rien, la simplicité volontaire semble aujourd’hui avoir le vent en poupe. Non pas, bien sûr, qu’elle soit représentative d’un courant de pensée majoritaire. Mais son succès va croissant.
Reste à savoir de quoi on parle exactement…

Présent : expérience personnelle et choix de vie

En fait, l’idée de simplicité volontaire s’ancre à la fois dans le passé, dans le présent et dans le futur.
Dans le présent ? Oui.
Celui de l’expérience personnelle tout d’abord.
Celui d’un choix de vie aussi. Un choix assumé. Pratiquer la simplicité volontaire, c’est opter en toute connaissance de cause pour un certain souhaitable et pour un certain désirable, explique le politologue et écrivain français Paul Ariès. Un souhaitable et un désirable qui transcendent les mythes du «toujours plus», de la croissance infinie et de cette consommation éternellement inassouvie qui relève de l’addiction.
Telle est en effet la route tracée par le Québécois Serge Mongeau, initiateur du mouvement simplicitaire. On peut vivre mieux avec moins, assure-t-il. On peut aussi travailler moins pour vivre plus. A condition de le décider. Condition suffisante, donc. Mais aussi condition nécessaire. Pas question, en effet, de confondre la simplicité volontaire avec une pauvreté subie et imposée par les circonstances. Pas question non plus de l’envisager comme un ascétisme. Car autant l’ascète se prive volontairement des plaisirs de la vie matérielle, autant l’adepte de la simplicité volontaire n’entend pas fuir le plaisir. Il le recherche au contraire. Mais pour s’y épanouir pleinement. Ainsi s’explique le recul critique qu’il prend par rapport aux soi-disant évidences de notre société de consommation. Le plaisir, oui. Mais le plaisir d’une vie sobre. Il s’agit moins de se priver d’un bien que de choisir de le remplacer par autre chose. Qui apporte davantage.
Car, poursuit Mongeau, un tel dépouillement incite à apprécier, à savourer, à rechercher la qualité. Bref à remplacer la course au «plus» par la quête du «mieux». Exit l’accumulation, place à la conscience…

Passé : innombrables et grandioses précurseurs…

Individualisme dans l’engagement, liberté par rapport au rythme de concrétisation de celui-ci… : certaines caractéristiques de la simplicité volontaire renvoient à la modernité. Mais d’autres rappellent l’idéal-type des sociétés traditionnelles. C’est le cas, par exemple, de la convivialité mise en avant par le mouvement. Ou alors de la soumission à certains principes qu’ont choisi de s’imposer les simplicitaires. (1)
La simplicité volontaire s’ancre ainsi dans le passé. Et pour cause. Elle ne sort pas de nulle part. Les grandes religions, Epicure, Diogène, les Stoïciens, Socrate, Thoreau, François d’Assises, Rousseau, Tolstoï, Gandhi, Schumacher l’ont portée à bout de bras. Tout comme, plus près de nous, les Dumont, Ellul, Gorz (qui parle d’austérité joyeuse), Illich et autre Rabhi (qui vante la sobriété heureuse).
Peut-être la simplicité volontaire pourrait-elle, du coup, être située à la charnière des sagesses/spiritualités de la tradition et des valeurs de la modernité…

Futur : vers un post-capitalisme…

La simplicité volontaire est finalement ancrée dans le futur : celui d’un art de vivre post-capitaliste. Par quoi elle entend faire œuvre pionnière. Et rejoint, en un sens, une constellation d’autres mouvements. Créativité culturelle, développement personnel, écologie, reliance, personnalisme…(2) Mais aussi consommation éthique, finance responsable, responsabilité sociale des entreprises, économie sociale…
Autant de variations sur le thème d’une éthique de la reconstruction.
La fuite en avant économique, non merci !
Place à une croissance revue et corrigée.
Revue à la lumière d’un approfondissement philosophique.
Et corrigée dans le sens d’un élargissement solidaire.

Christophe Engels

(1) Cfr. Verhelst Thierry, Des racines pour l’avenir. Cultures et spiritualités dans un monde en feu, L’Harmatan, Paris, 2008.
(2) On y reviendra.

1 commentaire:

  1. Merci pour cet article et le rappel sur le fait que la simplicité volontaire est aussi synonyme de plaisir...

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